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CHARLES GAETAN,
COMTE DE GAISRUCK,
ARCHEVÊQUE DE MILAN,
GRAND DIGNITAIRE ET AUMONIER DE LA COURONNE
DU ROYAUME LOMBARD-VENITIEN,
CONSEILLER INTIME ACTUEL DE S, M. I. R* A. , ETC.
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in 2010 with funding from
Research Library, The Getty Research Institute
http://www.archive.org/details/descriptiondelacOOferd
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AcuiHur efo'e co7iéiacre& co7nm& utv tnvur'
a/iominaa& nue je /icuj.ù a âem/ ciic/ccJâreJ
tJ' recelai , et a fiw-uJ , dlbotu^cuiiieii/^ f euu
eteJ leur c/iane Aucceùeur écor ce c/rojie
t^4j rc/ueAui^aAal , ef rua 11011.J ra/iAeuc^
icuii) /v&iind.
<Je< -m edùmewu. /ieM<euœ> Ai Yolto
Oeçeelleuce weur' 6ie?i accueaur ce/' awvraac
avec honte-, <?/ Ai, eût/ me /iwmetûan/' czo
ce lue d&dier , *Jiï& m oft/w o occasion cle
/uiùlier /uuùt&m&n/' les d-entvmend -reifiecàieiiay
a& aevoueon&n/' avec Ceàœueù /■ oé& -me
déclarer , <MBo\M>c\.a\iewc }
^z)c fy)~oâm (êœceUemce uhevwenaejsmie
Je teà) -buiiilae et bùi - obciJiant Onmïewi
creva . cAo xkouoi co
bilmt , c&4. "' ^y® vnl iâ23.
PREFACE.
V./N regardera , peut-être , comme une entre-
prise téméraire la publication de cet ouvrage ,
lorsque nous possédons déjà des écrits anciens
et modernes sur le même sujet. Est-ce la pré-
tention de mettre la nôtre en parallèle avec
eux ? Est-ce l'ambition orgueilleuse de les sur-
passer , en croyant faire mieux ? Voilà ce qu'on
nous demandera.
La première supposition , répondrons-nous ,
juste ou non , ne doit jamais , en aucun cas ,
décourager de nouveaux éditeurs. Car quelle
que soit la matière traitée , il est toujours pos-
sible de la présenter sous un nouveau point
de vue , de lui donner une forme différente. Il
est certain qu'on peut y attacher des idées qui
ont échappé aux autres , ou donner aux mêmes
idées plus de développement qu'ils ne l'ont fait.
Ceci est fort ordinaire , principalement lorsqu'il
s'agit des objets qui appartiennent aux beaux
arts, lesquels font naître des impressions et
des jugemens aussi multipliés qu'il existe de
différence dans les organes de tous les hom-
VIII
mes , et dans le genre et l'étendue des connais-
sances qu'ils ont acquises. Ne remarque-t-on pas
cette ve'rité dans les ouvrages des écrivains qui
se sont occupés des monumens des arts ? On
devine , en les lisant , à quelle époque ils ont
été dictés ; on s'aperçoit facilement combien
leur goût a été plus ou moins délicat, selon
les progrès ou la décadence de ces mêmes arts,
au temps où ces auteurs ont vécu.
Si la critique a déjà relevé des erreurs dans
plusieurs des ouvrages publiés sur l'église de
Milan, qui ont précédé le nôtre; si nous avons
taché de profiter de ses avertissemens , pour
éviter ces erreurs ; ou si nous avons cru utile
encore , pour éclairer nos lecteurs , de les dis-
cuter de nouveau, en ménageant toujours l'a-
mour propre des uns et des autres , ne pou-
vons-nous pas répondre à la seconde supposi-
tion, que tout en nous bornant là, nous courons
la chance de faire mieux. Nous nous hâtons ,
cependant, de confesser que, malgré tout le soin
que nous y avons mis , nous n'échapperons pas
à la critique : car qui peut se flatter de ne ja-
mais s'égarer, surtout lorsqu'il s'agit de remon-
ter à des temps éloignés, presque toujours en-
veloppés de ténèbres , et soumis à des préju-
gés qui rendent impossible la découverte de la
vérité ?
IX
Un écrivain , de quelque génie qu' il soit
Joue, pourra- t-il jamais donner, en les décri-
vant, à qui ne les a pas vus, une ide'e exacte
et parfaite des chefs-d'oeuvre de Raphaël, de
Michel-Ange, du Corrège, de Léonard de Vinci?
Comment faire concevoir par le discours , la
sublimité de l'invention , la distribution heu-
reuse de la composition, l'énergie de l'expres-
sion dans les attitudes et les traits , la pureté
et la grâce du dessin , les effets piquans de la
lumière , enfin le charme et la vérité de la
couleur ? Ce sera à grande peine si 1' on par-
vient à rappeler à l'imagination de l'amateur
qui a admiré ces chefs-d'oeuvre , quelques-unes
des sensations diverses qu'ils lui auront fait
éprouver.
Parcourons tous les ouvrages, où l'on dé-
crit ces superbes monumens de la sculpture et
de l'architecture, échappés au ravage des temps ,
et qu'ont produit la Grèce libre et la superbe
Rome. Lequel nous a donné une idée de la
douleur si profonde et si sublime de l'infortuné
Laocoon , dans le groupe du Musée Clémentin ,
ou de la majesté divine sur la figure du bel
Apollon dit du Belvédère ? Observez un lec-
teur qui vient de réciter les beaux vers de
Virgile , et celui qui est placé devant le fameux
X
groupe. Le premier vous répondra, si vous l'in-
terrogez , que cette description des tourmens
du grand prêtre, est un des plus beaux passages
de l'Enéide, qu'on ne peut trop admirer!....
Il n'a vu que Fart du poète , et il n'est point
ému; son esprit est séduit, mais son coeur
n'est pas palpitant ; il relira plusieurs fois le
morceau avec calme. Voyez le second ; il est
silencieux , les yeux fixés sur ces trois figu-
res , dont il ne peut se détacher, son ha-
leine est suspendue , ses regards sombres re-
viennent toujours sur cette admirable tête du
prêtre de Neptune, il paraît souffrir avec lui, et
cependant il reste là ; vous serez obligé de
l'en arracher. Interrogez-le ; il vous dira qu'il
lui est impossible d'exprimer tous les mouve-
mens dont son ame a été agitée devant ce marbre.
C'est à la peinture, au dessin, à la gravure,
qu' il appartient surtout de faire noitre des
impressions vives, parce qu'elles représentent les
objets avec toute la beauté de leurs formes ,
parce qu'elles les offrent sous tous les aspects,
comme dans leur ensemble , et qu'elles agis-
sent sur nos sens par l'illusion qui les trompe.
Cette vérité est incontestable , lorsqu' il est
question de monumens tels que celui dont
nous allons nous occuper , et elle sert a prouver
XI
combien la meilleure description est ste'rile sans
le secours de la gravure. Est-ce assez que dire :
cette cathédrale s' élevé majestueusement , sa
façade est un trésor immense de richesses en
sculpture de tous les genres ? Qui peut d'après
cela se faire une idée de sa forme générale,
et combiner dans son imagination tous les dé-
tails qui la composent? Est-ce assez pour faire
apprécier le mérite des statues produites par le
ciseau des Solari, des Busti, des Pizzi, des Pa-
cetti , des Marchesi, des Monti, que l'écrivain
leur donne l'épithète de très-belles ? Notre
imagination peut quelquefois, sans guide, s'at-
tacher à des idées communes , parce qu'elle
ne crée rien hors du cercle où ses connaissan-
ces l'ont placée ; il n'y a que quelques êtres
privilégiés qui aillent au de-là. C'est pour cela,
qu'on prétend que le divin Homère ne vit ja-
mais de modèles des arts qu'il a peints dans
ses poèmes , et que son génie devança cepen-
dant les progrès de la sculpture et de l'archi-
tecture.
Mais s'agit-il d'objets existais, il ne faut pas
laisser égarer la pensée; il faut l'amener jusqu'à
la vérité la plus exacte, par des tableaux fidèles,
et la fixer sur des beautés connues; tel est le
but , et tel est l'effet des dessins , des tableaux,
xn
des gravures. Il faut avoir vu les tableaux de
notre Migliara pour sentir tout ce que peut ins-
pirer de sentiraens religieux et d'admiration l'in-
térieur de la basilique de Milan.
S il faut donc nécessairement, pour bien dé-
crire les monumens des arts, .employer la toile ou
le cuivre , c'est en cela , peut-être , que consis-
tera tout le mérite qu'aura notre ouvrage au-
dessus des autres. Ce sont nos Soixante et cinq
planches , exécutées avec soin , d'après des des-
sins très-fidèles, lesquels, malgré leur petite pro-
portion , feront connaître, même à l'étranger qui
n'est pas venu en Italie , la fameuse Basilique
de Milan , et qui rendront présens son ensem-
ble et ses plus beaux détails aux connaisseurs
qui l'auront examinée et admirée à leur aise :
nous pouvons assurer que rien n'a été néelieé
par nous à cette intention , et que l'on ne pourra
jamais nous accuser à cet égard d'aucune erreur
et d'aucune invraisemblance.
Sans le désir de satisfaire la curiosité des
amateurs qui veulent connaître les noms des
auteurs des célèbres monumens , et les époques
de leurs travaux , nous n'aurions pas eu besoin
de placer un discours; tout était fait par nos
gravures. Mais on désire de savoir en quel siè-
cle, en quelle année, un édifice aussi pompeux
XIII
fut commence, par qui il fut fonde, quels en
furent les premiers architectes, et quand il fut
achevé'. Il fallait, pour répondre à ces questions,
consulter les archives , les traditions , les écri-
vains de tous les temps ; il fallait démêler , à
travers les opinions diverses , là où les autorités
irréfragables nous manquaient, ce qui était cons-
tant ou probable. Cependant nous ne nous som-
mes pas trop appesantis là-dessus, parce que nous
ne voulons pas nous présenter comme histo-
riens.
On nous saura gré , sans doute , d'avoir vu
en artistes les objets d'art de ce superbe édi-
fice , de relever quelquo-uns de leurs défauts,
comme aussi d'inviter les curieux à se fixer plus
long-temps devant ceux qui offrent des beautés
réelles. Nous avons jugé, avec raison, peut-
être , que parmi la quantité d'étrangers que nous
voyons se placer tous les jours devant cet édi-
fice , se promener sous les voûtes de ce tem-
ple , il en sera qui auront besoin d'être éclairés,
qui pourraient être trompés par des opinions
erronées , que le temps accrédite , qui sont pro-
noncées magistralement devant eux par une ha-
bitude d'ignorance ou d'opiniâtreté. Car ce n'est
pas aux discours des guides salariés que le vé-
ritable connaisseur prête l'oreille : c'est même
XIV
avec pitié, avec impatience, qu'il les entend dé-
biter leurs historiettes, leurs anachronismes et les
éloges distribués aveuglément. Notre ouvrage à
la main , les curieux pourront éviter ces désa-
grémens , et s'instruire , sans rien emprunter des
préjugés vulgaires. Voilà quel est notre plan,
quel est le but de notre ouvrage ; heureux si
on l'accueille avec autant intérêt que l'objet dont
nous nous occupons mérite d'admiration !
DESCRIPTION
DE LA
CATHÉDRALE DE MILAN (.}.
V>e superbe édifice a un caractère si imposant , qu'il
est difficile à l'observateur le plus froid et le moins sen-
sible, de n'être pas singulièrement étonné en le voyant
(V. PI. I, H ). Il est construit dans ce style qu'on appelle
communément gothique moderne, dont le goik s'étoit
introduit en Italie depuis le XII siècle , et que quelques
écrivains attribuent aux Arabes ou aux Maures, plutôt
qu'aux Goths , peuples qu'ils supposent trop barbares
pour avoir eu des idées si élevées. Ces opinions peuvent
se concilier facilement, puisque la grossièreté que l'on
remarque encore dans les édifices qui nous sont res-
tés des Goths, en Allemague , en France et en Italie,
atteste en effet que rien autre chose n'est dû ,
dans ce que nous admirous aujourd'hui sous le nom
de Golbique , à ces peuples que les toits aigus , et les
(i) Dans la plupart des villes d'Italie, la principale église,
la cathédrale , est appelée il Duomo , et il y a de très-érudi-
tes dissertations sur cette dénomination et sur son origine :
mais nous en ferons grâce à nos lecteurs. Nous nous conten-
tons de prévenir les étrangers que Duomo est le mot consa-
cré, et qu'il ne peut être traduit en françois par Dôme , parce
qu'alors il n'exprime plus le tout, mais une partie du temple.
arcs eu ogives, formes plus propres aux climats d'où
ils s'étaient débordés qu'au nôtre. Il restera dune cons-
tant que le style gothique qu'on peut appeler moderne,
est venu depuis l'invasion des Arabes en Espagne , et de
leurs conquêtes dans nos contrées. En effet c'est de-
puis que Charleraagne les combattit , et les repous-
sa , que datent les plus beaux édifices de ce genre
avec toute la richesse moresque. Les savans qui se
sont occupés de l'histoire des arts , pensent néanmoins
que Ton doit distinguer le style de nos églises sous
le nom de Gothique Lombard en ce qu'il offre des
différences qui paraissent n'appartenir qu'à nous. Nous
adopterons volontiers cette dénomination qui donne
une originalité au superbe monument de Milan. Mal-
gré la bizarrerie du style (t), ce temple est ce que
(i) Nous ne pouvons nous refuser à citer ici ce qu'en dit
un de ces écrivains qui accordent tout le prix à 1' élan som-
ptueux d'une imagination active, et à un genre de sensibilité'
qui étonne toujours les esprits ordinaires; nous n'adopterons
pas cependant ses idées, trop rigoureuses, sur les chefs-d'œuvre
qui out eu leurs modèles dans les monumens de 1' antiquité'.
« Le ge'nie n' a plus rien à faire dans votre architecture
grecque. Vos cinq ordres sont invariablement fixe's comme les
sept tons de la musique ; les proportions de chaque colonne
leurs distances entre-elles , la frise, l'architrave, la longueur
d'une feuille d' achante , et jusqu'au moindre filet_, tout est
mesuré d'avance, à un quart de ligne près. »
«Dans l'architecture gothique, au contraire, l'imagination
retrouve toute sa liberté; elle peut créer des ornemens , épan-
cher sa richesse dans le vaste dessin d'une façade, dans les
innombrables détails d' un portique ; elle peut donner cours à.
ses fantaisies, à ses rêves; chercher même hors de la nature
des formes et des figures nouvelles , et disposer de chaque
pierre pour en faire 1' expression d' une pensée. Il vous restera
-s( 5 )»— >
l'art dans ce genre a pu inventer de plus grand, de
plus recherché , e-t de plus merveilleux. 11 surprend
par ses grandes masses, par la multitude de ses tours
ou aiguilles pyramidales , ornées de figures , découpées à
jour, et il se distingue autant par la hardiesse de son
exécution , que par la profusion de ses ornemcns ,
d'une légèreté et d'une délicatesse singulière. Si l'on y
remarque quelques ohjets de sculpture qui ne méritent
point d'être placés en ce lieu auguste , on y admirera
une si grande quantité de chefs-d'œuvre , qu'on oubliera
aisément ces imperfections. En un mot, il est parmi les
temples du genre gothique , ce que S. Pierre de Rome
est pour la moderne architecture (V. PI. III, IV et V).
Toutes les parties de l'édifice sont de marbre blanc,
même le toit. On pourrait sans doute entasser une plus
grande quantité de marbres sur une surface plus vaste:
ce serait prouver seulement de grandes dépenses , et
une puissance en état de les supporter. Mais de tant
d'ornemens réunis , former un ensemble qui soit aussi
étonnant par sa masse, que par son travail, c'est le
chef-d'œuvre de l'art et le phénomène que présente
la cathédrale de Milan. 11 n'a fallu rien moins que
la ferveur ardente des âmes pieuses , pour fournir les
moyens d'exécuter un si riche édifice. Le même zèle
fit élever de toutes parts des temples , et la plupart fu-
de cet ensemble non une sensation , mais un sentiment pro-
fond de mélancolie, qui deviendra religieux en suivant l'éléva-
tion de cette tour, dont la flèche aiguë, montant, pour ainsi
dire , dans les airs , conduira votre pense'e sans aucune pause ,
sans aucune transition sensible, de la nef, séjour des lamen-
tations et de la prière, jusqu'au ciel conjectural, re'fuge des
espérances du chrétien. »
5
rem construits dans le beau style gothique , lequel se con-
serva dans l'Europe jusqu'au XV siècle. Parmi la quantité
prodigieuse d'églises dans ce genre, répandues en Eu-
rope , on cite principalement 3 en France, les cathédra-
les de Paris, de Rheims , de Béarnais, de Chartres,
de Strasbourg, d'Orléans, etc. ; eu Allemagne, celles
deVienne, de Cologne , d'Ulm , de Fribourg ; en Italie,
celles de Milan, de Sienne, d'Orvieto, etc. ; en Brabant,
l'église d'Anvers; en Angleterre, celles d'Yorck, de Can-
torbery , etc. , et en Espague on admire celles de Va-
lence et plusieurs de l'Andalousie et de Grenade, bâties
originairement par les Maures.
Suivant les historiens les plus accrédités, Jean Ga-
leas Visconti, comte des Vertus, premier Duc de Mi-
lan (1), protecteur des arts, prince très-ambitieux , qui,
par une conduite habile , aidée de moyens criminels ,
avait affermi sa puissance , fit ériger celte cathédrale ,
pour accomplir un vœu qu'il avait fait à la S. Vierge ,
afin d'obtenir des enfans mâles de sa seconde femme
Cauheriue, fille de Barnabô Visconti (2) son oncle. La
mort lui avait enlevé ceux qu'il eut d'Isabelle , fille de
Jean , roi de France , dit le Bon , qu'il avait épousée en
premières noces. Ce vœu, disent les mêmes historiens,
fut aussi celui du peuple milanais, parce qu'alors les fem-
mes de ce pays accouchaient difficilement , et que les
enfans mâles leur étaient ravis par une mort préma-
(1) Le portrait de ce duc , trace d'après un ancien bas-relief
authentique , se trouve grave sur le frontispice de cet ouvrage.
(2) On pre'tend qu' il mourut empoisonné au château de
Trezzo, ainsi que ses deux fils, par ordre de Jean Galéas ,
pour leur ravir la possession du duché de Milan.
turée. On se doute Lien que cetle opinion n'est fon-
dée que sur les Chroniques de ces temps, Il se pour-
roit aussi que le duc Galéas , crut, suivant une multi-
tude d'exemples dans ces siècles , expier ses crimes par
la fondation d'une riche église ; mais nous adopterons
de préférence l'opinion que ce prince, très-ambitieux ,
zélé protecteur des arts , et qui étoit parvenu à un
degré de puissance et de splendeur très-considérable ,
ait voulu éterniser sou nom par des monumens som-
ptueux. Cette conjecture semhle d'autant plus fondée
en considérant que sa magnificence ne se borna pas
à celte Cathédrale , mais qu'il fit élever la superbe
Chartreuse près de Pavie , ainsi que plusieurs édi-
fices publics , et qu'il se montra très-libéral en tout
ce qui avoit rapport à la splendeur de sa domi-
nation.
Quels que fussent cependant les motifs qui engagè-
rent le duc , c'est un fait avéré qu'il fit des dons et
des concessions très-considérahles eu faveur du nouvel
édifice, et qu'il fit présent à la ville d'une carrière de
beau marbre blanc , plus propre à résister aux ravages
du temps que celui de Carrare. La situation de cette
carrière facilitait en outre le transport des blocs qu'on
en tirait , puisque de la Candoglia , aux environs du lac
Majeur, où elle se trouve, on les faisait descendre
par la Toce , dans le lac même , et de-là jusqu'à Milan
parle Tesin, et par le canal, conuu sous le nom de
Naviglio grande.
Ce fut le même Galéas qui posa la première pierre
de ce temple magnifique le 1 5 de mars 1 586 , lors-
que le siège épiscopal était occupé par Aulouio, de la
noble famille de Saluzzo. Cette opinion est appuyée
particulièrement sur une inscription qui se trouve dans
un atelier de sculpture, placé au Campo Santo(i);
on y lit :
EL PItINCIPIO DIL DUOMO DI MILANO FU NELl' ANNO I 386 (2).
Plusieurs écrivains prétendent que la construction de
cette église fut commencée seulement en 1387 ou i388,
et ils s'appuyent sur ce qu'on lit dans la Vie des Ar-
chevêques de Milan : Anno MCCCLXXVI1I , Templum
majus Mediolani jussu Galeatii Ducis in honorent
B. M. Virginis incredibili impensa solido marmore
instaurare cœpit.
Ils ajoutent qu'elle est due principalement au zèle des
Milanais et des habitans des environs, qui ambitionnaient
d'ériger une cathédrale digne de la capitale de la
Lombardie , et qui désiraient gagner les indulgences que
le Pape et l'Archevêque avaient accordé à tous ceux
(1) Derrière la cathédrale il y a une petite place, qui ser-
voit anciennement de cimetière, et qu'on nomme encore Campo
Santo , c' est-à-dire Champ Sacré , nom qui désigne générale-
ment en Italie le lieu appelé en français cimetière. On y voit
aussi maintenant une petite église; et la place est encombrée
de blocs de marbre , qu' on travaille continuellement dans les
ateliers des sculpteurs établis clans cette enceinte. Les députés
pour la bâtisse de la Cathédrale ont leur résidence dans la
maison voisine; ils conservent dans les archives les pièces re-
latives a sa construction , et un modèle eu bois fort curieux
exécuté au commencement du XVI siècle. Il est assez grand
pour qu'un homme puisse y entrer debout ; et il mériterait
d'être mieux conservé et placé plus convenablement.
Les curieux obtiennent facilement à se procurer la vue de
ces objets.
(2) Le commencement de la cathédrale eut lieu en i586.
•«— «/ r )s— »■
qui coopérèrent h cette œuvre , soit parleurs dons , soit
par leurs travaux : on sait que ce moyen fut celui qui
contribua le plus efficacement à l'érection des premiers
temples de la chrétienté.
Toutes ces opinions pourraient se concilier , puisque
l'histoire nous apprend que le Duc n'ayant pas trouvé
les premiers fondemens de l'édifice assez vastes , il les fit
démolir et reconstruire ensuite de nouveau, ce qui de-
manda nécessairement un ou deux ans de temps (1).
Des concessions , et de riches offrandes, ont fourni alors ,
et successivement , les moyens nécessaires à la constru-
ction et à l'entretien de cet étonnant édifice , qui fut
élevé à l'endroit même où existoit déjà l'ancienne ca-
thédrale , bâtie en 856 , et consacrée à Sainte Marie
Majeure ; église qui avoit été saccagée et brûlée plu-
sieurs fois, pendant les guerres et les invasions de Fré-
déric Barberousse.
Malgré les recherches qui ont été faites jusqu'à pré-
sent, le nom de l'architecte qui traça le premier des-
sin de cette église est encore inconnu , et il le sera
peut-être toujours, à cause de la perte de beaucoup
d'anciens titres (2). Le comte Giulini a combattu, dans
(1) La magnificence du Duc et le zèle des Milanais , sont
d' autant plus admirables , que cette vaste construction fut con-
çue et commencée dans un temps où S. Pierre de Rome et
S. Paul de Londres n' existoient pas encore.
Ce fut donc uu édifice qui devoit surpasser tous ceux qu on
connoissait alors en Europe, qu'on s'e'toit propose' de cons-
truire.
(2) Moriggi, dans la Description de cette cathédrale, qu'il a pu-
bliée en 1 597^ parle d'un registre qui existait parmi les pièces con-
servées aux archives, et qui en disparut vers l'an 1577, sans
«-«( 8 )»->
son Histoire de Milan, l'opinion de plusieurs écrivaîus
qui assuraient que Henry Gamodia ou Z amodia , al-
lemand , donna le premier plan de ce temple , parce
que cet architecte ne fut appelé à Milan que cinq
ans après que la construction en fut commencée. Il
est plus facile de détruire l'opinion de Charles Tor-
re , auteur du Tableau de Milan , qui s'efforce
de prouver que les premiers travaux de cet édi-
fice furent dirigés par l'architecte Jean - Antoine
Omodeo. Cet écrivain a été probablement induit en
erreur , par l'inscription qu'on voit autour d'un por-
trait en marbre , situé sur le parapet de la petite ga-
lerie où aboutit l'escalier tournant qui conduit dessus
le Dôme : on y lit :
HOMODEUS VENER FABRICE MLI. ARCHITECTrS.
Il est prouvé que cet artiste ne vécut qu'un siècle après
le commencement de la construction , dont il fut, pen-
dant long-temps, un des architectes le plus instruit et le
plus zélé: nous aurons occasiou de parler de lui ail-
leurs. Les premiers architectes sur lesquels on a des
notices positives, sont Marc de Campione et Simon
Orsenigo , auxquels quelques historiens ont même at-
tribué le dessiu primitif.
Mais la plupart de ces opinions ne se soutiennent
qu'on ait jamais pu le découvrir , malgré les recherches faites et les
excomunications lancées contre les détenteurs de ce livre- et
il déplore sa perte comme celle de la seule pièce autentique
qui eut dû faire connaître le premier architecte inventeur du
plan de l'église , et les notices les plus certaines sur tout ce
qui regarde sa construction, depuis sa première fondation jusqu'à
l'époque de l'enlèvement de ce manuscrit.
«-*( 9 )»-
pas devant un examen plus approfondi: et au milieu
des incertitudes qui existent toujours , il nous paraît
assez probable tjne le premier dessin , antérieur à
son exécution , fut l'ouvrage d'un architecte allemand.
Cette conjecture trouverait sa source dans de fort anciens
commentaires sur Vilruve , où il est parlé de l'église de
Milan , dont, moyennant des gravures en bois bien exécu-
tées , on donne le plan , des coupes , et plusieurs dé-
tails très-exacts , et suivant l'ancien dessin. Elle prend
encore uu caractère de vraisemblance lorsqu'en con-
sidérant le grand nombre d'édifices gothiques, fort re-
marquables , qui existaient avant le nôtre dans plusieurs
parties du Nord , on lui trouve des rapports infini-
ment singuliers entre autres avec la cathédrale de Co-
logue (i). Le plan, la distribution des nefs .de celte
église sont exactement les mêmes. Une égale ressem-
blance se fait remarquer dans toutes ses proportions ,
dans les arcs-boutans , dans les aiguilles ; il n'y a
d'exception à faire dans cette parité que pour la fa-
çade , ce qui ne détruit en rien la comparaison que
nous en faisons , et les conséquences que nous en ti-
rons , puisque la façade de l'église de Milan fut changée,
comme nous le dirons par la suite , plus d'une fois ,
et que jamais , jusqu'à nos jours , on ne s'attacha à au-
cun des dessins qui furent proposés à diverses époques.
Le rapprochement que nous venons de faire des deux
cathédrales , et que l'on peut vérifier , comme nous
l'avons fait en examinant avec soin les dessins fidèles
(0 II s'agit ici du plan de la cathédrale de Cologne, et
non de son exécution entière, puisqu'elle ne parvint qu'à la moi-
tié de son dessin primitif.
<— «( IO )ss-*
de l'une et de l'autre , ce rapprochement, disons-nous,
nous autoriserait à croire que celle de Cologne , bâ-
tie i58 ans avant la nôtre, a pu lui servir de mo-
dèle , et que les Milanais se seraient adressés à un des
architectes allemands, reconnaissant en eux une supériorité
de talent plus grande pour la composition de ces sortes d'é-
difices , dont ils avaient sans cesse sous les yeux de beaux
exemples , qui étaient fort rares en Italie.
Si les célèbres Cathédrales , en style gothique, que nous
avons citées, sont les rivales de celle de Milan, par leur har-
diesse, et par la richesse singulière de leurs ornemens ( i ) ,
elles doivent lui céder la supériorité par la qualité de la
matière, et parce qu'ayant été construites dans le moyen
âge , elles n'ont pu être ornées d'une aussi grande quan-
tité de statues et de bas-reliefs, et que si dans quelqu'unes
la sculpture y a prodigué ses travaux , la grossièreté de
l'exécution les place dans un rang qui atteste la bar-
barie du goût dominant de ces temps (2). Si les ou-
vrages de ce genre qui ont été prodigieusement mul-
tipliés autour de notre église , ne sont pas également
estimables sous le rapport de l'art , au moins n'y dé-
couvret-on pas sa honteuse décadence , puisque ceux
qui datent d'une époque la plus rapprochée delà fondation
de l'édifice , présentent déjà des beautés , et des tenta-
tives vers une imitation soignée de la nature , et que nous
(1) Une ebose assez remarquable clans ces monumens , et
qui ne se trouve pas clans le nôtre , c'est que la plupart sont
ornés de statues de rois, de reines, et de princes, lesquelles
ont servi à des développemens historiques et chronologiques.
(2) L'immense richesse, du toit et de toute la partie supé-
rieure de la Cathédrale de Milan suffiroit pour détruire toute
rivalité avec les autres mentionnées ci-dessus.
<-«( I I )ïB— ►
voyons régner une progression de talcns qui , enfin ,
nous amène à admirer des chefs - d'œuvres que nous
devons à plusieurs artistes , nos contemporains , nos
concitoyens , dont les noms seront placés à leur temps
pour la gloire des arts. Il ne paroîtra pas hors de
propos que nous suspendions un moment notre rela-
tion historique de la cathédrale , pour donner au le-
cteur un aperçu des architectes les plus distingués ,
qui , dès son origine , en dirigèrent les travaux jus-
qu'en i8o5.
Les documents que nous trouvons dans les archives
de la fabrique de notre église , nous apprennent que
Jean Galéas ne se borna pas à engager pour ce grand
ouvrage des artistes italiens , mais qu'il eut recours à
plusieurs architectes étrangers dont les noms se sout
conservés. En remontant à Henri Aller de Gemùnden ,
[ plus connu dans l'histoire de notre église sous le nom
de Gamodia , traduction de celui de sa ville natale (i)],
que l'on peut regarder comme l'inventeur du plan
exécuté eu 1387 ou 1 588 , quoique cela lui soit con-
testé par Giulini , comme nous l'avons dit précédem-
ment, nous signalerons les architectes suivant les
époques où ils fureut chargés des travaux de ce vaste
édifice. Nous retrouvons depuis i588 jusqu'à 1 5gg ,
Nicolas Bonaveulure , et Jean Mignot de Paris , Jeau
de Campamios , normand ; Jean Anuex de Fernach ,
de Fribourg; Ulric de Frissingeu, d'Uliuj et Jean Cova,
peintre et architecte, de Bruges eu Flandres ; Jeau
(1) On doit se rappeler que, dans ces temps, et même postérieu-
rement , beaucoup d'artistes ne furent connus et désignes que par le
nom du lieu où ils avoient pris naissance L'histoire des peintres
d'Italie nous en fournit un grand nombre d'exemples.
4
<-«s( 1 2 W-»
Magatti en 409- Nicolas d'Arezzo vers 14.12; Plu-
lippe Bruneleschi vers 1448; Jean Solari eu 1 45 1 ^
Boniforte Solari, sou fils, en iftg; Antoine Solari,
fils de celui-ci, en i476; Jean de Gratz eu 1485.
Il semble qu'a cet architecte a dû succéder Jean An-
toine Omodeo, qui fut choisi en 1490, quatre ans
après qu'on eut consulté Hammcrer, l'architecte de la
cathédrale de Strasbourg, à propos des difficultés qui
s'étoieut élevées eu i486, sur la construction de la
coupole et de la grande aiguille. Cela feroit conjec-
turer que Omodeo fut chargé de conduire les travaux
de ce dôme jusqu'en i522 , et que c'est par cette
raison qu'il n'a pas signé avec les chefs d'ouvriers la
pièce du 27 Juin 1490 , qui se conserve aux archives,
relativement à la construction de cette partie de l'édi-
fice , quoique sou fils Antoine Omodeo pût être com-
pris parmi les artistes employés sous les ordres de
son père. On donna, en i5i2, pour adjoint à Omo-
deo, Jérôme délia Porta. Christophe Solari, dit le
Bossu , architeele et sculpteur d'un mérite distingué ,
fut également élu architecte de la fabrique, en i5o6,
mais avec la condition précise de ne point abandonner
la sculpture, qu'il enrichît de beaucoup de chefs-
d'œuvre.
Quelque fût le talent qu'on reconnaissoit à ces ha-
biles architectes , le désir que l'on avoit de conduire à
toute la perfection possible un si précieux monument
de la piété et de la gloire Lombarde , fit qu'on solli-
cita les lumières des artistes qui jouissoient en ces
tems d'une célébrité reconnue , et dont le goût et les
jugemens étoient appuyés sur des connoissances exactes
auxquelles il fallait porter une foi religieuse. On consulta
<— «( I 3 jm— >
donc , en i^gi , le célèbre Bramante, duquel nous
admirons encore plusieurs édifices précieux, et entre
autres la magnifique Chartreuse près de Pavie ; et Césare
Cesaiiano, auteur d'un excellent commentaire sur Vitrine,
que nous avons déjà cité , et ils ont peut-être même
dirigé quelques travaux de l'église , de même que
le Bramantino , en i5ig. Enfin le fameux Léonard
de Vinci qui réunissoit , à uu degré éminent , au
talent de la peinture , ceux d'un habile architecte ,
d'un savant géomètre , et même d'un musicien peu
ordinaire ; ce génie capable de prononcer ex professo
sur tout ce qui avoit rapport aux arts , fut également
appelle à donuer des conseils, en i5io, aiusi que le cé-
lèbre peintre et architecte Jules Romain, en i54-i.
En 1567 on nomma comme principal arebitecte Pel-
legrino Pellegrini, appelle particulièrement par les Bo-
lonais , le Tibaldi , du nom de son père. Cet
architecte fît, pendant le cours de dix- neuf ans qu'il
eut cette direction , embellir l'intérieur du temple.
On lui doit le beau pourtour du chœur et les cha-
pelles souterraines. Nous parlerons ailleurs de tout ce
qui appartient dans cet édifice , à ce grand artiste, et
nous allons continuer le tableau que nous consacrons
à la mémoire des hommes à talents qui méritent au-
jourd'hui, en excitant notre admiration par leurs ou-
vrages, celte mention honorable. A Pellegrini succé-
da, en 1Ô87 , Martin Bassi , qui se fit dislingue
par ses écrits contre les ouvrages de Pellegrini ,
ayant pour titre Disparer i in materia d' architettura
e perspettiva ; imprimés en iô^s, et il fut remplacé,
en iCjoo, par François Marie Ricchino. Après vint,
on 161 7 , Fabio Mangone qui est regardé comme élève
de Pellegrini; auquel succéda, en i658, Charles
Buzzi. A la mort de ce dernier , Jérôme Quadrio qui
avoit déjà été chargé de le remplacer , pendant sa ma-
ladie , fut reconnu architecte de l'église, en i658 (i).
Pendant un espace de soixante ans, savoir, depuis
1G79 jusqu'en 1744» <îue les travaux de la cathé-
drale languissants et déterminément suspendus , u'of-
froient plus aux architectes des moyens de se faire
honneur, que par quelques parties çà et là terminées,
on compte parmi ceux qui furent à la tête de l'en-
treprise, André Biffi , Jean Baptiste Quadrio, et ensuite
Vanvilelli, qui proposa un sujet de façade, composé
d'un portique décoré de colonnes torses. Charles Joseph
Merlo qui succéda à l'architecte Croce en 1770, avoit
présenté en même tems ses propres idées. JNous avons
de Croce des considérations sur la coupole et la graude
aiguille, qui furent remises, le 19 juillet 1764, à
l'administration. C'est à cet artiste qu'est clue la com-
position de la dite aiguille qu'il fit achever en 1772.
Jules Galliori ayant été nommé architecte de l'église,
présenta un nouveau dessin de la façade , qu'il accom-
pagna de réflexions critiques, fort bien raisonnées, dont
le but tendoit à faire disparaître le défaut qu'on ne
pourroit éviter en s'ohslinaut à continuer des travaux
déjà commencés, qui étoient du style romain propre-
ment dit. Cela éveilla l'intérêt, et le nohle amour propre
qui anime ordinairement les artistes par la concurrence,
moyen qui procura tant de splendeur aux arts de la
(1) Nous observerons , pour la plus parfaite intelligence , que l'admini-
stration a constamment élu, en tout temps, un architecte principal
qui doit proposer et diriger les travaux , soit d'après ses propres
dessins , soit d'après les projets adopte's antérieurement.
Grèce. La concurrence doue excita le génie , et l'on
vit Je sculpteur Pagani, Charles Orombelli, et le marquis
Louis Cagnola , tracer chacun un nouveau projet pour
cette façade qui occupoit tous les esprits.
Yers la fin de 1 795 , Félix Soave fut appelle pour
succéder à Galliori , et cela produisit encore un autre
dessin , qu'il conçut pour réformer la façade en ado-
ptant les bases établies daus le projet, déjà commencé,
de Buzzi , et en conservant la forme des portes et
fenêtres de style romain. En 1802, l'architecte An-
tolini succéda à Soave ; mais ayant été appelé à la
place de professeur d'architecture dans l'académie de
Bologne , il abandonna Milan un an après sa nomination.
Nous voici arrivés à une époque qui dissipa cette
espèce d'apathie , laquelle depuis tant d'années faisoit
craindre que jamais on ne verroit se terminer un mo-
nument si riche , et dont les premiers travaux avoient
été commencés et poursuivis avec toute l'ardeur que
peuvent inspirer la piété , l'amour de la gloire natio-
nale , et celui des arts. On s'étoit malheureusement
habitué à entendre répéter, surtout par les étrangers,
que des siècles s'amoucelleroient encore sur les marbres
de ce temple , avant qu'on vît rien d'achevé , et
ou sembloit croire que les difficultés qui s'offroient
pour la construction de cette façade , objet de la pen-
sée de tant d'artistes ingénieux qui s'étoient succé-
dés , avoient effrayé ceux de nos jours , et les dé-
tournoient de tenter à vaincre ces difficultés : comme
si dans la nature il y avoit des siècles exclusivement
réservés au génie , et d'autres qu'elle condamne à la
pauvreté. Et parce que les exemples , les modèles
qu'elle offre sont rares , doit-ou en inférer que cette
<-«( i6 ):»->•
rareté est une des combinaisons nécessaires de sa com-
position générale ? C'est aux circonstances et surtout
aux encouragemens , sagement et judicieusement distri-
bués, que l'on doit l'existence des hommes, qui rendent
brillant le siècle où ils ont vécu. C'est donc à la société ,
aux institutions qui la gouvernent , à sa posiliou géo-
graphique , à ses mœurs , et à ses richesses , que l'on
peut attribuer la gloire qui environne des savants ,
des artistes , dont les noms vont enfin faire une époque
que l'histoire signale par le titre d'illustre , de pom-
peuse ; et l'expérience nous a démontré que pour pro-
duire quelque chose que ce soit de grand , il ne faut
que vouloir. Ce sont les honneurs accordés par Au-
guste , par les Médicis , par Louis XIV , qui out fait
de leur siècle des époques mémorables.
Cette vérité n'est pas moins évidente de nos jours ,
et notre siècle , non moins fécond en savans et en ar-
tistes, ne nous laisse plus rien à désirer pour soutenir
la comparaison avec ces temps glorieux , avec la dif-
férence qu'alors les sciences et les arts étoient le par-
tage exclusif de quelques contrées , tandis que de nos
jours on les a portés à un haut degré de perfection dans
presque tous les pays de l'Europe. Par rapport aux
arts, il suffit de nommer les Canova , les Thoi'wald-
sen, les David, Gérard, Gnérin , Fûger, Appiani ,
Camucciui , un Berwik , un Morghen , un Longhi ,
Gandolfi , Rosaspina , Bettelini , Millier , DesnoYers,
Massard (t), et quantité de leurs élèves déjà rivaux
de la gloire de leurs maîtres , ainsi qu'un nombre pro-
(i) En plaçant ces noms, nous n'avons pas eu l'intention d'assigner
à chacun son rang ; ces noms se sont trouves sous noire plume seu-
lement comme notre mémoire nous les a préscnte's.
digieux d'autres artistes qui se distinguent par leurs
talents; nous en suspendons rémunération pour ne
point nous étendre trop au long.
Si les grandes entreprises qui furent le motif de la
suprématie des artistes , l'honneur des siècles anté-
rieurs, sont maintenant beaucoup moins fréquentes,
on y a suppléé par les concours , par les expositions
annuelles , par les récompenses honorables distribuées
périodiquement. La culture des arts et les encoura-
gemens n'ont pas moins influé sur tous les objets d'in-
dustrie et sur les différentes classes d'artisans. Qu'ont
à faire les meubles , les étoffes , les décorations de
luxe qui se fabriquoieut jusques vers la fin du dernier
siècle, avec nos bronzes ciselés, avec nos superbes
porcelaines, avec nos meubles, dont les formes sont si
élégantes, avec nos tapisseries qui s'approchent de la
peinture, et finalement avec les belles étoffes, où le
bon goût des dessins a remplacé le baroqiiisme des anciens.
En parlant de Milan en particulier, que l'on interroge le
voyageur éclairé , l'bomme de goût qui sait apprécier
les beautés, en quelque lieu qu'il les trouve, ne ré-
pondra-t-il pas qu'il a été ravi d'admiration en voyant
nos décorations théâtrales , introduites par les Galleari
et Gouzaga , et portées par Landriani , Canna, Fueutes,
Perego , et par Sanquii ico au plus haut degré de
richesse et de perfection ; qu'il a été étonné de voir
tous les arts concourir à donner de l'éclat et de la
pompe à nos apprêts funèbres; qu'il a reconnu depuis le
palais jusqu'à la demeure du simple particulier , dans la dis-
tribution , la composition d'un style gracieux des peintures
d'ornemens , d'arabesque et de perspective , l'influence
que dans cette partie de l'Italie a dû nécessairement
*— «( I 8 jm— >
produire le mode d'eucouragemeut et d'instruction
qu'on y a aùopté. La reconnoissance publique nous
dicte ici le nom de Jocoude Albertoli. C'est à cet
artiste, estimable sous tant de rapports, et qui préside
depuis 40 ans à l'instruction de cette partie des arts,
que nous devons la création de ce goût si rare dans
la composition de l'ornement (1). N'est-ce pas au
marquis Caguola, notre contemporain, qu'appartient
la gloire d'un monument dont le dessin rivalise avec
tout ce que les Romains ont produit de majestueux
eu ce genre, et dont les sculptures étonnent par
le goût et l'extrême délicatesse de leur exécution ?
On nous pardonnera la longueur de cette digression
elle nous offroit l'occasion de rendre un hommage à la
vérité, en démontrant que notre pays possède à juste titre
une place honorable dans les fastes des beaux arts, et que
par le secours de ceux-ci on y voit fleurir en même
temps toutes les branches d'industrie, lesquelles accé-
lèrent la civilisation. D'ailleurs ces réflexions générales
ne sont point étrangères au sujet que nous traitons,
lequel va nous occuper de tout ce qu'embrassent les
arts d'imitation et de génie. Si en décrivant leurs pro-
ductions nous avançons des éloges , ils seront stricte-
ment basés sur le mérite des ouvrages, et de même,
si nous nous permettons quelques critiques , on ne
nous accusera pas après la déclaration que nous venons
(1) Nous avons à Milan deux écoles gratuites d'ornemens , dépen*
dantes du gouvernement. Celle de Brera admet ordinairement quatre
cents élèves de toute espèce de conditions et de professions. Ou
en voit même venir des campagnes environnantes , et les heures
de leçon sont désignées de manière à ne point nuire aux travaux
habituels des élèves chez leurs maîtres de différents métiers auxquels
la plupart sont destinés.
•■ » ( t g )sï-»
de faire , de nous être abandonnés à un mouvement
d'humeur dénigrante , et à i'cuvie de déprécier les
artistes anciens ni les modernes.
Nous allons reprendre l'histoire de la construction
de notre cathédrale, que nous avons interrompue à
l'époque où le duc Jean Galéas lui prodiguoit ses soins.
Après sa mort, arrivée en 1402, on ne cessa d'y
travailler pendant le cours de près de deux siècles ,
avec plus ou moins d'ardeur , selon les moyens d'eu
soutenir les dépenses et selon les événements politiques ,
mais en suivant toujours le plan original , car comme
nous le verrons par la suite , il n'y eut que la façade
qui fut sujette à des variations. Celle qu'on construisit
alors n'étoit composée que de pièces carrées de marbre
blanc et noir, et on y avoit placé, pour tout ornement,
quelques bustes et les armoiries des Visconti; elle n'avoit
donc rien de commun avec le restant de l'édifice.
Cela prouve évidemment qu'elle n'a été construite sur
aucun dessin antérieur, mais que ce fut l'ouvrage de
quelqu'architecte de ces temps , auquel manquoient
les talents nécessaires pour composer une façade réu-
nissant l'élégance et la richesse qui cependant décorent
les églises gothiques de cette époque, ou, ce qui semble
plus probahle , qu'on n'avoit pas les fonds nécessaires
qu'exigeoit une telle entreprise. Nous remarquerons
encore qu'on fut obligé de raccourcir trois arcades de
la longueur de l'édifice qu'exigeoit le plan primitif,
à cause de la saillie d'une partie du palais Ducal qui
occupoit l'emplacement.
Ce fut en i56o, c'est-à-dire, à l'époque ou Charles
Borromée fut élu Archevêque de Milan , que les tra-
vaux reprirent une nouvelle vigueur. Ce digue prélat
<-«( 2 0 )^-"
aussi instruit que rempli de zèle pour la continuation
et le perfectionnement de son église , y apporta les
soins les plus assidus. Il s'occupa de la décoration de
l'intérieur, et en même temps il songea à la constru-
ction d'une nouvelle façade, correspondante à la richesse
du corps de l'édifice. Le célèbre architecte Pelle-
grini fut invité à en donuer le dessin ■ il remit effec-
tivement deux projets à l'Archevêque, dont l'un pres-
crivoit un portique formé par dix colonnes sur des
piédestaux , l'autre des colonnes posées sur un soubasse-
ment très-bas, mais loin d'adopter le style gothique que
prescrivoit le genre de l'édifice , il proposa dans ses
dessins le goût de l'architecture romaine. Quoique cette
réunion soit contraire aux règles de l'eurithmie, et forme
le seul objet de critique qu'on puisse faire, même de
nos jours , à notre temple , on conviendra aisément
cju'un artiste nourri par l'étude des superbes monumens
de la Grèce et de Rome , habitué par ses méditations
h ne recounoître de véritables beautés architectouiques
que daus les proportions de ses modèles, pouvoit dif-
ficilement s'écarter de la route que son génie avoit
choisie, où il apercevoit en avant et à côté de lui
iine foule de rivaux , et abandonner ainsi les chefs-
d'œuvre de la grande école pour se revêtir des idées
capricieuses et singulières du genre gothique, (i).
Mais Philippe H, roi d'Espagne, ayant appelle à
sa cour cet architecte célèbre, pour le charger de la
construction de l'Escurial , et la peste ayant dans ces
temps exercé ses ravages dans Milan , tous les travaux
(i) Vignole et Jules Romain avoient allie avant Pellegrini ces deux
Styles dans l'église de St. Pétrone à Bologne, et le Bramante dans
la façade de la Chartreuse , près de Pavie.
<-s( 2 1 )ss-»
furent suspendus. La désolation des habitans , dont
plus de 5o,ooo périrent dans l'espace de quatre mois ,
fut augmentée par la mort de St. Charles , enlevé , en
i584, à son église, qu'il édifioit par ses vertus, au
trône archiépiscopal qu'il honoroit par ses lumières et
par sa généreuse munificence envers les pauvres , au
peuple qui l'adoroit comme un père, comme un pro-
lecteur. Ija mémoire de cet illustre Archevêque , qui
se propagea de siècle en siècle , est encore chère à
tous les Lombards, qui le témoignent assez par l'af-
fluence de ceux qui se prosterneut journellement de-
vant son tomheau.
Les travaux furent repris, en i5g5, lorsque le car-
dinal Frédéric Borromée, cousin du défunt prélat, lui
succéda, après la mort de Gaspard Visconti, au siège
archiépiscopal. Ami et protecteur éclairé des sciences
et des arts, il fut le fondateur de plusieurs établisse-
mens de bienfaisance et d'utilité publique , et entre
autres de la précieuse bibliothèque à laquelle il donna ,
par modestie , le titre d'Ambroisienne , du nom de l'é-
vèque qu'on révère à Milan , en y joignant uue académie
de peinture et une galerie de tableaux des meilleurs
auteurs (i). On suivit par les ordres de l'archevêque
le plan primitif de la cathédrale , et il manifesta posi-
tivement son intention, qu'elle fut continuée dans toute
(i) Cette académie remplaça une autre qui avoit été instituée par Louis
Marie Siorza dit le Maure , seigneur de Milan , présidée par Léonard
de Vinci, et qui avoit cessé depuis quelque temps. Celle que nous
venons de nommer ci-dessus fut transportée par la suite , ainsi que
les écoles de dessin et de peinture qui y étoient jointes , au palais
île Brera , par ordre de Marie Thérèse. Ou doit à cette illustre
souveraine la fondation de l'académie et de la riche bibliothèque
qui se trouve dans le même bâtiment, entièrement dédié aux sciences
et aux arts.
<-«( 2 2 )»->
la dimension que lui avoit donné l'architecie inventeur.
C'étoit en effet un grand monument manqué , un
superbe édifice mutilé , arrêté au point où il se
trouvoit en ce moment , mais il falloit , pour réparer
cette défectuosité , vaincre un obstacle devant lequel
ses prédécesseurs avoient échoué. La cour d'Espagne, à
qui la Lombardie étoit assujettie en ces temps, se rendit
finalement aux instances de l'archevêque , et ordonna
à son gouverneur à Milan , Don Pietro De Toledo ,
la démolition du pavillon du palais, qui empêchoit le
prolongement de la cathédrale. Alors le prélat songeant
à la nouvelle façade , se fit remettre par les héritiers
de Pcllegrini, les deux dessins qu'ils possédoient. Mais
voyant la réunion discordante de l'architecture romaine
au style gothique , il en suspendit l'exécution , et crut
que le parti le plus convenable seroit d'appeler les
architectes à un concours : et afiu d'exciter leur génie,
il proposa un prix pour celui qui , ayant le mieux rem-
pli ses vues , obtieudroit la préférence par les professeurs
de l'art qui dévoient prononcer. Ou nous a conservé
les noms des architectes qui présentèrent des dessins,
ce furent Martin Bassi, Pierre Antoine Barca , Lau-
rent Biffi barnabite , Jacob délia Porta , Ftolomée et
Jérôme Rinaldi, Honoré Longo , Lelio Buzzi, Antoine
Marie Corbelta , Jérôme Sesto, et François Marie Ric-
chiuo (r). De vifs débats s'élevèrent dans la commis-
sion qui avoit à examiner les anciens dessins de Pel-
legrini concurremment avec les nouveaux. Toutes les
opinions se soumirent enfin à celle de Muzio Odi d'Urbin ,
(i) La plupart de ces dessins qui se trouvoient aux archives de la
fabrique furent égarés, on ne sait comment, et se sont retrouvés de-
puis entre les mains de quelques particuliers.
savant architecte, qui donna cependant la préférence à
celui des dessins de Pellegrini qui avait des colonnes sans
piédestaux. L'archevêque fit, en conséquence, construire
un modèle en bois de la grandeur naturelle de la
façade (i) qui coûta 58ooo livres, et qui servit à décorer
l'entrée que fit à Milan j en i633, le cardinal Don
Fernando, Infaut d'Espagne, en qualité de gouverneur
de la Lonihardie.
On commença aussitôt les travaux par détruire les
fondements qui avoient été élevés au commencement
du siècle par l'architecte Alexandre Besnaùj mais l'objet
qui présentoit des difficultés considérables et exigeoit des
soins particuliers , étoit la formation des dix colonnes
pour la façade , dont chacune devoit avoir 2 3 -~z
mètres de hauteur, y compris la base et le chapiteau.
On discuta long-temps pour savoir de quelle pierre
on les formeroit, et si elles seroient taillées d'une seule
pièce ou composées de plusieurs; cette dernière opinion
présentoit sans doute une épargue très-considérable , et
facilitoil infiniment le transport. Après qu'on eût examiné
différentes carrières, et même traité avec la direction
de celle du marbre de Carrare, on se décida pour le
granit dit miliarolo , qui se trouve près de Baveno , sur le
lac majeur , et on conclut que, nonobstant leur dimen-
(i) 11 seroit à désirer qu'on employât toujours le moyen des grands
modelés , lorsqu'il s'agit de monuments importons d'architecture , ce qui
donne la faculté de juger beaucoup mieux que jamais on ne pourra le
faire sur un dessin , et qui donne lieu de comparer les proportions , soit
par leur rapport à raison de leur hauteur au-dessus du point de vue
du spectateur, soit de leur saillie selon la distance re'gulière. Il arrive
souvent que des ouvrages d'architecture manquent du calcul exact de
l'effet perspectif, pour obtenir le développement gracieux de leurs par-
ties à l'œil du public et de l'amateur.
sion extraordinaire , on les formerait d'une seule pièce ,
tant par rapport à la solidité , que pour les rendre
plus correspondantes à la magnificence de l'édifice. La-
tuada, Dans sa description de Milan , prétend que chaque
colonne revenait à 22,000 écus , et que les frais de
transport , de la carrière à Milan , étoieut évalués à
4o,ooo livres. Aussitôt que la première colonne fut
achevée, ou chargea l'architecte Fahio Mangone des
soins du transport. Mais soit par négligence, ou
faute de précautions nécessaires, ce poids énorme iit
rompre le train sur lequel ou l'avoit placée , de sorte
qu'elle se hrisa eu trois pièces. Cet événement dé-
couragea l'administration, et même elle renonça entiè-
rement à continuer l'entreprise , quoique l'architecte
François Marie Ricchino se fut offert de diri«er le
transport de deux colonnes , en donnant caution pour
le succès, ainsi que le colonel Pappenheim , qui fit
les mêmes offres , voulant y employer son régiment
composé d'allemands. On avoit,en attendant, élevé une
partie de la façade : les cinq portes et la plupart des
fenêtres étoient presque achevées, mais aussi avoit-
on dépensé près de 5oo,ooo écus pour exécuter un
projet qui devoit rester imparfait. Nous aurons encore
à parler de nouveaux travaux repris et détruits à leur
tour; ce qui doit faire regretter encore plus qu'on
n'ait trouvé aucune notion sur le dessin original. Il
paraît cependant inconccvahle qu'un homme de génie,
chargé de concevoir un monument aussi important ,
ait négligé la partie principale de son ouvrage , la fa-
çade, où il avoit à déployer toute la richesse du goût
qui devoit dominer dans l'édifice. Nous voyous dans
tous les monuments gothiques qni existent en Europe ,
*— er( 2 5 Jtt—*
que c'est dans celte partie que les architectes ont
voulu faire briller les élans d'une vive imagination ,
et le talent qu'ils avoient acquis pour former et diri-
ger des constructions étonnantes par leur hardiesse.
C'est à la porte principale que se font de pompeuses
cérémonies comme les entrées de souverains, c'est elle
que l'on orne pour les cérémonies religieuses qui se
font au dehors ; enfin , c'est sur la façade de toute
espèce d'édifice que le voyageur curieux , que le
peuple lui-même porte ses premiers regards ; peut-on
donc penser d'après cela que l'architecte ne s'en soit
pas occupé dans le dessin primitif ? Il faut croire
que son projet se sera perdu long-temps avant qu'on
eût songé à s'en occuper , puisque aucun des an-
ciens écrivains n'en a parlé. On restoit incertain sur
Je parti qu'il conviendrait de prendre , lorsque l'architecte
Charles Buzzi présenta, en 1646, deux nouveaux dessins,
qui avoient plus de concordance avec le reste de la con-
struction, que tout ce qui avoit été imaginé jusqu'alors.
Il adopta le style gothique en conservant cependant les
cinq portes ainsi que les fenêtres de Pellégrini , soit à
cause de leur beauté, soit que cela lui fut prescrit pour
diminuer la dépense. En même temps l'architecte François
Caslelli donna un autre dessin daus le même style , sur-
chargé d'ornemens et conservant de même les fenêtres
et les portes de Pellégrini, dont la plus part éloient
déjà construites , comme nous avons remarqué.
Cette concurrence produisit de vifs débats qui furent
imprimés et publiés, ainsi que les dessins. L'administration
crut devoir consulter, à ce sujet, plusieurs artistes et
connoisseurs distingués, qui demeuroient à Milan et dans
différentes autres villes de l'Italie , et leurs opiuious furent
également imprimées (t). Mais quoique le projet de Ca-
stelli eût beaucoup de partisans, celui de Buzzi, obtint, avec
raison, la préférence, et fut adopté après qu'on eût
exigé de lui la suppression de quelques ornements
dont la richesse, dit-on, devoit occasionner de trop
grandes dépenses. On construisit encore une fois un
grand modèle en bois, qui, en 1649, servit d'arc
triomphal à l'entrée dans Milan de la princesse Ma-
rianne , fille de l'empereur Ferdinand III, allant en
Espagne , pour épouser le roi Philippe IV.
Le temps passé en discussions et en décisions main-
tenues et ensuite révoquées (2) , priva l'architecte
Buzzi de la gloire de diriger l'exécution de son projet.
Ce ne fut qu'après sa mort, arrivée en i658, qu'on
éleva les deux pilastres doubles latéraux de la porte
principale , auxquels cependant le peintre et architecte
Jean Christophe Stohrer fut chargé de faire encore
quelques modifications dans les ornemens. C'est donc
ce projet que nous voyous exécuté eu grande partie ,
et qui forme la base de la façade actuelle.
(1) Ce recueil intéressant, que nous avons sous les yeux , est intitulé,
Sulla facciata del Duomo di Milano; petit in-folio.
Parmi les artistes qui remirent leurs opinions par écrit , on distingue
l'architecte François Marie Ricchino , lequel ne se borna point a ana-
liser les dessins de Buzzi et de Castclli , mais il y ajouta un projet de
sa composition qui fut de même gravé , et qui se trouve réuni aux préce-
dens , dans 1' ouvrage que nous venons d'indiquer. Il est surprenant
qu'aucun des modernes écrivains n'ait parlé de ce dessin , qui n'est
pas sans mérite. Comme une notion plus détaillée de ces projets peut
intéresser nos lecteurs nous leur en donnerons la description , lors'quc
nous parlerons de la façade achevée de nos jours.
(2) Une lettre anonyme, en date du 2; Juillet i655 , adressée aux
administrateurs de cette fabrique , leur représenta que , puisque tant
de projets avoient été commencés et détruits peu après à grands frais ,
on conseilloit de s'occuper de préférence à faire achever les flancs
et les voûtes de l'édifice , en laissant à d'autres , dans le siècle
suivant la construction de la façade.
Les travaux continuèrent à celte époque, mais avec
lenteur; on s'occupa successivement des nouvelles arcades,
en faisant leurs voûtes, et on détruisit, vers l'an i685,
l'ancienne façade, dont les marbres furent employés à
former une partie du pavé de l'église. Mais pour ter-
miner ce grand ouvrage , il ne suffisoit pas d'y ap-
porter du zèle, et d'en confier les soins à d'habiles
architectes , il falloit aussi des sommes qui manquoient
à l'administration, puisqu'on en avoit tant dépensé dans
les projets antérieurs. Les ressources devenoieut jour-
nellement pins rares, par ce qu'un sentiment d'humanité
avoit tourné d'un autre côté les sources, qui dans l'o-
rigine avoient été toutes dirigées au profit de cette im-
mense construction. Un vaste hôpital avoit été crée ,
en i456, par François Sforza duc de Milan et par
Blanche Marie son épouse ; de nombreuses donations
l'enrichirent, et les milanais regardèrent depuis comme
un devoir religieux de léguer une partie, ou même la
totalité de leurs biens à cet établissement; et on vit ra-
rement faire des donations pour la fabrique de l'église.
Il n'est donc pas étonnant que les travaux fussent pour-
suivis avec une extrême lenteur , car il ne restoit plus
qu'un sentiment d'amour propre en faveur de ce mo-
nument, mais sentiment slénle , car il se bornoit à
admirer ce qui étoit fait, et à se plaindre de ce qu'on
laissoit imparfait ce grand oeuvre, sans que personne
songeât à lui créer des ressources. Ou fit cependant élever
vers la fin du siècle, les bases des autres pilastres ornées
de leurs bas-reliefs, et on continua à finir quelqu'au-
tres parties de l'édifice , mais avec une inactivité qui
annonçoit la pénurie des moyens.
Le projet de Buzzi qu'on avoit adopté , et l'opinion
6
<— «( 2 8 js— >■
des architectes du XVIII siècle , qui réprouvoient la
réunion du style romaiu avec le gothique , engagèrent
L'administration à ordonner en 1790, la démolition de
la partie de la façade qu'on avoit élevée d'après le
dessin de Pellegrini , duquel on ne conserva que les
portes et les fenêtres, sauf les variations introduites par
Richini, et on sacrifia ainsi au bon goût, les dépenses
considérables qu'on avoit déjà faites pour cet objet.
On a conservé la mémoire de cette résolution par l'in-
scription suivante , placée au pilier latéral de la façade ,
vers le Palais Royal.
TEMPLI . FRONTEM
GRAECO . OPERE . INCOHATAM
GOTHICO
AD . MOLIS . VNIVERSAE
CONSENSVM
•IKSTAVRANDAM . PERF1CIENDAM
OSTIORVM . LVIWINVM
ANTEPAGMENTIS
OB . ARTIFICII . Er.EGANTIAM
1NTACTIS
XX . VIRI . AF.DIFICATIOM
PROCVRANDAE . DECREVERVNT
ANNO . IHDCCLXXXX
Tel était l'état des choses , telle était la direction
impuissante de l'opinion publique , lorsque des évé-
nemens imprévus , quoiqu'ils ne fussent pas nouveaux
dans notre histoire, soumirent le Milanais à la domi-
nation des Français. Napoléon Bonaparte , qui régna
depuis, voulut qu'on achevât ce vaste édifice le plus
*—*( 2 f) )»— ►
promptcment possible. Il assigua à cet effet par son dé-
cret du 8 Juin i8o5, cinq millions de livres milanaises
provenant des biens des corporations religieuses sup-
primées , et il ordouna en même teins la vente des
biens appartenant à la Cathédrale (i).
11 ne fut pas difficile d'obéir à un tel ordre , il ne
restait qu'à indiquer les ressources pécuniaires , les ar-
tistes étaient là , et n'avaient pas attendu pour se for-
mer à de grandes et nobles entreprises ; leur génie
était mûr quand Bonaparte commanda. C'est pourtant
le seul nom de ceux qui ordonnent que nous trans-
mettent les marbres et les bronzes, taudis qu'il faut
des recherches infinies , et trop souvent infructueuses
pour découvrir le nom des hommes de génie qui ont
conçu , proposé , exécuté. On retrouve eu Egypte
ceux des Psâmmés, qui tirent élever les fameuses
pyramides ; en parlant des murs superbes de Babylone ,
on nomme Sémiramis , et nous ignorons encore quels
ont été les architectes de ces merveilles du monde.
Nous plus fidèles historiens, nous placerons à côté
des hommes qui ont ordonné , les savans et les ar-
(i) On apprécie le produit de la vente des biens de
la fabrique à i,489j98o,,oo.
Le gouvernement paya à l'administration de la fabri-
que à compte des cinq millions de livres milanaises. . 2,000,000,, 00.
Francs 5;489,98o,,oo.
Moyennant cette somme on soutint les dépenses , de
l'an 1806 au i8i3 savoir.
Pour achever la façade, et la partie supérieure des (lancs. 3,097,op,3,,20.
Pour réparations à l'édifice 55,goo,,7g.
Dépenses relatives au culte 992, 760, ,2g.
Francs 3, 445, 754, ,28.
tisles, dont les travaux n'honorent pas moins les siècles
passés et le nôtre , que la puissance qui les leur com-
manda; c'est pour cela que nous nous sommes fait une
loi de donner ici, autant que possible, les noms des
architectes et des sculpteurs qui ont été employés à
la Cathédrale de Milan, et de les rappeler dans une
espèce de biographie, à la fin de cet ouvrage.
La ville de Milan possédoit en ce moment tout ce
qui pouvoit assurer le succès d'une entreprise tant de
fois tentée. L'académie des beaux arts , fondée au
palais de Brera , comme nous l'avons déjà dit , par
l'impératrice Marie Thérèse, et encouragée par ses
successeurs , réunissoit toutes les bonnes écoles de
dessin, et le nombre de ses professeurs, dislingues en
chaque genre, avait augmenté le foyer des lumiè-
res qui vivifie, et qui produit de grandes inspira-
tions. Uu autre établissement, plus moderne, avoit été
formé, dont le but est, de rapprocher les élémeus des
sciences pour n'en former qu'un seul faisceau , et lui
donner par le contact et la communication plus de force
et d'intensité ; nous voulons parler de l'Institut , où
enfin les savaus et les artistes apprirent qu'ils éloient
tous égaux , puisque c'étoit au même flambeau que
leur génie s'allumoit, et qu'ils éloient destiués tous
également à conserver celle lumière sacrée , si utile
aux hommes. Riches de tels moyens étoil-il difficile
que les ordres de Napoléon se réalisassent? mais le
vrai point de difficulté , et nous avons déjà vu quels
coùleux efforts on avoit employé pour le résoudre ,
étoit d'adopicr un dessin convenable , et cette fois encore
Je souverain ordonna qu'on s'en procurât de nouveaux ,
en conservant toutefois ce qui avoit été bàli et qui
put être en analogie avec le reste de l'édifice. Cette
indécision pendant plusieurs siècles prouve combien
il paraissoit difficile d'atteindre le but d'uue manière
si satisfaisante que l'on n'y pût trouver à censurer,
et combien nous devons être indulgens sur les fautes
qu'on a pu commettre au milieu de tant de précau-
tions prises.
Nous avons parlé précédemment de la retraite de
l'architecte Antolihi; il fut remplacé par Leopold Pol-
lack en 1783, qui s'occupa aussi d'un projet de
la façade en 1787. Sa mort, arrivée en 1806, lui fit
donner pour successeur l'abbé Zanoja, arcbitecle et se-
crétaire de l'académie des beaux arts ; mais il ne
conserva cette place que pendant deux mois , et
avant donné sa démission , il resta avec le titre d'ar-
cbilecie honoraire. Les fonctions actives qu'il avait
à remplir furent confiées le 19 août 1806 à son suc-
cesseur M. Charles Amati , architecte et membre de
l'académie.
Nous voici revenus à un nouveau concours pour cette
façade. A présent nous ne voyons plus un Frédéric
Borromée promettant un prix à celui qui aura donné
le meilleur dessin , et ne lui prescrivant autre chose
que la perfection, soumise au jugement des intelligens.
Au contraire, on dit expressément aux modernes ar-
tistes , vous conserverez ce qui est fait et vous vous
accommoderez avec votre bon goût pour ne pas outre-
passer telle dépense. Nous devons par conséquent
prévoir avec quelle contrainte les artistes vont tracer
leurs esquisses ; nous devons sentir aussi combien les
académiciens qui vont juger,, en s'exposanl à être jugés
eux-mêmes par le public, se trouveront gênés dans leurs
<— ssf 3 2 )&- »
opinions. La question, agitée tant de fois, restait encore
la même. Comment conlinuera-t-on la façade? la détruira-
t-on? Les artistes et les amateurs n'avaient la dessus qu'un
avis , et c'était avec peine qu'ils voyaient décider la
question en sacrifiant les principes des arts et le bon
goût à des vues économiques (i). Que ceci serve donc
à justifier nos artistes contemporains. Quand on donne au
génie de pareilles entraves, inutilement voudrat-il s'élever,
quelques efforts qu'il puisse faire, contre la résistance
qu'on lui a opposée. Ce fut donc en vain que MM. Za-
noja, Amati et l'ingénieux auteur de l'arc du Simplou,
le marquis Cagnola , exercèrent leurs lalens pour satis-
faire au décret, en proposant de nouveaux dessins qui
furent unis , à ceux de Buzzi, de Soave , et de Pollack
et présentés à la commission d'architecture de l'Aca-
démie Royale des beaux arts (2). Les archives de l'aca-
démie conservent de savantes dissertations du marquis
Cagnola , qui avait laissé de côté les prescriptions d'or-
dre , pour ne penser et ne parler qu'en artiste. C'est
(1) Voici ce qui fut communiqué à l'administration (traduit littérale-
ment du texte italien). « Le Ministre pour le Culte annonce à l'admi-
nistration de la fabrique de la Cathédrale , que S. M. l'empereur a
décidé dans sa séance du 20 mai ce qui suit. » « Le ministre pour le
Culte fera vérifier quelle dépense exigeroit l'achèvement de la Cathé-
drale de Milan , suivant le dessin actuel , et il fera exécuter , d'ac-
cord avec les administrateurs , un nouveau dessin pour terminer la
façade. Il aura soin que la dépense se réduise à la moindre somme
possible , et qu'elle n'excède pas la moitié de ce que coûterait l'exécu-
tion de l'ancien dessin. Milan ce 20 mai i8o5.
Signé Bovara. »
(2) Les membres de cette commission furent , M. M Joconde Al-
bertoli , Louis Canonica , Paul Landriani , Joseph Lcvati , Raphaël
Albertoli , Joseph Zanoja , et Charles Amati. Ces deux derniers , fu-
rent autorisés par le Ministre du Culte à assister à toutes les séances ,
quoique auteurs de projets.
<— «( 33 )a-»
une espèce de protestation du génie contre la violence
qu'on lui fait. On ne pouvait attendre moins également
du savant comte Slratico , secrétaire de l'Institut, qui
a écrit aussi sur la quesliou.
L'architecte Amali en sa qualité de membre de la
commission ayant analysé les iuconvénieus qu'il avait
trouvé dans le dessin de Pollack , et calculé que l'exé-
cution de celui de Soave, entraînerait des dépenses
trop considérables d'après Tes limites prescrites, s'ex-
prima ainsi dans son rapport , remis à l'administration
de la fabrique le 29 décembre 1806, en parlant de
son propre dessin. »
« Étant obligé nécessairement de conserver les par-
tics en style romain , déjà fabriquées , on y a ajouté la
fenêtre, dite des Homélies, du même style. Mais on
en présente deux esquisses de diverses formes , l'une
plus basse , dans le cas ou l' on voudrait laisser su-
périeurement un champ plus vaste , 1' autre plus haute,
et peut-être mieux proportionnée , si l'on croit qu'il
suffise d'écrire le nom du Pontife réguant sur la frise.
Les fenêtres .supérieures à celle-ci et aux latérales, sont
en style gothique ; d'abord parce que leur forme s'ac-
cordera mieux avec celle des voûtes intérieures en
ogive, ensuite parce qu'elles conduisent graduellement
l'oeil du spectateur au passage du genre romain au
gothique. La nécessité où l'on s'est trouvé d'indiquer
sur cette façade la construction supérieure de l'église,
a donné lieu à l'introduction de galeries à chaque ordre ,
ce qui doit produire un effet agréable au moyen des
ombres qu'elles portent, et en faisant voir des commu-
nications pratiquées dans toutes les parties de l'édifice,
ce qui a été constamment observé dans les plus belles
façades des temples gothiques. »
La commission dans sa dernière séance du 1 4 jan-
vier i8u7 délibéra définitivement sur les objets les
plus délicats soumis à ses discussions, et en reuvoyaut an
ministre les dessins avec le résultat de ses délibéra-
tions , elle recommanda qu'on prit soin que tout ce
qui regardait la décoration, fût, le plus possible, conforme
à ce qui avait déjà été fait dans des tems où l'art
offrait de bons modèles. Elle fit observer en outre ,
que quoiqu'une partie des opinions- émises s'attacbàt
exactement au caractère général de la fabrique , ou
devait cependant regarder celles qui s'eu écartaient,
comme arrachées par force, en raison de la lui impo-
sée de conserver la riche décoration romaine, attendu
qu'on devait regarder comme impossible de terminer
ce grand édifice dans toute sa perfection , si on ne dé-
truisait pas cette décoration disparate. Enfin elle per-
sista à dire que , si on voulait se résoudre à en sa-
crifier une partie, en ne couservaut que les cinq por-
tes construites, on pourrait rendre cette façade d'un
goût infiniment meilleur, en plaçant au dessus de
chacune des portes une grande fenêtre gothique , d'un
style conforme à celles de tout le temple (i).
Le ministre en envoyant à l'administration de la fa-
brique les décisions de l'académie des arts et les dessins,
y joignit une lettre, dont voici la traduction littérale.
« Ayant soumis à l'examen de la commission d'archi-
,'i) RI. Amati architecte de la fabrique ayant saisi celte opinion si
juste , a fait construire , eu élevant la façade , au dessus des cinq fe-
nêtres de style romain , autant d'arcs en granit , de manière à pré-
parer à d'autres siècles la facilite' de revenir à un projet si conforme
au bon goût et de l'exécuter sans endommager les tra\au\ , du "enre
gothique , supérieurs.
tccture de l'Académie Royale des beaux arls les dessins qui
m'ont été présentés par l'administration avec le rapport
du i.er janvier, la dite commission, après une longue
discussion , est restée d'accord, à la presqu' unanimité,
sur l'opinion dont je remets la copie, touchant les mo-
difications nécessaires et convenables pour combiner, le
mieux qu'il sera possible , la réunion du genre romain
avec le gohique dans la façade, et avec l'ensemble de ce
majestueux édifice. »
« Après avoir vu que MM. les architectes Zanoja et
Amati, ont eux-mème adhéré en grande partie à ces
modifications , comme le démontre leurs votes déposés
dans les actes de l'Académie, je pense qu'on ne doit
pas s'en écarter , et qu'abandonnant le dessin de Pol-
lack , on retiendra pour base celui qui a été présenté
depuis, en lui faisant les réformes d'après les sages ob-
servations de la commission de l'Académie, à laquelle
il sera de nouveau préseuté avec les changemens, pour
qu'elle le reconnaisse et le fasse signer par le professeur
secrétaire de l'Académie, afin qu'il puisse ensuite servir
de règle invariable ; d'après laquelle on procédera rigou-
reusement à l'achèvement de la façade, comme je
l'ordonne par la présente. »
« L'architecte M. Amati sera chargé défaire ce nouveau
dessin, de concert avec l'architecte honoraire M. Zanoja ,
qui le signera avec M. Amati. Cependant l'administra-
tion de la fabrique aura soin que d'après les bases de
la construction, selon le dessin qui lui est renvoyé, on
mette en la plus grande activité tous les travaux ap-
partenant à des parties qui ne sont sujettes à aucune
modification , ce qui aura lieu sur la décision de l'ar-
chitecte de la fabrique. » Signé Bovara.
7
«-er( 36 )s-*
Oa ne différa pas en effet à exécuter des ordres ,
qui allaient remplir les voeux des habitans de la Lom-
bardie, pour l'achèvement de la Cathédrale. M. Amati
fit élever un échafaudage très-ingénieux , tant pour
la commodité des travaux, que par sa solidité , étaut
destiné à recevoir d'immenses fardeaux en marbre, et
toute autre espèce de matériaux. L'architecte Pollak
avoit déjà préparé un dessin pour cette charpente , mais
ayant été surpris par la mort, ce dessin , non exécuté,
resta entre les mains de son fils.
Nous avons fait graver, pour satisfaire les artistes qui
mettent à ces sortes de travaux de l'intérêt, les deux
planches n." LXV et LXVI, d'après les originaux qui
servirent pour la construction et qui donnent une idée
exacte de ces échafaudages. Nous citons d'autant plus
volontiers ce genre de construction, dont il ne reste
plus de traces , lorsque sou utilité à cessé , que l'Italie
offre des modèles que l'on trouve rarement chez les
autres nations. Là ce sont des charpentes immenses ,
des espèces de forêts très-coûteuses d'arbres cquar-
ris qu'on croirait devoir subsister pendaut des siè-
cles ; elles sont surchargées de machines, de grues,
de cabestans , d'échelles , d'escaliers. Chez nous ces
échafaudages sont légers: de hauts sapins en font les
montans, des ponts, dont la longueur et l'apparente fai-
blesse fait frémir de crainte les spectateurs, s'élcvent
en très-peu de tems et à des hauteurs considérables ,
de longues échelles , plantées perpendiculairement ser-
vent à des ouvriers toujours en mouvement depuis le pied
jusqu'à la cime, et nous voyons souvent des voyageurs
étrangers dans un étonnement singulier en examinant
avec quelle adresse ou fait monter d'énormes blocs de
<— œ( 5 7 )»-»
granit et de marbre , à l'aide seulement de deux pou-
lies moufflées et mises en mouvement avec facilité par
trois ou quatre hommes dans le bas, tandis qu'un seul
dirige , dans le haut , cette masse effrayante quand elle
est à une certaine hauteur : et cependant rien n'est
plus rare ici, que les accidens qu'occasionnent partout
ailleurs de vastes constructions.
La façade fut termiuée en deux années à peu près, et
il ne s'agissait plus que de décider en quel lieu on place-
roit les clochers, en abbattant cette insignifiante tour car-
rée élevée au dessus de la grande nef, qui subsiste enco-
re , et qui n'avait été construite que provisoirement. Ce
fut en juillet 1812 qu'on s'occupa des clochers, en sou-
mettant, comme on avait fait pour la façade , les projets,
au jugement de l'académie, et en s'engageant aussi,
malheureusement, à se lier parla décision qui restrei-
gnait les dépenses. Les architectes Amati et Zanoja
furent chargés par l'administration de proposer des des-
sins. Le professeur Joseph Levali donna aussi une esquis-
se au crayon de l'un des clochers, qui selon lui devait
s'élever sur la voûte qui précède la chapelle de la
Vierge , dite de 1' Jlbero , l'autre du côté opposé.
On distingua le projet du marquis Cagnola , déve-
loppé dans un mémoire qu'il lut à l'académie , et
qu'elle conserve dans ses archives. Il proposait de
bâtir une tour magnifique , isolée , dans le style go-
thique , au milieu de la place appellée Campo Santo,
derrière l'église. Toutes ces idées , quelque satisfai-
santes qu'elles fussent, ayant paru trop dispendieuses,
furent écartées. La commission de l'académie persista,
dans son rapport, à désirer que les clochers fussent
construits selon les dessins indiqués par César Ce-
13— ►
*-«( 38 >
sariano , le commentateur de Viiruve ; niais Amatj
ayant calculé que l'exécution de ce projet, reproduit par
Buzzi, pourrait coûter environ six millions de livres mila-
naises, on vit rpie cette somme excédait de beaucoup
les bornes imposées , et on en rejetla l'idée, pour s'atta-
cber à la proposition d'Amati qui n'eut coûtée que 900,000
livres de Milan. C'était d'élever deux tours plus hautes
que la grande nef, en style gothique , placées sur les
deux sacristies aux flancs de l'église , dont une con-
tiendrait les cloches , et l'autre l'horloge.
Les dessins, approuvés par la commission, furent en-
voyés eu Russie pour la sanction du souverain, mais
ils furent ensevelis au milieu des désastres de cette
campagne • il en existe seulement une copie dans les
porte-feuilles de l'auteur. Celui-ci s'occupa à faire pla-
cer sur la façade la quantité de statues que l' ou y
voit, mais ayant sollicité ensuite sa démission d'archi-
tecte de la fabrique , il fut remplacé en 181 3, par l'ingé-
nieur architecte M. Pierre Pestagalli, qui continue avec
beaucoup de zèle à diriger les travaux qui restent
encore à faire.
Les fonds ayant manqué à cause de l'aliéuation des
biens appartenant autrefois à la fabrique à titre de
domaines , S. M. l'Empereur François I à assigné cha-
que année uue somme de 100,000 francs, dont la moi-
tié doit être employée aux fraix du culte, et pour les
réparations de l'édifice , et l'autre pour la continuation
des travaux, qui sont maintenant exécutés avec acti-
vité , avec goût et intelligence.
Nous venons d'entretenir nos lecteurs de l'histoire
d'un édifice sacré , gothique , dont la construction ,
qui n'est pas même entièrement achevée , a déjà duré
<-«( 3g )s»->
cinq siècles ; et c'est le seul dans le monde qui soit à
citer dans pareil cas. Cela nous donne lieu, pour faire
valoir son mérite , de faire une remarque , avant de
nous occuper des détails des parties qui le composent.
Etablissons d'abord deux vérités de fait, appliquées à
tous les autres monumcns connus , de ce genre. La
plupart se font admirer par un bel ensemble régulier
qui plaît : d'autres nous offrent au contraire un mé-
lange bizarre de différens genres d'arcbitcclure et d'or-
nemens. C'est que les premiers ont été commencés
et achevés, par une ardente ferveur de piété , dans
le siècle où ils furent fondés ; ainsi cette unité de goût
qui les distingue , n'a rien de surprenant. Les seconds
ayant été édifiés moins promptemcnt , ont été assu-
jetds , comme notre façade , à des idées qui furent
influencées par le plus ou moins de dépravation qui
a régné dans les arts à certaines époques.
Ici, faisant donc abstraction de la façade, qui par
la réunion de deux styles choque l'homme de goût,
on voit une unité parfaite dans toute la construction
tant extérieure qu'intérieure (i). N'est-ce pas une chose
étonnante qu'elle ait été si fidèlement conservée pen-
dant tant de siècles , malgré le changement successif
d'administrateurs présidant aux travaux , de Princes et
d'Evêques ayant le droit d'ordonner selon leur goût,
leurs connaissances en matière d'art, ou selon leurs
(i) Nous n'y comprenons pas les chapelles qui dans tous les e'diflces
gothiques sont des hôrs-d'oeuvre qu'on a appliqués aux murs ; qu'on
a places , déplacés , sans rien ajouter ni ôter à la construction , à leur
style , excepté quand on la dépare , assez monstrueusement , en atta-
chant ces chapelles à des piliers isolés d'une helle nef.
caprices; malgré que la construction ait été confiée
à tant d'architectes , que l'on ne peut supposer rai-
sonnablement pourvus également du même talent et
sans doute tous également persuadés que leurs idées
devaient être supérieures à celles de leurs com-
pétiteurs, comme nous en avons la preuve dans ce
qu'a fait Pellegrini. Aujourd'hui encore dans la partie
supérieure , tout s'y exécute par nos artistes comme
le firent ceux du XIV siècle, à cette seule différence
près, que les ornemens sont plus élégaus et leur exé-
cution plus soignée, et que le goût grec se fait re-
marquer dans la perfection des statues dont on con-
tinue d'orner ce temple.
DESCRIPTION DE LA FAÇADE.
(Pi m, lxiij.
On ne sauroit se défendre d'un mouvement de
surprise à la vue de celte quantité de statues, de bas
reliefs sagement distribués , d'ornemens pleins de grâ-
ces, soit du style romain, soit du gothique, et des
caprices qui appartiennent à ce dernier genre. La
façade de la Cathédrale de Milan peut être regardée
comme un musée de sculpture , où le connaisseur suit
les progrès successifs de l'art , pardonnant volontiers à
quelques bizarreries , ou à des défauts de perfection ,
en faveur des excellents ouvrages qu'il peut y admirer.
Il faut, pour jouir de l'ensemble de ce monument,
s'en éloigner jusqu'aux maisons qui sont au fond de
la place. L'œil peut alors embrasser sous un seul point
de vue tout l'édifice, et observer les parties supé-
rieures, qui vues de plus près, se présentent dans
un raccourci désagréable (i).
(i) Il paraîtra sans doute étonnant que des auteurs modernes ayent
commis des erreurs , en donnant la description d'un édifice , qu'ils ont
jugé de telle importance à être cité dans des ouvrages , d'ailleurs si
estimables par les préceptes, par les exemples , par la critique , que l'o-
pinion publique les a déjà placés avec justice parmi les ouvrages clas-
siques sur les arts. Nous ne parlerons que de l'excellent recueil inti-
tulé Parallèles d'architecture de M. Durand , du livre Le Génie de
l'architecture par M. Coussin , et de l'autre faisant époque dans
ce siècle , l'Histoire de l'art de M. Dagincourt , qui doit servir de
guide et de lumières aux artistes et aux amateurs. Mais pourquoi ces
savans écrivains , qui font autorité , ne se sont-ils pas adressés à des
correspondans éclairés et fidèles , pour avoir des dessins exacts de notre
Cathédrale et de ses détails ? Mous n'avons vu dans ces ouvrages que
*-e( 42 )»-*
Il n'est personne qui ne soit fâché de voir ce monu-
ment , si majestueux , précédé par une place trop étroite,
et qui ne correspond pas à sa magnificence. Ses fon-
dateurs , et les hommes de géuie qui en ont crée les
dessins, eussent dû en même-tems fixer l'étendue de la
place , et déterminer , d'après les règles de l'art , et de
l'optique , les distances d'où l'œil pourrait apperçevoir
aisément toutes ses dimensions. 11 importait autant de
l'environner de constructions régulières , symétriques ,
qui concordassent, avec cette belle masse, sans lui rien
disputer en richesse. C'est en effet un coup d'œil
désagréable que ce massif de maisons d'un côté et de
portiques de l'autre. Du fond de cette place, qui est
le vrai point de distance du spectateur , on voit que
ces massifs cachent les angles de la façade, et dans
cette situation , on sent le désir de voir disparaître ces
bâtimens , s'élargir cet espace , et que des édifices
analogues à la belle Basilique s'élèvent sur le terrein
débarassé (1).
le projet d'une façade , non exécuté, de Buzzi, et des parties séparées
d'après on ne sait quels dessins , mais qui n'ont aucun rapport avec
ce qui existe. Ceux qui compareront l'objet naturel , les gravures de
ces auteurs , et les nôtres , s'apercevront facilement qu'on devrait
ayant d'écrire s'assurer très soigneusement de l'exactitude de ses ma-
tériaux.
Nous ne citerons pas ici les relations des voyageurs , tels que Millin
et Petit Radel, qui ont cependant été rencontrés sur les lieux , et qu'on
peut à bon droit soupçonner n'avoir rien vu.
(1) Plusieurs historiens assurent qu'à l'endroit de celte place, existait
du tems des romains, un temple dédié à Minerve et un vaste amphithéâ-
tre , qui furent remplacés par l'ancienne Cathédrale et par une église
consacrée à sainte Tliècle. Cette église fut démolie en 1548 à cause
de sa décadence et pour élargir la place devant la Cathédrale , lors de
l'entrée que fit l'empereur Charles V à Milan.
La place doit sou origine à Azzon Visconti , seigneur de Milan en i333 ,
Il n'est pas possible en effet que les choses restent
éternellement dans cet état; le goût dans les arts va
rapidement à son point de perfectibilité ; et des ar-
tistes auquel il est indispensablement nécessaire , il est
passé dans toutes les classes de citoyens , et il ne pourra
plus se perdre, sur tout dans notre Italie, si riche en
beautés de tout genre. Aussi prévoyons nous d'avance
que lors que le gouvernement donnera des ordres pour
aggraudir celte place , et l'orner de nouvelles construc-
tions, les architectes d'alors, éclairés par leurs propres
études , et par la critique qui les aura précédés , ne
s'aviseront pas sûrement de prodiguer dans les bâti-
meus de la place toutes les richesses , et les décora-
tions de l'architecture grecque et romaine , qui se-
raient aussi déplacées qu'elles le sont à la façade de
c'est-à-dire environ 55 ans avant qu'on commençât la construction de
la Cathédrale actuelle. Peu de tems après , Pierre Figino fit bâtir cet
amas de maisons soutenues d'un côte' par un portique , à l'occasion du
mariage du Duc Jean Gale'as avec Isabelle de France. Les arcades
ont conservé la dénomination de Portico de' Figini. Elles étaient con-
struites ainsi que les maisons , dans le style gothique , et les arcs ,
les portes et les fenêtres étaient garnis d'ornemens en terre cuite , tels
qu'on en voit encore à la façade et à la colonnade intérieure du grand
hôpital. Maintenant on a fabriqué de nouveau ces maisons dans le genre
moderne , mais sans goût ni symétrie. Sous les arcades on voit une suite
de boutiques , dont la plupart contiennent des objets de bijouterie ; elles
se font remarquer par leur richesse et leur élégance.
On a enlevé de nos jours l'inscription suivante qui étoit placée dans
le mur , au dessus d'une colonne.
TE DEVM LAVDAMVS
IlANC DOMVM PETRVS POSVIT FIGINVS ,
LAVDE FLORENTIS PATRIAE ,
TVOQVE ANGVIFER DVCTVS GALEAS HONORE
MAXIME PWNCEPS.
8
*~*( 4 4- )&—>
l'église. Ils trouveront dans le style gothique , modifié
avec iinclligence , ce qui constitue la vraie harmonie
dans les < uvrages d'art, c'est à dire l'ordre et la sy-
métrie. Craindraient-ils de hlesser les yeux de leurs con-
temporains , en leur présentant des portiques composés
de johs faisceaux de colonnes légères, couronnées par
des chapiteaux singuliers , mais d'une jolie forme , et
soutenant des arcades eu pointe? Pourquoi donc tout
le monde admire-t-il si souvent les représentations de
ce genre que nos hahiles peintres décorateurs produi-
sent sur nos théâtres. Ce style n'est donc pas si re-
poussant ? Voila sûrement comment raisonneront nos
neveux, si nous ne sommes pas assez heureux pour
voir ce changement.
Le curieux trouvera sans doute , que la façade paraît
trop basse pour sa largeur, parce que les deux lignes
mchuées, qui, représentant un toît, se terminent aux
deux pilastres (i) des angles, établissent la base du
triangle au niveau du frontou de la fenêtre (de styl.
rom.) du milieu, ce qui rapproche trop cette base de
la ligne de terre. La proportion trop courte des fenêtres
gothiques ajoute encore à cet effet. Aussi trouvons
nous que dans celte partie ou à ôté à l'édifice l'air
de grandeur qu'il fallait lui donner (2).
(1) Sur le nu du mur de cette façade sont appliquée six massifs très-
saillans qui s'élèvent jusqu'à la cime. Ou les appelle improprement pi-
lastres, puisqu'ils ne soutiennent aucune des parties supérieures, et
qu'en architecture le pilastre fasse l'office des colonnes. On devrait donc
plutôt regarder ces massifs comme des contreforts destinés à ajouter de
la solidité à l'édifice. Nous nous assujétirons cependant ici à l'usage
adopté jusqu'à ce jour dans le pays , et nous leur conserverons dans
cet ouvrage le nom de PilaUres , pour être entendus de tout le monde.
(2) Ce que nous reprochons ici , n'appartient pas entièrement aux
*-b( 45 )»-*
Les architecles qui ont couru ce dessin nous ob-
jecteraient en vain que la largeur du monument remplit
par son étendue ce qu'on doit en attendre , qui est d'exci-
ter une forte impression dans l'esprit du spectateur. Il
est reconnu que l'idée de la grandeur dans les objets
des arts crées , ou ceux formés par les hommes , inspire
en même teins celle du sublime. Tout ce qui étonne
vivement l'homme , soit en lui procurant du plaisir ( 1 ) ,
soit eu lui faisant éprouver de la douleur, élève ses
pensées au dessus des choses communes. Mais ce prin-
cipe , ne peut être appliqué ici. La cause de cette vive
sensation dont l'imagination est frappée, naît lors que les
architectes modernes. Car on trouve dans le recueil déjà cité, Sulla fac-
ciata , la même observation sur le dessin de Buzzi faite par Giovanelh
Orlandi , et comme il prévoit qu'on pouvait lui objecter qu'une plus
grande élévation aurait dérobé la vue de l'aiguille , placée sur le dôme ,
il a pris la peine d'ajouter à son opinion , imprimée , uue gravure par
laquelle il démontre géométriquement la fausseté de l'objection , en
supposant , à la ve'rité , que le spectateur serait toujours à la distance
convenable , celle que nous avons établie ci-dessus.
(1) « Les objets , les actions sont la source des plaisirs en raison de leur
masse , de leur force , de leur étendue, c'est pour cela que des rochers
immenses et escarpes nous inspirent une sorte d'horreur qui plaît. Nous
voyons avec plaisir les forêts remplies d'arbres dont la cime s'étend jus-
qu'aux nues , Melchior Gioja , Physiologia. » Les grands édifices font
naître des idées du sublime. Nous ferons encore sentir cela par uue com-
paraison fort juste et frappante. N'est-il pas vrai que nous sommes im-
portunés par la chute de quelques tonneaux d'eau qui se sont écoulés pen-
dant un jour de dessus les toits pour retomber avec bruit de la goutière
sur le pavé. N'est-il pas également vrai que nous sommes saisis d'admi-
ration et de plaisir à la vue des belles cascades de la Suisse ? En quoi
consiste donc cette impression si différente? c'est par tout de l'eau,
une chute , et du bruit. La différence consiste en ce que d'un côté c'est
un petit filet d'eau qui tombe , par heure , de la hauteur de 5o à 60
pieds au plus , et de l'autre , une large rivière qui tombe tout en-
tière de la hauteur de 900 pieds. Donc l'idée du sublime dans ce cas
naît , de la masse , de la hauteur et de la puissance.
«-«( 4*5 )&-+■
objets sont tellement placés au dessus de lui, qu'il ne peut
les voir qu'en élevant ses regards avec effort. C'est la dif-
ficulté de porter des matériaux à une très-grande hau-
teur, c'est l'idée qu'on se fait des énormes machines
qu'il a fallu y employer , c'est la pensée effrayante des
dangers auxquels des hommes ont été exposés en por-
tani jusques là , en y plaçant ensuite des blocs immenses ,
c'est enfin l'habileté de l'architecte qui a pu y soute-
nir et y assurer avec tant d'art et de solidité des masses ,
dont la vue même inspire de l'effroi, qui font consi-
dérer ces travaux comme étant au dessus des forces
humaines. Il n'eu est pas de même de l'étendue que
l'homme peut parcourir lui même, en marchant,
sans effort, car alors rien ne lui annonce une puis-
sance presque surnaturelle , et c'est l'effet que produit
la largeur accessible d'un édifice, très-vaste, il n'excite
pas de surprise. Nous admirons froidement une lon-
gue avenue d'arbres , un portique dont nous apper-
cevons la fin dans l'éloignemènt , ou un pont supporté
par vingt arches. Du moment qu'on s'est dit. je vais
atteindre bientôt facilement à l'autre extrémité , l'idée
du sublime s'est dissipée. Ne voyons nous pas en effet
tous les voyageurs ne nous parler avec enthousiasme
que des hautes montagnes, des tours, des clochers et des
coupoles qui s'élèvent dans les airs. Il eut donc fallu
pour completler la magnificence de celle église et en-
trer vraiment daus son style primitif, beaucoup plus
d'élévation à cette façade, «n adoptant sur tout l'angle
aigu pour représenter la toiture. C'est le caractère
qu'ont toutes les belles églises gothiques. Ce temple
aurait acquis plus de majesté s'il était plus élevé au
dessus du sol, et qu'on y moulât par un nombre de
degrés. Quelques-uns prétendent que le terrein a été
exhaussé et qu'il y a des degrés ensevelis: il n'en
reste plus que quatre devant la façade et qui se pro-
longent le lung du flanc à droite de l'édifice.
Malgré que nous soyons, comme ou a vu, absolument
de l'avis de ceux qui regrettent de trouver ici un mélange
du romain et du gothique , nous n'en ferons pas moins
remarquer la beauté des proportions des cinq portes
et des quatre fenêtres au dessus. C'est à Richino que
ce bel effet est dû, car les frontons, beaucoup plus bas,
et les consoles qui soutiennent la corniche, dans le
dessin de Pellcgrini , les privait de cette élégance gran-
diose qui convenait à un temple , et les rendoit plu-
tôt propres à uu palais. Ce que Richino n'a pu ré-
parer, parce que les baies étaient probablement ou-
vertes lorsqu'il proposa les chaugemeus , c'est qu'il n'y a
pas assez d'espace entre les portes et les fenêtres. L'appui
à balustres de celles-ci pose presque sur l'are des fron-
tons des portes. Voila donc déjà un principe qui a du
faire obstacle à la peusée qu'ont eu sans doute les
derniers architectes d'élever davantage cette façade.
Ce n'était pas une heureuse idée que celle de Pelle-
grini de placer des fenêtres sous un porche au dessus
des portes.
La fenêtre du milieu était plus élevée dans le dessin
de Pellegrini, et de mauvais goût. Celle-ci appartient à
Buzzi, nos architectes l'ont seulement abbaissée pour
former le même ordre que les fenêtres latérales. Buzzi
lui donna une ouverture aussi grande que la porte
principale, il y avait de l'effet, mais peut-être de l'exa-
gération. 11 semble que celle que nous voyons pè-
che par le contraire , car à raison de la hauteur et de
la saillie de son balcon elle parait petite, sur tout lorsque
l'oeil s'élève de la porte jusqu'à elle. Les transitions
trop brusques déplaisent en général.
Il y a plus de grâce et de richesse dans le nouveau
dessin ou l'on a interrompu la hauteur des pilastres
par un ornement gothique qui se lie , au dessus des deux
dernières portes, à une jolie galerie. Nous répéterons ce-
pendant encore, que si cet ornement eut été plus élevé,
les pilastres offriraient plus d'élégai ce , car le petit
intervalle qui forme une séparation dans les pilastres
accouplés, ne levé pas l'inconvénient qu'ils ont de
paraître trop larges , étant comparés , à la distance où
nous sommes , avec les deux pilastres simples , qui doi-
vent naturellement avoir l'air plus sveltes. La répétition
de ce même ornement sur les autres pilastres du centre
de la façade, reporté plus haut, les fait pyramider
avec goût, en offrant à l'œil des repos agréahles , qui
ne se trouvaient pas dans les dessins deBuzzi, lequel
avait suivi pour modèle les pilastres de la croisée de
l'église.
On peut s'étonner que les derniers architectes , et la
commission de l'académie , n'ayent pas vu sur le des-
sin lui-même , que les fenêtres de style gothique ont
l'air d'avoir été raccourcies de moitié, pour tenir leur
place où elles sont. Il est impossible de se dissimuler
combien elles s'éloignent du genre qu'on a voulu re-
produire. Celui qui vient de faire en dehors le tour
de l'église, accoutumé à une proportion extrêmement
grande des fenêtres qui éclairent les nefs et le rond-
point , ne peut, en revenant à la façade, se figurer que
celles-ci appartiennent au même édifice. Il doit lui pa-
raître même fort extraordinaire qu'on ait interrompu
Jeur ouverture par trois triangles fort lourds, qui cou-
pent leur largeur à une très-petite distance du bord in-
férieur. On pouvait se dispenser de cet ornement , d'au-
tant plus qu'il u'est ici ni nécessaire ui bien placé, com-
me il l'est aux grandes fenêtres très hautes, parcequ'il
donne de la solidité à ces longues baguettes délicates
qui montent juscm'à la rose. Qu'on coupe ces triangles,
et les fenêtres deviendront dès-lors un peu moins dis-
proportionnées à l'œil. Mais nous avons dit, page 34,
note i , que l'architecte a eu une arrière pensée ; il s'est
transporté en imagination, à quelque siècle en avant,
et il s'est dit , préparons à d'autres ce qu'il m'est dé-
fendu de faire. On détruira un jour ces fenêtres romai-
nes, trop bizarrement placées dans cet éditice , et il n'y
aura plus rien à faire que de prolonger plus bas les
bayes et les baguettes de celles-ci, et leur appui se
trouvera alors à une distance raisounable des fron-
tons de ces portes , que l'on aura peut être bien de la
peine à sacrifier à cause des chefs-oeuvre de la sculp-
ture dont on les a ornées: soumettons-nous, pour l'amour
de l'art, au reproche que l'on fera pendant long- teins à
notre mémoire , à notre bon goût , mais ébauchons ce
que d'autres plus heureux devront achever , et ou ren-
dra par la suite justice à notre intelligente prévoyance.
]N'est-ce pas déjà rapprocber l'artiste de celle époque
que de soumettre cette observation à nos lecteurs, et
n'aurions nous pas à nous glorifier d'avoir ainsi anti-
cipé sur une réparation méritée , dont nos architectes
ne jouissent que par la pensée. Ecartons donc de ces
pages toute idée de censure qui pourrait les affliger ,
qui pourrait faire tort h une académie pleine de lu-
mières , et disons seulement qu'il serait à désirer que ,
<— «( 5 O \a~*
lors qu'il s'agit de mon u mens publics , ceux qui les
ordonnent s'abandonnassent aux hommes éclairés qui
y attacheront leur réputation , sans leur prescrire leurs
volontés, comme le fait l'homme riche qui bàlit, et à
qui personne n'a le droit de reprocher l'exécution de
ses idées capricieuses , quand il répond , c'était moa
goût et ma commodité.
Nous ne serons pas aussi indulgens en parlant de
la rose de la fenêtre gothique du milieu. L'intérieur
de l'église offrait des modèles plus piquaus , sur tout
dans le rond point ; et d'ailleurs nous avons tant de
monumens gothiques en France, en Angleterre, en Al-
lemagne , qui renferment des choses très-riches en ce
genre. Puisque les architectes modernes n'étaient pas
assujettis à une servile et stricte imitation de tout ce
qui avait été fait dans cette église, pourquoi, en in-
novant , n'ont-ils pas cherché ce qui était le mieux ?
La façade exigeait la plus grande richesse dans cette
rose. Ou la voit dans de belles églises gothiques dé-
tachée de la feuêtre, devenue elle même un objet prin-
cipal occuper un grand espace. Celles de Chartres , de
Rheims, par exemple, semblent des soleils radieux, et
sont tellement construites , que de l'intérieur, lorsque le
ciel est serein , on a peine à supporter leur éclat , le-
quel est du plutôt à la forme , à l'agencement symétri-
que et rayonnant de ces jolies ouvertures , variées dans
la forme , qu'à la force de la lumière. Nous ne pou-
vons nous dispenser aussi de trouver d'une lourdeur
assommante ces dais acuminés qui couvrent les figures
de ronde bosse. Us écrasent ces morceaux de sculpture,
sur tout étant d'un volume plus pesant que les cou-
soles qui supportent ces mêmes figures ; ce qui est un
<-«( 5 1 ')»-»
contre-sens. Nous savons qu'on voit les anciens dais,
placés autour de l'église, être de la même forme, sur-
montés d'une large et courte pyramide , dont on a en-
core accablé le contour recliligne par de gros nœuds
saillans, et qu'on a courounés par nu large champi-
gnon, qui semble être refoulé dessus. Buzzi avait eu
quelque sorte sauvé cette choquante composition, en
élevant de petites figures de ronde-bosse sur ces som-
mets. C'était une idée admise dans le style gothique ,
d'environner, de surmonter de grandes figures par d'au-
tres d'une moindre proportion. Mais nous allons encore
répéter, puisque l'on pouvait prendre des licences dans
cette façade, qui en présentait déjà une assez frap-
pante , pourquoi n'a-t-on pas changé la forme de ces
dais pyramidaux en donnant plus de légèreté à leurs
aiguilles.
Nous appliquerons la même observation aux aiguil-
les qui terminent les pilastres : elle est plus sensible
encore dans les gros des angles , à raison de la troi-
sième face latérale, ce qui forme uu groupe lequel sem-
ble lourd à celle hauteur. Si ces aiguilles étaient plus
longues, elles paraitraient filées avec plus de légèreté ,
et elles auraient acquis infiniment plus de grâce. Que
l'on examine celles des arcs rampans , elles sont dans
la même proportion , mais ne surmontant pas des bases
aussi larges , elles sont depuis le pied plus élancées.
L'effet d'opposition exigeait donc beaucoup plus de
hauteur à celles de la façade. On eut du faire les fi-
gures qu'elles soutiennent plus petites, et cela eut été
plus dans l'ordre , car les objets de plus petite dimen-
sion doivent surmonter les plus grandes , et ici au
contraire les figures placées dans des niches , au-des-
9
*-œ( 5 2 ) »-*
sous de ces aiguilles, sont plus petites.' Uue autre raison
pouvait déterminer à diminuer la proportion des statues
au sommet des aiguilles ; c'est qu'au lieu d'élever, elles
reprochent à l'œil le lieu où elles sont placées, puisque
nous jugeons de la distance par la comparaison que
nous faisons naturellement avec nous même en nous
prenant pour module (i).
Examinons maintenant les détails de celte façade ou
nous trouverons des beautés remarquables. Nous ferons
observer qu'en s'approcbant, comme nous allons faire,
jusque sur le parvis ou ne peut pas bien juger les belles
figures de ronde-bosse du premier rang, parce qu'on
les voit trop en dessous. Le curieux qui voudra tout
apprécier avec justesse, devra les examiner les unes
après les autres, en se plaçant à quelque distance du
premier degré , et il sera amplement dédommagé du
tems qu'il y passera en admirant ces belles statues, qui
honorent leurs auteurs et qui les placeront toujours
au rang des meilleurs statuaires (2).
(1) On a peine à croire que de savnns mathématiciens , que des ar-
tistes habiles ayant établi en principe , que des statues placées de di-
stance en distance sur un édifice , les dernières devaient devenir presque
colossales en comparaison des intérieures , pour que l'on put les voir
sous un même angle , et juger pur là de leur grandeur. On a cepen-
dant imprimé des discussions très-savantes sur une pareille erreur.
Quand un écolier sortant du collège , prononcerait sans hésiter que
le couvreur qu'il appercoit sur le toît d'une église ou au haut d'un clo-
cher , est un homme , malgré que l'apparence dans son œil y pei-
gne une petite figure à peu près de la moitié de sa taille.
(a) C'est pourtant après avoir vu ces statues et beaucoup d'autres
qui ornent le contour de cette église , que M. Millin s'est exprimé
ainsi dans son voyage d'Italie ( toin. I , ch. 11 ). « Derrière le chevet de
l'église est ce qu'on appelle YJcadcmie de Sculpture. C'est une suite
de boutiques qui ne méritent pas le nom A' Ateliers , dans lesquels on
a découpé le marbre en rinceaux gothiques , et où on taille des figures
♦_«( 55 )&-+
Nous avons déjà observé qu'on monie quatre de-
grés pour se placer dessus une plate-forme très-lar-
ge , sur laquelle s'élève la façade qui présente la
forme d'un triangle (i) On entre dans l'église par
cinq portes de style romain ; celle du milieu , qui
est la principale , est plus grande que les autres.
Au-dessus des portes il y a autant de fenêtres du
même genre, et pour coiupletter la façade il y a
encore au-dessus des précédentes , une grande fenê-
tre dans le milieu , et deux plus petites aux cô-
tés , et ces dernières sont dans le style gothique Les
six pilastres dont elle est ornée , sont tous de même
forme et offrent la même décoration. Quatre sont
doubles , ce sont les deux des angles , et les deux à
côté de la porte du milieu , les deux autres sout
simples. Tous ces pilastres sout posés sur des pié-
destaux, ornés de dais , de socles, de cimaises, de
qu'on appelle des statues , pour terminer s'il se peut , la décoration de
l'église. » On a repoussé dès que l'ouvrage parut en 1817, dans un
journal , cette épigramme aussi insultante que peu véridique , parce que
beaucoup d'écrivains , pleins d'eux mêmes , ont affecté le même lan-
gage en affichant la même ignorance. Si M. Mill'm au lieu d'occuper
les italiens de ses propres ouvrages , eut bien voulu pénétrer dans les
Ateliers où l'on sculpte les statues pour la Cathédrale , il y eut vu des
rivaux des p'.us habiles sculpteurs dont Paris se glorifie, et il eut su , que
dans ces boutiques derrière le chevet, on travaille seulement les mas-
sifs des ornemens et le pavé de l'église. Mais d'autres avaient déjà relevé
beaucoup d'erreurs , de bévues, dans le voyage du savant académicien ;
( voyez le Spécial, partie nationale , par David Bertolotti.
« II y a un grand malheur dans la plupart des livres , c'est qu'ils
sont moins faits pour le profit de la science et des lecteurs , que pour
la vanité des auteurs » Burlemaqui.
(1) Ces degrés se continuent vers la droite de l'église ; nous sommes
assurés que l'année prochaine ceux du flanc seront enlevés , étant à peu
près inutils à l'édifice. La rue , qui est une des plus fréquentées de
Milan , y gagnera par l'élargissement que cette supression lui procurera.
*-s( 54- )»-»
gorges , de doucines , de cavets , dont la combinaison
n'est assujettie à aucune des règles pratiquées dans
l'architecture ; et sont termines par autant d'aiguilles
pyramidales , d'un travail très riche , ornées de petites
colonnes , de grand nombre de petites statues placées
dans des niches représentant des saints, des évêques ,
des martyrs, etc. ( v. PI. VI) (1). Au-dessus de la
cimaise règne un ornement gothique de bon goût ,
en grand relief, et qui tourne à la même hauteur
sur toute l'église. C'est sur cet ornement, fort saillant,
que posent des cariatides de grandeur presque natu-
relle. Ces figures ue servent pas à supporter le pi-
lastre auquel elles sont appliquées , mais elles sou-
tiennent une espèce de petit pilastre isolé du massif,
qui ne monte pas au de-là du tiers. Nous avons pu
remarquer en examinant tout l'ensemble , que ces
cariatides et leur pelit pilastre étant alligués avec l'or-
nement gothique, portent à faux sur le piédestal, et
produisent un effet désagréable à l'œil , celui de faire
paraître le piédestal plus étroit que le massif qu'il
soutient. Le même défaut est constant à tous les mas-
sifs environnans l'église , et on doit en adresser le repro-
che au premier architecte.
Nous pouvons dire aussi que c'est une singularité
assez remarquable que l'emploi de toutes ces figures
presque nues affaissées sous un poids. Ce genre de dé-
coration ne semble pas convenahle à uu temple chré-
tien. Il n'a rien d'analogue au mystères et aux céré-
monies qu'on y célèbre ; les anciens plus heureux dans
leurs idées ne commettaient pas de semblables fautes ,
(1) Ces aiguilles contèrent 24000 francs chacune, y compris le marbre.
<-«( 55 )*-*
tous les ornemens de leurs temples eu rappelaient la
distillation. Celait des statues de leurs divinités , des
têles de victimes , des patères , des guirlandes , et ils
n'ont placé des figures se courbant sous les portiques
sous des voûles, que dans les monumens élevés à la
victoire.
Les dais des piédestaux sont ornés de bas-reliefs re-
présentant des sujets de l'ancien testament , ou qui fout
allusion à la religion et à la S. V. Leur nombre se
monte à 47 » y compris ceux qui sont placés sur les
pilastres entre les cariatides , et ceux qu'on voit sur
les frontons des portes et des fenêtres.
Sur le nu des pilastres sont placées les figures de
ronde-bosse, soutenues les premières et secondes sui-
de jolies consoles, et les troisièmes dans des niches (i).
Celles du premier ordre représentent les douze Apô-
tres, et six aulres saints, et celles du second et du
troisième , des Prophètes (2).
Il n'est guères possible de juger les dernières à la
hauteur ou elles sont placées, et encore moins toutes
les figures qui sont placées sur les aiguilles , mais nous
pouvons assurer qu'en général toutes les modernes, méri-
teraient d'être vues de près. Nous en avons examiué un
grand nombre , avant qu'elles fussent à leur place , ainsi
que dans les ateliers, et l'homme curieux serait satisfait
(1) Près de 25o statues ornent la façade. Plus de 2000, exécutées à
différentes époques sont placées autour , et dans l'intérieur du temple ,
et on évalue au nombre de 35oo celles , qui formeront le total , lorsque
l'édifice sera achevé.
(2) Douze des plus belles statues au premier ordre, sont soigneuse-
ment représentées dans les planches LV et LYI 3 des cet ouvrage.
«-«( 56 >-
du bon goût et de l'heureuse exécution de la plupart.
Nous ne parlerons pas au loug de ces morceaux , puisque
l'œil ne peut en appercevoir les déiaiis , et nous
nous bornerons à ceux qui se trouvent plus près de
nous.
Nous devons aussi prévenir nos lecteurs que nous
ne l'arrêterons pas à charpie instant pour lui faire ad-
mirer les sculptures d'ornemeus taillés sur les divers
membres <jui pouvaient admettre cette richesse. Les
voyageurs qui ont du être étonnés eu voyant avec
quelle délicatesse nos modernes sculpteurs d'oruement
ont travaillé les chapiteaux, les rosaces de l'arc, non
achevé , dn Simplon , seront persuadés en voyant les ou-
vrages du même genre dans notre façade , que Milan a
toujours eu des artistes distingués et une bonne école.
Nous aurons bientôt occasion de prouver cette vérité
en parlant des portes.
Dans le fronton de la grande fenêtre du milieu ,
est placée l'inscription à grands caractères en bronze
doré :
MARIAE NASCENTI
faisant allusion à la dédicace du temple, faite à la Na-
tivité de la S. V.
Commençant donc notre description et notre exa-
men par le pilastre de l'angle du côté du midi, Ans
le Palais Royal , on voit sur une face l'inscription
placée en 1790, et que nous avons citée à la page 28.
Le premier bas-relief du soubassement représente Tobie
accompagné par un Auge , tirant le poisson , exécuté
par Joseph Ferrandiuo , et l'autre Moïse sauvé des eaux ,
-( 57 >~
par la fille de Pharaon , de Gracieux Rusca. Ce mor-
ceau est agréablement composé , les figures ont de
l'élégance , mais on ne devait pas y représenter un
gros arbre qui ressere le Nil , et donne à ce grand
fleuve l'apparence , d'un petit ruisseau. Les cariatides
et principalement celles du milieu , remarquables par
leur bon style , sont exécutés par Gracieux Rusca et
Donat Carabelli.
Dans les bas-reliefs au-dessus , on voit Joseph se
dérobant à la femme de Putiphar , par Barthélémy Ri-
bossi , et Jacob lultaut avec l'ange, par Carabelli ;
l'exécution en est assez soignée , mais le premier n'a
pas le mouvement qui lui convient , on ne sent pas
dans la disposition du manteau l'effort que fait la femme
pour retenir Joseph , ni dans celui-ci la résistance et
la vitesse de la fuite. La composition du second , man-
que de grâce. Les deux statues au-dessus représentent
l'Apôtre Tadée , par Antoine Pasquali , l'autre s. Bar-
nabe premier Evêque de Milan , par Pierre Possenti.
Elles ne manquent pas de mérite. Du coté du même
pilastre il y a une troisième statue antique d'une exé-
cution maniérée , dont l'auteur est iuconnu.
Revenant a la face de l'édifice pour l'examiner de
la droite a gauche, on voit sur le soubassement du
double pilastre, deux bas-reliefs représentant les deux
hébreux revenant de la terre promise, chargés d'une
grappe de raisins. C'est un des bons ouvrages de Fran-
çois Carabelli. Le second, exécuté par Charles Marie
Giudici, représente Adam et Eve , chassés du Paradis
terrestre. L'artiste n'a pas choisi un beau idéal pour
représenter les premières créatures du genre humain,
car ces figures manquent de grâce et de proportions.
-«— e( 58 Ja— >
Les deux bas-reliefs supérieurs représentent Daniel
dans la fosse aux lions, par Carabelli , et lob sur le
fumier, parGiudici: l'exécution en est assez médiocre-
Ce grand fond nu, et le groupe de la figure avec deux
lions sans caractère rendent la composition pauvre. Ce
Job est une ligure mesquine. Les deux statues sur le
même pilastre représentent les Apôtres S. Barlbélemy
et S. Jacques mineur. La première , d'une compo-
sition beureuse exprimant l'inspiration , est modellée par
Ignace Fumagalli , secrétaire adjoint à l'Académie des
beaux ans , et sculptée par Buzzi Donclli , et la se-
conde exécutée par Buzzi , manque de noblesse de
style.
Un troisième bas-relief est placé à une des côtés du
soubassement du pilastre, représentant Moïse devant le
buisson ardent, de Cbarles Jérôme Marcbesi : nous vou-
drions voir ce morceau remplacer quelques-uns de
ceux qui se présentent sur le devant. Les quatre ca-
riatides furent exécutés par Donat Carabelli et Charles
Marie Giudici.
Wous sommes à présent devant la première porte ,
oruée de trophées et d'élégantes sculptures (i) au-des-
sus de laquelle est placé un beau bas-relief en mar-
bre de Carrare , représentant Esther devant le Roi As-
suérus, exécuté par Charles Biffi , d'après un tableau
de I. B. Crespi dit le Cerano , et qui est conservé dans
la salle des archives de la fabrique. Le fronton circu-
laire de la porte est orné de festons de fruits et dans
(i) Les ornemens de cette porte et des trois autres mojennes furent
exécutés par Charles Minicati et Martin Solari , d'après des dessins
d'André Biffi, Ces portes coûtèrent 26000 francs.
le plafond de la porte d'un groupe d'anges sculpté par
Pierre Lasagui. Cet ouvrage qui honore l'artiste lui
fut payé assez largement ; il reçut pour le prix 4800
liv. de Milan. Ou trouve dans l'épaisseur de la porte,
l'entrée d'un petit escalier qui conduit jusqu'au som-
met de l'édifice.
La fenêtre au dessus , est de style romain et très-
ornée de sculpture. Le bas-relief du fronton , sculpté
avec goût par Charles Marie Giudici, représente Samuel
qui consacre Saûl roi des Hébreux (1).
Le pilastre suivant , qui sépare les deux petites por-
tes , contient sur sa base trois bas-reliefs. Le premier
représente le songe de Jacob. Le style de ce mor-
ceau indique que c'est un des premiers qui soit sorti
du ciseau d'Augelo Pizzi , il était encore timide dans
son exécution. Moïse faisant sortir de l'eau du rocher,
est de Joseph Buzzi. Les figures sont un peu lourdes.
Le troisième représente la tour, dite, de David, al-
légorie de l'origine de la Vierge ( Turris Davidica ,
Litan. de la V.). La médiocrité de toutes ces allé-
gories nous dispensera de nous y arrêter , il suffira
seulement de les indiquer : ou de regretter qu'on ne
(1) La forme des frontons des portes et des fenêtres offrait des dif-
ficultés aux artistes , oblige's d'y représenter des sujets historiques com-
pliqués par le nombre des figures , et assujettis à une proportion qui
ne leur permettait pas de les placer debout, quelque fut l'action qu'elles
devaient exprimer ; on doit admirer avec quelle adresse ils sont par-
venus à surmonter la gêne qui leur etoit imposée, sans altérer la grâce
nécessaire à leurs compositions , et sans tomber dans le bizarre. On
remarque au contraire dans tous ces bas-reliefs des frontons, un très-
bon style , du grandiose , des têtes d'un beau caractère, et du naturel
dans le mouvement des draperies. L'amateur désirerait, après les avoir
examinés , trouver les mêmes qualités dans la plupart des bas-reliefs
des pilastres , où les artistes étaient plus à leur aise.
JO
*-*( 6o )*-►
les ait pas remplacées par des sujets historiques beau-
coup plus intéressans , plus propres à développer le
génie des arts , et qui eussent fait un plus bel orne-
ment.
Le bas-relief, au dessus, excellent ouvrage de Gra-
zioso Rusca (i) représente le prophète EJie ressuscitant
le fils de la Veuve.
H serait sans doute inutile de faire observer la beauté
de la statue de S. Jacques le majeur , placée sur ce
pilastre, eu disant qu'elle est de M. Camille Pacetti.
Mais si la réputation de cet artiste est connue des
amateurs, elle peut n'être pas parvenue à quelques-uns
de nos lecteurs, et de ceux qui ont sous les jeux,
en même tems que nous celte belle figure , dont ils
doivent admirer l'altitude , l'expression noble de la tête ,
et le style large de la draperie qui se rapproche des
beautés de l'antique* Les cariatides sont de Lasagni
( v. PI. VII ).
Deux morceaux curieux qui se trouvent de ce côté,
dans l'ornement gothique placé au dessous de la ci-
maise du dé des pilastres, nous donne lieu de rappe-
ler, ce que uons avons dit, que cet ornement tourne, à
la même hauteur, autour de tout l'édifice. Les petits
arcs dont il se compose sont tous soutenus, à leur
réunion , par des têtes formant consoles. Le nomhre en
est immense dans l'étendue de tout ce monument, et
cependant aucune ne se ressemble. Tous les caractères
(i) Ce nom de Grazioso , que l'estimable sculpteur Rusca reçut sur
les fonds de baptême, a fourni à M, Milliii le sujet d'une be'uve ou d'une
assez stérile plaisanterie en supposant qu'on avait surnommé cet artiste
le Gracieux , transformant pour cela le nom du saint, en une épi-
thète française , qu'on appellerait plutôt un Sobriquet.
<-ss( 6 l )»-*
y ont été épuisés , le sérieux , le burlesque , et le
monstrueux. Mais uous voulons faire remarquer prin-
cipalement , deux de ces têtes sur ces pilastres ; elles
n'offrent pas à la vérité , des formes correctes , ni
très-agréables , mais le travail du ciseau en fait tout le
mérite. Le visage de celle qui est placée à ce pi-
lastre ne s'apperçoit qu'au travers d'un filet de cordes,
lequel semble plutôt appliqué dessus , que taillé avec
le ciseau dans le marbre. L'autre , qui tient au gros
pilastre de l'angle, est couverte d'un voile qui semble
transparent et en laisse distinguer les traits. Ces sortes
d'ouvrages plaisent à tout le monde , et même fixent
davantage les regards que les formes austères du beau
idéal dans une figure. C'est que tout ce qui se pré-
sente comme difficile est plus aisément jugé par tout
le monde; on n'a pas toujours besoin de connaître
les règles de l'art pour apprécier la difficulté vaincue.
On retrouve dans la seconde porte la même ri-
chesse de goût et d'habileté dans les ornemens et les
trophées, qui ont été sculptés par Martin Solaro et
Charles Minicato , d'après les dessins d 'André Biffi.
Les jolies têtes de Chérubins que l'on voit à ces portes
sont toutes du ciseau de Jean Jacques Bono. Le
bas-relief, ouvrage de Vismara, d'après un dessin de
Crespi, représente Judith coupant la tête à Holopherue.
Si la composition est due à un peintre de mérite, le
choix du sculpteur y a répondu. Le groupe d'anges du
plafund est de Jean Dominique Prestinaro , et n'est
pas inférieur à celui de la première porte; il fut payé
de même 4^°° ^v*
Le bas-relief de la fenêtre au dessus représente
Debora donnant des armes au commandant Barac ,
*-«( 6 2 )»->
pour comLaltre Sisara. Il fut exécuté en 1768, et
payé 4>ooo liv. à Joseph Antoine Riccardi sou auteur.
Le troisième pilastre , qui suit , offre sur le côté ,
un bas relief symbolique dont l'auteur est incounu.
On y voit un Platane , allégorie qui se rapporte aussi
à la Vierge ( quasi platanus exaltata , Eccles. ) Au
dessus est le buste d'un éveque de Milan , très sail-
lant en debors. Il est assez difficile de se rendre
compte pourquoi cette tête est surmontée d'une con-
sole destinée à supporter une graude figure de ronde
bosse pareille à celles qui ornent le devant de ces
pilastres. La saillie du fronton de la porte rend la
chose impossible. A-t-on donc formé ces portes long-
tems après avoir élevé les pilastres? ou les pilastres
ont ils été formés depuis , avec la pensée qu'un jour
les ornemens des portes devraient disparoître? Voilà
des réflexions que cette console, hors d'œuvre, pour-
roit faire naître. Ou l'on a abbaltu une figure pour
placer le fronton; ou l'on voulait faire changer cette
ordonnance pour placer une figure; à quoi bon sans
cela laisser la console ?
Ce pilastre est, comme le sont tous les quatre
gros, divisé en deux parties sur la face antérieure.
Le dé est donc orné de deux bas-reliefs qui méri-
tent peu l'attention des curieux. Le premier repré-
sente le puits de Jacob, et le second, la statue de
Dagon renversée dans son temple, devaut l'arche
d'alliance. On attribue ces deux sculptures à Jean-
Pierre Lasagui. Nous sommes certainement fondés à
révoquer en doute celte attribution après avoir ad-
miié le groupe d'anges qu'il a exécuté sous le pla-
fond de la première porte. Il est possible que s'étant
*-œ( 63 )»-*
chargé, par pure spéculation d'intérêt, de ces deux
bas-reliefs, il en ait confié le travail à quelque élève
de son atelier , ce qui aura donné lieu à les lui at-
tribuer. Le mérite de ses autres ouvrages exigeait de
de nous pareille observation. Il suffirait de comparer
son bas-relief au-dessus , représentant Rebecca qui
offre à boire à Eleazar , pour juger que nous lui
rendons justice en détruisant un dicton populaire,
trausmis par des écrivains qui ramassaieut tout sans
être guidés par la critique. C'est assez ordinairement
le défaut qu'on retrouve dans les descriptions, sur-
tout celles des anciennes églises. Le sacrifice d'A-
braham qui est le sujet de l'autre bas-relief, a été
sculpté par Josepb Vismara. Nous n'avons pas fait
de grandes recbercbes pour découvrir le nom du
sculpteur qui a fait le berceau de vigne , symbo-
lique , dit-on , de la Vierge ( Ego quasi viti fruc-
tifîcavi, Eccles. ), qui est placé sur le côté de ce
pilastre. Laissons-le dans son obscurité.
Nous nous arrêtons toujours avec plaisir devant
les grandes statues de ces pilastres. Ici nous admi-
rons le beau caractère de la tête de l'apôtre S. Marc ,
ouvrage de Donato Carabelli. Le S. Mathieu d'Angclo
Pizzi ayant reçu les éloges de Canova , nous n'a-
vons plus rien à en dire.
Le tems que nous eussions perdu à examiner les
bas-reliefs du dé de ce pilastre, employons-le a admi-
rer attentivement les beautés des deux Evangélistes,
après quoi nous fixerons cette même attention sur
les consoles qui soutiennent ces mêmes statues. Elles
sont composées par des groupes variés et très-jolis
d'anges enfans nus, et au travers desquels les artistes
*— œ( (J4 )»-»
ont introduit le symbole de chacun des Évangëlistes.
La tête de lion à S. Marc, le boeuf à S. Luc, l'ange
à S. Mathieu et l'aigle à S. Jean. Ces consoles ont été
sculptées par Charles Marie Giudici, Joseph Buzzi ,
Charles Jérôme Murchesi , Joseph Ferrandino et An-
dré Casareggio.
L'observateur se plaira à examiner la belle pro-
portion de la grande porte du milieu , et dont ce-
pendant nous trouverions l'effet plus grand si on n'y
avait pas ajouté, comme aux quatre petites portes,
des consoles aux angles qui raccourcissent la ligne
à sa partie supérieure. Ornement d'ailleurs assez inu-
tile, puisque la solidité ne l'exigeait pas; d'une idée
trop mesquine, en ce qu'il rappelle ces petites pièces
de bois que l'on donne pour supports au linteau dans
les angles d'une porte aux habitations des gens de la
campagne, d'une grange, d'une écurie, où il s'agit de
contraindre à ne pas se fléchir une traverse de bois.
Mais nous avons pu nous convaincre par divers des-
sins de Pellegriui, qu'il s'écartait quelquefois de la
majestueuse simplicité de l'architecture antique. Ces
portes , et les fenêtres qui sont au-dessus, manquaient,
dans le dessin original de cet architecte, de l'élé-
gance qu'elles ont aujourd'hui. Les frontons étaient
trop bas , trop près de l'ouverture. On a du à Ri-
ghini qui leur a donné plus de développement , plus
de hauteur, en plaçant des bas-reliefs et de belles
consoles qui soutiennent les frontons , ce caractère
grandiose qui convient à la façade d'un aussi grand
et pompeux monument , lorsque la composition de
Pellegriui n'en avait fait que de belles portes et
fenêtres propres à un palais. On ne peut rien voir
*— «( 65 )»-»
de plus beau en fait de travail de sculpture d'or-
nemens que ceux qui ornent les pied-droits de cette
porte. Ces groupes si bien composés de feuillages,
de fruits et d'oiseaux différens, ont été exécutés par
les sculpteurs Jean Jacques Bono et André Castelli
d'après les dessins de François Righini en i655, et
coûtèrent 20,600 liv. Le même goût et la même
délicatesse régnent dans les ornemens qui enrichis-
sent tous les membres de cette porte ( v. PI. VIII ).
Sous le fronton est placé un bas-relief, en marbre
de Carrare représentant la création d'Eve, d'après un
dessin de Crespi , dit le Cerano, qui se conserve
dans les archives de la fabrique (t). C'est un excellent
morceau , sculpté par Gaspar Vismara auquel il fut
payé 33,ooo. Le groupe d'anges sous la porte est du
même sculpteur et il a coûté i5,6oo.
Le bas-relief, dont nous venons de parler, rem-
plaça celui qui était au-dessus de cette porte du
tems de Pellegriui , et que l'on a transporté sur l'au-
tel principal de la petite église derrière, dans le lieu
appelé Cantpo Santo. Celui-ci représente l'Annon-
ciation , et fut le sujet d'une très-vive discussion
entre Pellegriui et Marliu Bassi de Milan, architecte
chargé de plusieurs travaux dans cette église (2),
(1) Jean-Baptiste Crespi fit les dessins peints à clair-obscur des bas-
reliefs , la Création , la reine de Saba , Judith et Holopherne , Sisara
et Ester en 1629. Ces tableaux lui furent payés 36ooo liv. mil.
(2) Che mi si concéda, ch' io sia nato a Milano, non in Toscana,
ch' io sia giovane , e non vecchio ; ch' io sia pih tosto timido che
ardito . . . allevato nelle opère délia fabbrica del Duomo , in tanto
che da cerli anni a d'ietro passarono per le mie mani , corne V. S.
sa , quasi tutte V opère che giornalmenle vi si faceano ....
Lettre sur les Bas-reliejs , etc.
<— B.^ 66 )s»-»
discussion imprimée à Brescia par Francesco et Pier-
Maiia Maiclietti, l'an 1572, ayant pour titre Dis-
parerî in mater ia d Architettura , etc. avec plan-
ches. 11 a donné quatre dessins de ce bas-relief de
l'Annonciation, servant à l'appui de sa Dissertation,
pour prouver que le changement qu'avait ordonné
le Pellegrini dans l'effet perspectif était hors de
sens et contraire à tontes les règles de la perspective,
y ayant introduit deux horizons et des points de
distances différeus de ceux du premier dessin. Son
opinion fut défavorablement accueillie par la com-
mission du Chapitre qui avait entendu ses motifs ,
et la réponse, très-laconique, de Pellegrini se bor-
nant à dire : « J'ai fait cela pareeque je crois que
c'est bien fait. » L'opinion du Bassi fut cependant
appuyée de l'avis de Palladio {Lettre à Bassi le 5
juillet 1570), de celui de Vignola {Lettre au même
du 28 août), par Vasari , etc. et il paraît que des
commissaires plus éclairés (nous n'avons pas trouvé
précisément l'époque) ont jugé différemment des pre-
miers en substituant le bas-relief de Vismara à celui
adopté par Pellegrini', qui est resté avec ses défauts
très-remarquables. Nous verrons encore les deux ar-
chitectes aux prises ensemble.
Sur les flancs des pilastres voisins de la porte, sont
deux bustes d'archevêques, que l'on croit être l'un
S. Barnabas et l'autre S. Ambroise, et au-dessus, deux
belles figures de ronde-bosse de la même proportion
que celles eu face. Elles représentent les Apôtres
Pierre et Paul. On peut, en les comparant avec les
autres, leur reprocher un peu de lourdeur, défaut
qui provient des draperies. On ignore le nom de
«-«( 67 )»-*
leurs auteurs. Leur mérite les a fait transporter ici
du premier lieu qu'elles occupaient sur le côté de
l'église en face de la rue S. Radegonde , il est vrai
que les sujets qu'elles représentent devaient appar-
tenir à la série qu'offrent les autres figures de cette
façade.
On a construit dans le mur de cette porte un
escalier qui conduit à la fenêtre qui est au-dessus .
qu'on appelle des Homélies , probablement parce-
qu'elle servait aux Archevêques, aux prêtres de l'é-
glise à lire des bulles, des intruclions pastorales au
peuple réuni sur la place.
Cette fenêtre, de style romain, d'après les dessins
de M. Charles Amati, a pour soubassement un bal-
con eu marbre à balustres. Sur les deux angles de
cette balustrade s'élèvent deux statues d'une grande
proportion, représentant l'ancien et le nouveau Te-
stament. Elles sont remarquables par la pureté du
style, par la noblesse des attitudes et par le bon goût
des draperies. La première est de Louis Acquisti, la
seconde de Camille Pacetli ( v. pi. IX) (1).
L'inscription latine dans le fronton, Mariae na-
scenti , qui indique la dédicace de celte église à la
naissance de la Yierge , se rapporte à l'ordre qui en
fut donné en i356 par Azon Viscouti , lequel vou-
lut qu'on célébrât dans son duché la nativité de la
Vierge par des cérémonies pompeuses particulières (2).
A la gauche de la grande porte on voit, sur le
(1) Il n'est pas étonnant que la sculpture fasse autant de progrès
dans l'e'cole de Milan sous un professeur aussi éclairé et aussi habile.
(2) Fiamma auteur contemporain d'Azone.
I 1
<~K ( 68 )jB— ►
gros pilastre, un bas-relief allégorique représentant
un arbre que tous les écrivaius ont appelé un cèdre,
en se copiant les uns et les autres. Nous croyons
plus convenable de l'appeller un pommier auquel les
feuilles et le fruit ressemblent parfaitement, tandis
qu'il y aurait eu une ignorance profonde de la part
d'un sculpteur d'avoir prétendu en faire uu cèdre
dont il est si éloigné par ses formes. L'auteur est
inconnu , le travail est assés agréable.
Sur le devaut du pilastre, le premier bas-relief
qui se présente, ne nous fait pas regretter de n'avoir
pas connu le nom de son auteur. Ce tableau qu'on
ne devinerait pas si la tradition n'en indiquait pas
le sujet, lequel est Saùl voulant tuer David, que Mi-
chol sa femme a fait sauver. Les figures sont pitoya-
bles, tout le reste est d'une lourdeur assommante, et
la perspective du plus mauvais goût. On pourrait a.
cet égard rapporter ce morceau au tems , et peut être
à l'un des sculpteurs qui avait travaillé pour l'Annon-
ciation dirigée par Pellegrini. La ligne horizontale
placée trop bautj le point de distance excessivement
rapproché donnent au terrein , sur lequel posent les
groupes, une élévation qui le fait paraître incliné à
l'horizon , défaut que Bassi reprochait à celui de Pel-
legrini. Nous sommes fâchés de trouver dans diverses
descriptions qu'on y attribue à Pierre Lasagni le bas-
relief à côté qui, dit-on, représente la vision de Da-
niel, ce qui a besoin aussi d'une explication. Même
défaut dans la perspective (i), aucune expression dans
(i) Ceux qui observent les raonumens des XIII , XIV et XV siècle,
savent que les sculpteurs prodiguaient , dans les bas-reliefs , des elfets
la figure de Daniel, point de mouvement dans sa pose.
Que font là ces gros animaux qui se groupent avec
lui? Leur disposition «'indique en rien qu'ils sont
une simple vision. De pareils ouvrages u'ont rien
offert à l'ambition, à l'émulation des artistes mo-
dernes qui ont été chargés de continuer ces sculptu-
res. Ou est si facilement supérieur à de tels rivaux!
Nous avons lieu d'être plus contens des deux bas-
reliefs supérieurs, qui sont de Louis Bussola. Le pre-
mier représente le sacrifice du prophète Elie. Dans
le second , uu ange annonce au père de Samson que
sa femme mettra au monde vin enfant robuste. Les
deux figures de ronde bosse représentent l'évangé-
liste S. Luc , l'autre S. Jeau. La première , sculptée
par Grazioso Rusca , offre une belle exécution , on
désirerait seulement que la draperie fut moins tour-
mentée de plis , quoiqu'ils soient d'un bon goût. La
seconde, de Camille Pacetti, est admirable, tant par
de perspective , et se tourmentaient l'esprit beaucoup pour obtenir des
lignes fuyantes , soit horizontalement , soit verticalement. Mais on en
voit très-peu , qui n'offrent pas à un oeil exercé par la connaissance
et l'application des vrais principes de la perspective , des plans biza-
rement agencés et des dégradations choquantes. On doit d'autant plus
être surpris de cela , que des artistes distingués dans la peinture, dans
l'architecture , écrivirent , dès ce teins là , des traités de perspective ,
où les bonnes doctrines sont exposées , si non avec clarié , car on
était alors très-prolixe , au moins avec d'utiles démonstrations ....
Au surplus pourquoi nous étonner de cela , n'avons-nous pas encore
de nos peintres modernes qui ne se doutent pas des premières règles
de la perspective ? nous pourions même en citer dont les noms ont re-
tenti en Europe. Pour en revenir aux bas-reliefs de perspective , nous
citerons comme des modèles à suivre en ce genre ceux du Campo S. Gio-
vanni e Paolo à Venise , et la plupart des bas-reliefs placés autour du
choeur de notre église.
<-ef 7 O )»-►
scs belles proportions, par son altitude noble, que par
Ja beauté de la tête qui a quelque chose de divin.
Sur le flanc du pilastre est encore un bas-relief al-
légorique , et nous serons obligés aussi de copier
nos devanciers, pour dire que l'arbre, est un frêne,
auprès d'uue espèce de croix , comme celle que
Moïse éleva dans le désert , pour placer le serpent
d'airain. Nous dirons, si l'on veut s'en conteuter,
que cette composition fait allusion à la Vierge qui
maudit le serpent, en lui appliquant les paroles de
la GeDèse. Au-dessus est le quatrième buste d'un
Archevêque. Ici se trouve la quatrième porte, sem-
blable aux autres pour la beauté de ses ornemens.
Le bas-relief représente Jaël clouant sur le pavé la
tête de Sisara endormi. L'invention est encore de
Crespi dont on voit le dessin dans les salles des
archives , et il a été sculpté très bien par Lasagni ,
ce qui nous fait douter encore qu'il soit l'auteur
du Daniel, car celui-ci est trop différent aussi du
groupe d'auges sous la porte qui est du même au-
teur (v. PI. X).
Le bas-relief qui orne la fenêtre, au-dessus, est
de Denis Bussola , et représente Elie endormi.
Le pilastre suivant n'a que trois bas-reliefs. Celui
du flanc représente la tour de Babel , ouvrage d'A-
médéc Benincuore. Les lignes perspectives sont mieux
entendues que dans les précédens: mais pour donner
une idée de la hauteur immense de l'édifice prin-
cipal , la maison qui en est près, est beaucoup trop
grande. Le bas-relief du milieu, en face, sculpté par
Grazioso Rusca , représente le triomphe de David
après avoir tué le géant Goliath. C'est à tort qu'un
*-&( a i )»-*
écrivain milanais de nos jours a dit, que le défaut à
remarquer dans cette composition, est que David tient
l'épée de la maiu gauche. Sans doute si l'action le
présentait coupant la tête de son ennemi, ce serait
un défaut impardonnable, et M. Rusca n'y serait sû-
rement pas tombé ; mais ici, David présente la tête
qu'il vieut d'abbaltre, et il est naturel qu'il ait passé
cette épée colossale, sur laquelle il s'appuye , dans la
main gauche , pour relever de la droite le chef du
géant, et l'offrir à la vue des deux armées. Car
enfin , le jeune David n'a pu se servir de cette épée
si lourde (nous nous servons du mot usité chez les
anciens. Gladium , selon le texte de l'Écriture, est
une épée à pointe et à tranchant) qu'en la tenant
des deux mains pour frapper. Avant de taxer d'igno-
rance un artiste , distingué d'ailleurs, il faut examiner
et réfléchir ( v. PI. XI).
Esaù vendant à son frère, son droit d'ainesse pour
un plat de lentilles, est le sujet du bas-relief au-
dessus, qui est de Ribossi. La belle statue de l'a-
pôtre S. André est de Gaétan Monli de Milan (on
le désigne ainsi pour le distinguer de Mouti de Ra-
venne, autre sculpteur, d'un égal mérite, qui habite
aussi dans cette ville, heureuse de la possession des
Monti, car elle compte encore au nombre des habi-
tans qui l'honorent par leur génie, le célèbre poète
du même nom). On voit sur le flanc du pilastre,
près de la dernière porte, Noé qui supplie Dieu de
faire cesser le déluge. Ce bas-relief est de Jérôme
Marchesi d'après un dessiu de Grazioso Rusca.
Le bas-relief placé au-haut de la cinquième porte
est de Gaspard Vismara d'après un dessin du même
<— a( "il )s»-+
Crespi dit Cerano. Il représente la reine de Saba of-
frant des présens à Sale-mou. Cette figure de femme
montre tout plein de grâce dans une attitude contrainte
par le peu de hauteur du bas-relief. Le groupe d'au-
ges du plafond, qui est du même sculpteur, anuonce
beaucoup de talent. Le bas-relief d'Agar dans le de^
sert, qui est de lui aussi , dans le fronton de la fe-
nêtre , confirme encore notre jugement.
Arrivés au dernier pilastre, formant l'angle de l'é-
difice, du côté et eu face du Coperto de Figini, nous
trouvons sur le flauc , près de la porte, sur le dé,
un bas-relief représentant Abel offrant un sacrifice ;
figure trop grêle, peu d'expression dans la pose. Deux
bas-reliefs sur la face antérieure , le premier sujet
est Gédéou se disposant à combattre les Madianites.
L'ange est d'une lourdeur iusuportable, la tête est
sans noblesse , le Gédéou n'est pas d'un meilleur
style, le bras gauche sur-tout est d'un mauvais des-
sin , ces trois morceaux sont, de Charles Marie Giu-
dici, ou peut-être de ses élevés, car ce serait faire
tort à son talent que de les lui donner entièrement. Le
bas-relief Samson terrassant un lion est beaucoup
au-dessus des trois précedens, il y a du mouvement
dans la figure, et plus de correction dans le dessin. Il
est de Joseph Buzzi. Les deux bas-reliefs au-dessus
représentent, le premier, Caiu tuaut son frère Ahcl,
le même style mesquin attribuée à Giudici se fait
appercevoir dans ce morceau. On préférera fixer les
regards sur l'autre qui est de Rusca, il représente
l'incendie de Sodome.
Les deux figures de ronde-bosse sont l'une, S. Phi-
lippe- de Pompée Marchesij l'autre, S. Thomas ;
«-»( 7 3 )ss— »
celle-ci fut laissée ébauchée par Barthelemi Ribossi,
sculpteur de mérite , et elle fut terminée , après sa
mort, par Pompée Marchesi. Dans ces deux statues
cet artiste a montré un graud talent (i).
La partie latérale du pilastre qui fait face à la rue,
est ornée aussi de quatre bas-reliefs, deux grauds
sur le dé, et deux supérieurs plus petits. Le pre-
mier représente Samson chargé des portes de Gaza
qu'il a enlevées. Le morceau est de Joseph Buzzi.
11 n'y a rieu à désirer, selon nous, que plus de ca-
ractère dans la tète. La physionomie est trop jeune.
L'autre bas-relief, de Ribossi, nous offre Absalon
suspendu par les cheveux, et prêt à être percé par
Joab. D'abord le choix du sujtet nous paraît mal fait,
car il était impossible d'en former une composition
heureuse, naturelle, et vraisemblable dans cet espace
si étroit et si peu élevé. Aussi les pieds d' Absalon
touchent presque à terre , quoijue l'artiste, pour le
faire voir suspendu, ait ramassé ses membres d'une
manière bizarre, et cette figure est à peine plus
élevée que le cheval sur lequel est monté Joab. Cet
animal ne rend pas la scène intéressante , car il est
impossible d'en voir un plus mal dessiné. Les deux
bas-reliefs au-dessus, qui sont d'un meilleur style,
(i) Nous engageons les amateurs des arts et les professeurs qui voya-
ient en Italie pour admirer les ouvrages dont elle est si riche j d'aller
à Sarouno, disïant de Milan de 4 lieues. 11 y verra outre les fameuses
peintures à fresque de Bernardino Luini , un superbe bas-relief de
Pompée Marchesi représentant la descente de Croix, où les figures sont
de proportion naturelle. On peut même se procurer la vue du modèle
que conserve l'auteur dans son atelier , et il donnera une idée de ce
que peut être l'exécution soignée en marbre de Carrare de ce magni-
fique tableau de relief.
et du ciseau de Buzzi, représentent, l'un la fuite d'A-
gar, et l'autre Agar engagée par un ange à retourner
dans la maison d'Abraham d'où elle avait fui.
On a pu remarquer que dans tous ces bas-reliefs
on n'a pas choisi une suite de faits historiques qui
eussent de l'analogie avec la Vierge à laquelle cet
édifice a été consacré; tout a été pris au hazard
dans l'Histoire sacrée, et assez souvent peu heureu-
sement pour l'exécution. C'est que les commissions
qui présidaient à ces travaux se sont chargées seu-
les de donner les programmes, et comme il n'arrive
que trop souvent ces programmes mettent des en-
traves à l'imagination des artistes , étouffent leur
génie , et eu dernière analyse déshonore leur talent.
Malheureusement la fortune ne sourit que très-rare-
ment aux artistes, comme aux hommes de lettres,
et sur-tout dans la classe des sculpteurs, parceque
leurs travaux ne conviennent qu'à de grands monu-
mens. Alors le besoin de travailler les force à rece-
voir des lois. Combien il serait à désirer qu'ils fussent
tous dans une telle position à rejetter des programmes
qui bien loin de leur ouvrir des ressources pour de
belles compositions , ne lui présente au contraire que
des sujets ou mesquins, ou bizarres à exécuter.
Les deux figures de ronde-bosse sont les apôtres
Mathieu, par Jacques De Maria de Bologne, artiste
distingue, et Simon, d'Antoine Rusca neveu de Gra-
zioso Rusca. Pizzi en a fourni le modèle. Une troi-
sième statue placée sur le flanc du pilastre ne sou-
tient point la comparaison avec celles que nous
venons de décrire.
«— «( r 5 )»- *
Au-dessous on a mis l'inscription suivante.
ANNO • MDCCXCV
FRONS ■ TEMPLI
JVRE • CONLIGENDAE • STIPIS
EX • INDVLGENTIA • AYG ■ N.
RESTITVTO
AB ■ DEXTERA • PARTE
ELEVARl • ORNARIQVE • COEPTA ■ EST
DECRETO • XX ■ "VIRVM
JOSEPHO • OCT • F • ROVIDA • COM ■ PRAEFECTO
THEODORO • GEORGIO ■ ALEX ■ F
TRIVVLTIO • MARCHIONE ■ CVRATORE
Nous n'avons pas fixé l'attention particulière de nos
lecteurs sur toutes les cariatides qui sont à chaque
pilastre. Toutes ne le méritent pas également. Des fi-
gures lourdes, des têtes ignobles, des poses accadé-
miques ne sont pas des objets attrayans pour un ama-
teur. Mais il en est cependant quelques-unes dignes
d'être remarquées et agréablement groupées. Ces fi-
gures sont attribuées à Jean-Marie Lasagni , à Denis
Bussola, à André Prevosto , à Grazioso Rusca, à Jo-
seph Buzzi, à François et Donat Carabelli, a Charles
Bono et à Charles Marie Giudici. Nous ferons encore
une remarque au sujet de ces figures, c'est qu'elles
ont été presque toutes exécutées par les artistes dans
la pensée fort naturelle sans doute que les cariatides
12
<— «( ^6 )»-»
dans un grand monument doivent avoir des formes co-
lossales , Herculéennes , étaut destinées à soutenir d'im-
menses constructions. Mais ici elles ne sont chargées
que d'une très-légère et très-peu haute partie d'orne-
ment ajouté aux pilastres qui pourrait être détachée
sans altérer en rien ni la solidité ni la masse du pi-
lastre , aussi ces gros muscles , ces memhres renflés
ne' présentent à l'œil qu'un contresens de goût.
Il seroit fort agréable de pouvoir observer sans
le secours d'une bonne Innette les figures de roude-
bosse placées au second rang sur les pilastres du mi-
lieu de la façade ainsi que celles qui sont autour des
fenêtres gothiques. Les deux à côté de la fenêtre du
milieu représentent Moïse et S. Jean-Baptiste , la pre-
mière de Pacetti, la seconde de Joseph Buzzi, les
autres représentent les prophètes, Elie , Jérémie, Da-
vid, Isaie, Ezechiel , Michée , Joël, Osée ; Daniel,
Amos et Zacharie. Elles repoudent pour le style et
pour l'exécution à celles du premier rang dont nous
avons donné les gravures ( v. pi. LV, LVI ) , et sout
tous des mêmes auteurs, Rusca, Marchesi , Acquisti ,
Perabô , J.-B. Rusca , Carabclli , Ftimagalli et Pasqua-
li (i). Une telle magnificence qui se fait admirer par
tous les étrangers malgré quelques imperfections que
nous avons fait remarquer exige encore un complé-
ment essentiel , et nous ne pouvons dire si ce com-
plément aura lieu un jour quoiqu'iudispensable qu'il
soit , on désireroit voir substituer à ces portes de bois
(1) Le David a e'u; attribué par quelques écrivains à Pizzi, il est
d'Acquisti.
presque vermoulus des portes ornées de superbes
bronzes et de bas-reliefs qui attesteraient que nos ar-
tistes ne le cèdent à ceux du XVI siècle , qui ont
produit des chefs-d'œuvres en ce genre, tels que ceux
qui ont immortalisé un Benveouto Celliui.
INTÉRIEUR DE LA CATHÉDRALE,
(v. PI. XII).
Une grande pensée nait dans mou âme lorsque je
lève mes regards pour mesurer la bauteur de cette
voûte soutenue par deux rangs de piliers dont la le-
gerté semble devoir plutôt lui servir d'ornement, tant
ils s'élancent avec grâce et hardiesse. La tinte un peu
sombre qui domine dans ce temple et qui n'est inter-
rompue que par le nuage argenté qu'y porte la fumée
du parfum qu'on brûle devant l'autel , ajoute encore à
l'incertitude sur l'élévation de la grande nef. On dé-
truirait ce charme si l'on substituait aux vitraux co-
lorés des cristaux blaucs qui laisseraient le passage à
d'immenses faiseaux de lumière. Que l'homme est
petit dans le temple de l'Etemel. Voilà ce que je
sens. Le ministre des autels, couvert de la pourpre,
le souverain, décoré de tous les ordres qui s'humilie
devant le simbole de la divinité, le cortège nombreux
de ses courtisans qui l'oublient pour abaisser leur front
en présence de celui qui domine sur toutes les puis-
sances- ces beautés si superbes parées de toutes les
gra- es , et le triste mendiant qui sollicite des secours
au nom de la religion , tous ont sous ces voûtes la
•*■-«( r 8 )»-»
même proportion (i). Le chant d'un choeur de musi-
ciens soutenu par les sons harmonieux de l'orgue ajoute
à la profonde impression qu'on éprouve , celle que pro-
duit une musique religieuse dans ces beaux édifices où
sont alors rassemhlés les fidèles. C'est tout autre chose
que d'y entrer lorsque le silence y règne, lorsqu'on y
voit à peine quelques individus s'y promenant ou par
pure curiosité , ou nonchalamment. Je trouve que l'ar-
chitecture gothique est plus propre que toute autre à
créer ces sensations.
Le plan de cette église est une croix latine à cinq
nefs jusqu'au choeur, autour duquel elle est restreinte
à uue seule, la seconde ayant été prise pour les deux
sacristies. Son chevet est placé vers l'orient. Nombre
d'églises catholiques, hâties dès les premiers teins du
christianisme , ont consacré cet usage de tourner le
lieu où se célèbrent les mystères vers le point de
notre globe où se lève l'astre qui lui dispense la lu-
mière et la chaleur (2). Tous les peuples ont rendu
uue espèce de culte au soleil en raison des bienfaits
qu'il procure à la terre et à ses habitans. Nous voyons
que la religion chrétienne, elle même, en a conservé
(1) C'est-la le moment que notre Miliara a choisi pour représenter
depuis quelques années dans divers tableaux qui attestent un talent
supérieur , le bel ensemble de l'intérieur de l'église dont nous allons
nous occuper. Que le voyageur curieux de voir de belles choses après
avoir parcouru la Cathédrale de Milan se procure la vue d'un de ces
tableaux chez M. le Comte Melerio. 11 jugera que l'Italie a aussi son
Vanderncf.
(2) Notre ouvrage n'étant pas destiné à exposer des théories , nous
nous servons du langage vulgaire , et nous laisserons aux savans , aux
physiciens à discuter si la lumière et la chaleur émanent directement
de ce globe qui nous apparaît radieux , ou si ce n'est que l'effet du
mouvement , etc. etc.
«-*( 79 )»-*
quelques traces dans la situation de ses temples, ci
dans l'un de ses principaux orueinens qui représente
le soleil.
Les deux bras de croix ne sont saillans sur le corps
de l'édifice que de l'espace eu largeur d'une des pe-
tites nefs (i).
Cinquante-deux piliers ou colonnes auxquelles corres-
pondent le long des murs des colonnes à moitié enga-
gées , soutiennent ces voûtes. Depuis le bas de l'église
jusqu'à la croix il y a neuf entrecolonneniens (v. les
pi. XIII, XIV, XV). Le-, quatre piliers qui soutiennent
la coupole n'ont qu'un cinquième de plus dans leur
diamètre. M. Milliu a très-mal décrit ces colonnes en
disant que toutes sont cannelées; ce qui n'a pas heu
dans le gotique. Elles sont groupées ; une grosse co-
lonne forme le centre , buit autres dont quatre plus
petites de diamètre l'environnent , et y sont engagées
à plus de moitié, de sorte que le plan forme un
octagone qui est eu effet tracé par la base, dont tous
les membres ont le caractère gotique. Les colonnes
sont toutes couronnées par des chapiteaux d'un goût
tout-à-fait singulier. On ne pourrait en les décrivant
en donuer une idée, il faut être aidé du secours de
la gravure ( v. les pi. XVII, XVIII , XIX, XX).
Nous nous sommes bornés à ces quatre dessins pour
les faire connoître d'une manière plus exacte que
dans les ouvrages qui nous ont précédé. On en at-
tribue l'invention à Phiiippiuo de Modène (il vivait
(i) Nous suspendons de donner ici les mesures de la hauteur et de
la largeur de l'e'difice et de ses parties principales; elles seront rap-
portées dans une tabelle à la fin de l'ouvrage.
<— e( 80 )sè— »
dans le quatorzième siècle ) qui a su répandre de
la variété dans les ornemeus et dans les espèces de
lanternes. La planche XIX fera voir quel degré de
richesse l'artiste a su leur donner, puisqu'on y trouve
quatre rangs de figures de différentes proportions. Au-
dessus de ces chapiteaux s'élèvent des groupes de
petites colonnes engagées dans le mur qui se ter-
minent à la voûte. Les arcs entre les piliers sout
aigus et sans ornement. Le mur supérieur est percé
d'autant de fenêtres de forme gothique, mais sans
élégance car elles paraissent trop petites pour ce vais-
seau, sur-tout étant comparées à celles immensément
hautes et étroites de la petite nef en has. La voûte
est formée par des arcs en ogive el en berceau ; on
vient d'y peindre des oinemens arabesques dans le
style dit gothique ; el à cette distance l'illusion est si
complette qu'il faut être bien averti pour ne pas
croire que toute la voûte est ornée au ciseau. C'est
un grand travail qui mérite d'être admiré tant par son
étendue que par son exécution ; il a été diiigé par
M. Felice Alberli. On est si accoutumé à Milan à voir
des plafonds de sallous, de théâtres, décorés de belles
peintures imitant les reliefs, que personne n'y est plus
étonné , et qu'on laisse aux étrangers ce sentiment
qu'ils n'éprouvent pas ailleurs au même degré (1).
(1) Mous avons négligé de faire porter les yeux des curieux an-bas
de cette nef sur une caisse suspendue à la voûte , que ne manquent
pas d'indiquer les Guides de Milan et les Ciceroni de l'église. C'est
une machine en bois peinte avec des anges dans des nuages qui sert
à élever jusqu'au haut de la voûte, au moyen de poulies mondées
et d'un cabestan , chose assez ordinaire , des chanoines et un notaire
le jour où l'on doit célébrer la fête del Santo Chiodo , du S. Clou ,
<— s( 8 1 Ja-*
Nous avons sons nos pieds à l'entrée dos nefs une
belle méridienne tracée sur le pavé, en l'an 1786,
pur les astronomes de l'observatoire de Brera. Un petit
trou fait dans la voûte de la seconde nef donne le
passage à uu rayon de soleil pendant toute l'année.
Ceux qui sont curieux de donner un cours réglé à
leurs montres viennent se grouper autour de celte
méridienne et guetter le passage rapide de l'astre sur
la ligne de bronze qui traverse toutes les nefs.
On a construit au dedans des trois portes, probable-
ment par suite de la licence permise à Pcllegnni, des
entrées d'arcliitecture moderne, dessinées par Fabius
Manaoue. Cette décoration n'a de remarquable que les
deux belles colonnes corinthiennes de granit de la porte
principale, de Baveno sur le Lac Majeur, et qui ont
reçu un beau poli. Elles sont d'un seul morceau de la
hauteur de m. 1 0,700 aiant les bases et les chapiteaux
en marbre; hauteur totale ni. 12,800. Les pied-droits
sont du même grauit et également d'un seul hloc fort
épais. Que l'on juge quel travail il a fallu employer
pour tirer ces morceaux de la carrière, pour les tailler,
les profiler ; sur-tout les pied-droits à moulures, que de
soins et de difficultés pour les transporter et les mettre
en place. La dépense portée sur les registres s'est
élevée à liv. 56ooo milanaises. Au-dessus de l'inteuil
de la porte est l'inscription suivante en caractères de
bronze dans un tableau de marbre encadré d'une ma-
nière trop bizarre pour servir de modèle : car , l'œil
que l'on tient tout Tannée place' dans un reliquaire au-haut de la voûte ,
crainte qu'on ne l'enlève aux Milanais. L'atlluence que ce jour attire
dans la ville est considérable.
s'est fatigué d'une multitude de petits angles et de
ressauts que l'artiste y a prodigués.
ARAM MAXIM VM
MARTINVS • P • P • V
TEMPLVM • D • CAROLVS
CONSECRARVNT
Cet authentique prouve que le maître autel consacré
le ;6 octobre 1418, le fut par le pape Martin V. Il
rappelle aussi que l'église fut consacrée par S. Charles
Borromée en i5-y2, le 20 oct. (v. pi. XVI).
Cette décoration est surmontée d'une balustrade,
qui correspond à celle de dehors à la fenêtre appelée
des Homélies ; au reste on retrouve dans l'exécution
des ornemens la même beauté qu'à cens du dehors.
Celle belle entrée n'est pas masquée comme le
sont les quatre petites , du même style , par ces tam-
bours (jue l'on place dans les églises, assez maladroi-
tement pour la majesté de l'édifice, et ces mêmes
tambours correspondent aussi peu que les portes eu
bois à la richesse de tous les ornemens qu'on admire
aux portes. Sans doute lorsque le pavé sera terminé ,
ces boiseries seront remplacées par quelque chose de
plus noble. Mais nous décrivons ce qui existe en ce
moment.
Le pavé, qui se continue avec activité, est un marbre
en mosaïque à ornemens incrustés (v. pi. XXI ). Ce
travail s'exérute dans les ateliers qui sont vers la
plajcc dite Campo Santo.
■*-«( 8 5 )»— ►
Sur la gauche, sont placés, entre le premier et le
second pilier , les fonds baptismaux. ( v. pi. XXII ).
Quatre colonnes de marbre, d'ordre corinthien, élevées
sur de hauts piédestaux , ayant leurs chapiteaux de
bronze, soutiennent quatre frontons. Au milieu de cet
espace, où figure assez mal une armoire en bois , est
une cuve de porphyre, très-peu élevée de terre (i).
On a dit qu'elle avait renfermé les corps de S. Denis ,
et ceux de quelques autres martyrs, mais ce qui pa-
raît certain est que ce fut une baignoire , ce qui peut-
être indiqué par un mascaron sculpté sur une face
de mauvais goût , qui aunouce la décadence de l'art.
On croit qu'elle a servi dans les thermes de Maximien ,
bâtis dans le lieu où est présentement l'église de S. Lo-
renzo , dont il reste de belles colonnes de marbre ,
qu'on voit daus la rue , qui mène à la porte Ticinese.
Ceux qui auront sous les yeux ces fonds baptismaux
dont le dessin a aussi très -peu de rapport avec l'en-
semble de l'édifice, chercheront dans notre gravure
les figures qui sont posées sur les architraves et sur
les frontons. Comme elles ne sont que de plâtre , et
qu'elles ne furent établies-là que pour une cérémonie
de baptême que l'on crut rendre plus pompeuse en
augmentant les ornemens ( opinion aussi fausse qu'iu-
sensée en matière d'art), nous avons jugé, comme
tous les gens de goût , qu'il serait à désirer qu'on en
débarassàt ce monument, et nous avons commencé par
les supprimer dans notre dessin.
(i) Le baptême , selon le rit Ambrosien , s'administre par l'immer-
sion de ld le le de l'enfant.
i5
Mais nous ne pouvons nous dispenser de faire re-
marquer ie défauts de celte composition de Pellegrini,
qui voulait à toute force mélanger le grec , le romain
au gothique. Elle donna lieu à une éclatante dispute
entre lui et Martin Bassi dont l'opinion fut appuyée
des autorités respectables de Palladio, de Vignola , et
d'autres artistes. Le tout est consigné dans un imprimé
sous la date de 1672 intitulé Dispareri in matériel
di Prospetliva , etc. Brescia. Cet artiste reproche à
Pellegrini d'avoir fait l'entrecolonnement trop large et
contraire aux règles les plus simples de l'archiiec-
ture (1); de sorte que pour soutenir son architrave il
a du employer des liens de fer, et qu'il a du aussi
renoncer à l'idée de son dessin qui portait une petite
coupole , et d'orner les quatre frontons de figures de
ronde-bosse. Bassi trouve les colonnes trop grêles , et
l'usage des piédestaux déplacé , s'appuyant sur ce que
les anciens ne les employèrent que pour les arcs de
triomphe.
Pellegrini dans une conférence devant le Chapitre et
les Commissions , avoua que Tentrecolonnement était
disproportionné et contre les règles , et annonça aussi
qu'il y avait trouvé remède , ce fut de lier les pierres
de l'architrave et les colonnes par des liens en fer ,
ce qui ne remédiait qu'au défaut de solidité.
(1) Martin Bassi rappnrta flans la dispute qui eut lieu en plein Cha-
pitre , ces paroles de Vitruve : Diastigli autem haec erit compositio ,
cum trium columnarum crassitudinem intercohimnio interponere por-
sumus , ut est Apollonis et Dianae aedis. Léon Baptisla Albcrli ra-
pelle ce principe , chap. 7, liv. 5, tandis qu'ici l'entrecolouaement est
de six diamètres.
<-œ( 85 )a— ►
Comme trop souvent la prévention en faveur d'un
homme à réputation prévaut , malgré ses erreurs ( et
Pellegrini fut forcé de les avouer) sur l'opinion raison-
nable de qui ne peut pas lui opposer encore un nom
aussi connu, il fut rendu par les Commissaires une
espèce d'ordonnance qui, sans desaprouver entièrement
Martin Bassi , défendait de parler de ces choses da-
vantage. Arrêté assez ridicule pour une commission
dans laquelle on comptait des hommes remplis de con-
noissauces sur les beaux-arts.
Comme nous n'avons rien de plus à observer dans
cette grande nef ( qui n'a pas été déparée par des pe-
tites chapelles adossées à ses piliers, comme on eu voit
dans beaucoup d'églises antiques et modernes , ce qui
interrompt désagréablement la ligne fuyante perspective
qui prononce la profondeur de l'édifice), nous nous
rejetterons, sur notre droite, dans les nefs latérales
dont le sol est de niveau. La seconde n'a également
rien de curieux , sinon que les colonnes semblent di-
visées eu deux parties à raison de la différente hau-
teur des voûtes. Les chapiteaux sont de la même
forme que ceux de la grande nef et à la même hau-
teur, mais il n'y en a qu'une moitié. Sur l'autre moi-
tié opposée du pilier est placé un chapiteau plus
simple et beaucoup plus bas , ce qui produit un effet
singulier vu daus l'ensemble. Observons que l'usage
coustant dans les fabriques eu Italie , de lier les arcs
des voûtes par des barres de fer , a également prévalu
ici. Cette méthode semble accuser à tort peu de solidité
dans la construction , puisqu'on a eu recours à un
tel moyen qui plaît peu à l'œil. Ce désagrément
n'existe pas dans les églises des autres pays ; on le
<-«( 86 )»-►
prodigue ici jusque dans les galeries et les portiques
des palais et des hôtels particuliers.
Nous avons peine à croire, quoique quelques écri-
vains qui nous ont précédé , l'avancent d'après des
actes tirés des archives, que ce soit Pellegrini qui ait
fait les dessins des peintures des vitraux de notre église-
La quantité en est immense, car, en ne parlant que
des grandes feuêtres eu has , nous en comptons trente-
deux. Or comme chaque panneau rectangulaire qui
contient un sujet se multiplie dans chacune des fenêtres
tellement que dans celle du milieu du chevet il y en
a 128, on verra que Pellegrini eut du composer
5,ooo et plus de modèles. Quelque fécondité que l'on
suppose à un artiste , et sur-tout à un artiste qui n'est
pas placé au rang des peintres d'histoire , était-il pos-
sible que celui-ci occupé de sa construction , des chan-
gemens apportés qui faisait défaire et refaire les ou-
vrages successivement, ayant à répondre à des cri-
tiques, à des tracasseries, que cet architecte, dis-je,
eut trouvé le tems d'inventer et de peindre tant
de sujets. Malgré l'obligation qui lui fut imposée de
faire de ses propres mains omnia et singula de-
signia in pictura quae sunt et erunt necessaria
pro invetriati (i56^ extrait des archives). Nous
consentirons volontiers que par cette coudition ou
lui ait donné la faculté de choisir les peintres , de
leur indiquer les morceaux à exécuter , et de diri-
ger en tout leurs travaux ; ce sera bien assez même
pour sa gloire. Nous désirerions pouvoir satisfaire en
même tems à un devoir envers ces artistes et à la
curiosité des amateurs, en leur donnant les noms des
principaux peintres de ces vitraux, car eu admirant
— 8s( 87 )°~*
la variété des compositions , de belles têtes , de la
richesse dans les détails des sujets , une grande in-
telligence dans l'assemblage des couleurs , on désire
en connoîlre les auteurs. Mais rien ne nous a paru
certain sur les notions qu'ont produit les recherches
faites dans les papiers de l'église , et nous crain-
drions d'attribuer beaucoup trop à ceux qui sont dé-
signés dans les archives sous le titre de Maïstro de
fenestres de vetro ; de Magister a Vetriatris , dont
le talent se bornait peut-être à découper sur les car-
tons du peintre , les verres, et de les réunir d'après le
dessin , par des plombs.
La première chapelle est dédiée à S. Agathe. Elle
est de marbre blanc et noir uni, ornée par six co-
lonnes de celte couleur, entre lesquelles sont pla-
cées deux figures de ronde-bosse. L'une représente
S. Lucie, et fut sculptée par André Biffi d'après
le modèle en terre de François Brambilla ; l'autre
est S. Christine également modelée par Brambilla et
exécutée par son élevé Pierre Autoiue Uaveno. Elles
manquent d'élégance , pareeque la draperie les rend
lourdes, les têtes n'ont pas de noblesse. Au-dessus
du fronton sont cinq autres stalues un peu plus pe-
tites, qu'on distingue peu, paicequ'ellcs sont éclairées
par derrière , et que les vitres blanches de celte fe-
nêtre font mal à la vue. Le tableau qui représente
S Agathe, en prison, visitée par S. Pierre, est, dit-on,
de Frédéric Zuccaro , auquel on le paya 33o écus
d'or. Il a été restauré en i6o3 par Paul Camille
Duchino. Ce tableau n'a rien de bien remarquable
( v. pi. XXXIII ).
La chapelle suivante , la première au-dessus de la-
quelle commencent les vitraux peiuts, es.t de marbre
blanc décorée par deux culouues de beau marbre noir
veiué de blanc ; à côté du tableau s'élèvent deux
gaines en marbre blanc, qui se terminent par des anges
à mi-corps d'un assez bon goût. Ils supportent un
fronton circulaire au-dessus duquel est placé une statue
sur un dé très-élévé. Eutre les colonnes et les caria-
tides en gaîne sont des statues , dont celle représentant
S. Jacques le mineur, est du même Pierre Antoine Da-
verio. On u'y retrouve pas le beau style que nous avons
admiré dans les Apôtres du portail. Les deux cariatides
suporteut un fronton coupé ; et les colonnes sont seule-
ment surmontées par deux figures : mais on ne voit que
ressauts, et enfoucemeus de la corniche, composition
bizarre de ces tems , où les architectes se plaisaient à
tourmenter capricieusement les formes. Les statues pla-
cées sur cette chapelle, au nombre de cinq sont plus
élégantes. Le tableau qui représente S. Jean l'Evangé-
liste s'entretenant avec deux anges , a plus de mérite
que celui de S. Agathe. La composition en est simple ,
les anges ont un beau caractère de têtes , et le ton de
couleur est d'un bon effet. On le croit de Melchior
Gherardini ou Gilardini.
Au-bas de cette chapelle est une pierre sépulcrale
sous laquelle fut déposé le cœur du Cardinal Ca-
prara Archevêque de Milan , mort à Paris le 1 1 juillet
1810. Ou y lit l'inscription suivante écrite au-dessous
de ses armes qui sont d'un dessin fort médiocre pour
un siècle et une ville où fleurissent les beaux-arts ;
elles sont en marbres de couleur incrustés.
• HEIC • POSITVM • EST
COR
IOAN • BAPTISTAE • CAPRARAE
DOMO • BONONIA
S • R • E • CARDINALIS
LEGATIONE • VICARIA • AEMILIÀE
LEGATIONIBVS • COLONIENSI • HELVETIA • VINDOBON.
FRANCOFVRTIANA ■ PERFVNCTI
EPISCOPI • AESINATIVM
LEGATI • AD • IMP • NAPOLEONEM • AVG
ARCHIEP • MEDIOLANENSIVM
VIRI • IN • MAXX ■ NEGOTIIS ■ AGEND • PRYDENTISSIMI
DE • VTRAQVE ■ ECCLESIA
AEDIBYS ■ SEMINARII • AESINATIS ■ REFECTIS
ET • GROPELLO • PAGO ■ IN • AGRO ■ MEDIOLANENSI
VTI • FREQVENT • MVNICIPVM • HONESTIVS • PATERET
EXTRVCTIS • DOMIBVS • RENOVATO
ET • MAGISTRO ■ PVERIS ■ INSTITYENDlS ■ AVCTO
EGENISQ • ETAEGROTIS • PERPET V A • OPE • SVBLEVATIS
OPTIME MERITI
VIXIT • ANN • LXXVII
SAPIENS • COMIS • MVNIFICVS
ACCEPTVS • PRINCIPIBVS • CARVS • OMNIBVS
DECESSIT
LVTETIAE • PARISIORVM • XI • K • IVL • A ■ MDCCCX
HAEREDES • F • C
•*-«( f)0 )a—>
Le Cardinal légua toute sa fortune au grand hôpital,
déjà immensément riche , et un de nos écrivains nous
apprend que le Souverain d'alors (Buonaparte) viola,
ce sont ses expressions, ce testament eu faisant passer
une partie de cette fortune à un neveu du prélat. Les
hommes sages ne manquent pas d'applaudir aux déci-
sions prises depuis quelques années par les Souverains,
de se reserver l'approbation ou la réduction des legs,
dits Pieux, au moyen desquels on privait des héritiers,
sans fortune, des substances que le droit naturel et civil
leur avait assuré. De pareilles violations ne sont plus
qu'au profit de l'humanité , de l'amour de ses proches
qui est aussi une vertu chrétienne. Ainsi viola est une
expression heureusement impropre aujourd'hui dans
pareil cas.
La troisième chapelle est du même genre que
la précédente en marbre blanc et de couleur, à
deux colonnes. Deux gaines soutiennent aussi un fron-
ton circulaire entier , elles sont terminées par des
Séraphins. Les colonnes s'élèvent au-dessus du fron-
ton ; deux parties d'un fronton triangulaire coupé finit
en volutes, genre encore plus bizarre que le pré-
cédent. Le tableau où sont représentés la Vierge,
Saint Victor et Saint Roch, n'est pas sans mérite.
On le dit de Jean Maur Rovère , d'autres l'appellent
Rosse ui , et le plus souvent le Fiamrnenghino (i).
(i) Combien ne doit-on pas regretter que nombre de tableaux du
premier rang soient presque perdus par le peu de soins qu'on en a
pris Je ne puis me refuser à citer à ce propos une anecdote dont j'ai
été émoin , ce qui prouvera d;i us quelles mains sont souvent tombés des
chefs-d'oeuvres. J'admirais à Chartres (ville près de Paris ) un superbe
Ces chapelles ODt clé dessinées par Pellcgriui , Bassi
et le Cerano.
En poursuivant le tour on arrive aussitôt à un des
plus beaux nionuniens qui se voyent à Milan. Le cé-
lèbre Michel Ange Buonarotti, selon ce que dit Va-
sari, en a donné le dessin. Le Pape Pie IV fit élever
ce tombeau en l'honneur de sou frère Jean Jacques
Médicis, marquis de Mélegnauo, et que les historiens
ont distingué des Médicis» souverains en Toscane, par
le surnom de Médichino. Il était oncle de S. Charles
Borromée, et commanda les troupes sous l'empereur
Charles Quint ; on vanta ses talens militaires. Son frère
Gabriel, qui n'eut pas la même réputation, fut aussi
placé dans le môme tombeau, mais dont tous les at-
tributs qui le décorent ne se rapportent qu'à son aiuè.
Le monument est appuie coutre le mur du bras de
la croix. La partie antérieure est composée de quatre
belles colonnes de marbre noir antique, d'ordre joni-
que, que le pape envoya de Rome; le reste est eu
marbre blanc. Au milieu est placée la statue du guer-
rier eu pied, de grandeur naturelle, vêtu à la ma-
nière antique, la tête nue. Un grand manteau, Pa-
tableau du Bourdon dans l'église canoniale de S. André. Le sacri-
stain qui venait de le découvrir, nous faisait remarquer toutes les
figures. Mon compagnon, peintre de l'Académie, déplorait un
accident arrivé au cou d'une belle figure de femme sur le devant,
c'était un trou prés de la gorge. — Oh ce ne sera rien , dit
notre Cicérone, mon intention est d'y coller une pelure d'oignon
qui sera de la couleur, et il n'y paraitra plus. Gardez vous bieu ,
Barbare! lui cria mon artiste, de porter une main ignorante sur
ce chef d'oeuvre , laissei le avec son trou. Le tableau brille au-
jourd'hui dans le Musée fiançais.
i4
htdamentum', descend par derrière jusqu'à ses talons
et est jeté avec grâce sur une des deux jambes. D'une
maiu il soulève un pan de ce manteau et de l'autre
il s'appuie sur son casque place sur un tronc d'arbre.
Ou peut être étonné que Vasari ait écrit que de celle
main il tenait le bâton de commandement: cette erreur
ne peut être excusable dans le célèbre historien des
artistes italiens, qu'en supposant qu'il n'avoit pas vu
le bronze, mais peut être un modèle, où celte pensée
ait existé, et qu'on ait changée ensuite en l'exécutant.
Celle figure est belle, noble dans sa pose , et la tête,
qui est sans doute portrait, est bien terminée. Entre
les colonnes qui l'avoisinent sont deux figures de fem-
mes assises sur un piédestal plus bas , également en
bronze ; l'une représente la paix, l'autre l'héroisme
militaire, dans une position exprimant la tristesse ;
audessus de leurs lêtes est une guirlande de fruits et
enfin au milieu un tableau en bas-relief, de bronze,
représentant la naissance de J. C.
La corniche, soutenue par ces quatre colonnes, s'é-
tend dans toute la largeur du monument, ce qui est
daus l'ordre , mais nous ne faisons cette observation
que pareeque nous allons voir sur le second plan deux
colonnes de marbre rouge et plus hautes que celles
du devant, recouvrant l'architrave et partie de la fri-
se, et enclavées, entre des pilastres de la même pro-
portion que les colonnes du premier plan. Elles su-
portent chacune une statue isolée également en bronze.
Celle à la droite du spectateur représente la Prudence ,
celle à la gauche est une Renommée. Les deux co-
lonnes antérieures des angles portent de beaux candé-
labres en bronze. Audessus de cet ordre s'élève un
amortissement ayant quatre pilastres. Dans les entre-
colcmnemens latéraux sont placées les deux inscriptions
suivantes.
10 . IACOEO . MEDICI . MARCH . MELEGNANI
EXIMII . AN1MI . ET . CONS1LII . VIRO . MVLTIS
V1CT0BIIS . PER . TOTAM . FERE . EVROPAM . PARTIS
APVD . OMNES . GENTES . CLAR1SSIMO . CVM . AD
EXITVM . VITAE . ANN0 . AETAT1S • LX . PERVENISSET.
GABRIEL1 . MFDICI . INGENU . ET . FOKT1TVDINIS
EXIMIAE . ADOIESCENTI ■ POST . CLADEM . RI1ETIS
ET . FRANCISCO . II . SFORTIAE . ILLAT'M . NAVALI
PRAELIO . DVM . V1NCIT . CVM . INVICTI . ANIMI . GLORIA
INTERFECTO.
Il parait qu'une troisième inscription existait jadis
au milieu , qui maintenant est détruite. An sommet du
monument sont placées les armes des Médicis , soute-
nues par deux figures en manteau funèbre. On lit sur
la corniche les mois suivans
PIVS • iïll • PONT • MAX • FRA • B • F1ERI • F .
et si l'on a conservé pour la postérité le nom de l'homme
de »ôut et opulent, on n'a pas oublié de rendre ju-
stice au mérite, au talent, en plaçant au dessous de
cette inscription, dans un lieu également apparent, le
nom du sculpteur en lettres de bronze.
LEO ARET1N
E Q V E S F.
( v. FI XXIV. )
~*( 94 )»-*
Nous ajouterons pour l'honneur des Lombards , que
Léon Leoni, surnommé le Chevalier Aretin , était ne à
Menagio, petit bourg situé sur le Lac de Corne, qu'il
était lié d'amitié avec Michel Ange, ce qui peut être
le fit choisir pour l'exécution de ce tombeau. Il était
aussi bon architecte que sculpteur, et ou connait de
très belles peintures de lui (i),
A' côté du monument que nous venons de décrire,
il y a un petit autel composé de marbres précieux ,
également donné par le pape Pie IV. On y voit
trois petites statues en bronze représentant la Vierge
avec l'enfant Jésus et deux anges. (2). Au coin il y
(1) Parmi le grand nombre de personnages illustres et de mé-
rite qui en tout tems ont honore Milan leur patrie, on compte
les Papes suivans , Alexandre, en 1061 , de la famille Badaggio
comuneineut appele'e Da Baggio , e'teinte depuis peu d'années;
Urbain III en 1 185, delà famille Crivelli ; Célestin IX en 1241 ,
de la famille Castiglioni ; Pie IV en i55o, de la famille Médi-
ci ; Grégoire XIV en i5go, de la famille Sfondrati. Ce n'est pas
ici le lieu où l'on doive citer ceux qui se sont distingués dans
les sciences et les lettres, ils n'appartiennent pas à notre sujet,
lorqu'ils n'occupent pas une place dans celte église.
(2) Il y a peu de tems que cette cliapelle fut débnrassée d'une
grille de fer qui l'entourait , et de quantité de cliaises qu'on entassait
dans son enceinte: on les a maintenant transportées dans un ma-
gazin audessous du choeur.
A ce propos nous ferons remarquer un abus qui existe dans
toutes les églises de Milan, et même dans celles de plusieurs villes
de la Lombardie. C'est qu'elles sont très-peu garnies de bancs où
les fidèles puissent se placer , comme il est d'usage ailleurs. Ici
des hommes ou des femmes ont dans quelques, endroits de l'église
un amas de petites chaises ordinaires, qu'ils apportent successi-
vement à mesure qu'il arrive des personnes, sans s'occuper s'ils
dérangent ou (mbarassent celles qui sont déjà placées; ils en exi-
a une petite porte donnant l'entrée à un escaliei
lequel conduit au sommet de l'édifice (1).
La grande chapelle suivante, et qui se présente
pompeusement dans le fond du bras de la croix est,
quoique dédiée à S. Michel, appelée la chapelle de
gent une rélribution , et ces chaises sont retirées avec la même
célérité aussitôt que les personnes les ont quittées , pour les passer
à d'autres. Cela cause un bruit presque continuel ; car ces gens
qui vont et viennent à travers le monde pour soigner ce traffic ,
interrompent pendant l'office divin l'attention des personnes qui
voudraient faire leurs prières avec recueillement. Cet usage est cho-
quant , dans un lieu surtout ou l'on doit observer la tranquililé et
la décence pendant la célébration des mystères sacrés.
Le louage continuel de ces chaises produit à la vérité un béné-
fice assez considérable à l'église et aux gens qui en sont chargés,
mais ce n'est pas moins un abus et une spéculation mal placée,
et qu'on devrait abolir pour toujours dans les temples consacrés
à la méditation et à la prière.
Nous pourrions y ajouter l'usage de la quête avec un petit sac
au bout d'un long bâton dont les secousses de la monnaie , qu'il
contient , ou celles d'une clochette qui y est attachée , sont égale-
meut incommodes, mais comme il est moins importun que celui
que nous venons de nommer, et que d'ailleurs cet usage est
presque généralement adopté comme un moyen d'olfrande aux be-
soins des églises ou au soulagement des pauvres, nous serons moins
scrupuleux sur l'inconvénient qu'il présente.
(1) On peut , tous les jours de la semaine indistinctement, et
à toutes les heures monter sur le haut de l'église , que nous
désignerons par le mot comble, puisqu'il n'y a ni charpente ni
toiture. Il y a uu gardien attaché à ce service pour ouvrir à
qui se présente l'escalier désigné ici, il perçoit pour cela une
légère rétribution qui à été fixée par l'administration et que les
curieux peuvent outrepasser à leur gré. Lorsqu'on est parvenu
en haut , on peut se promener et y rester tout le tems que l'on
veut, sans qu'aucun gardien puisse le limiter.
S. JcaD Bono , Archevêque de Milan (i). Elle a élé
construite, de même que l'autre en face, à la place
de deux portes, que S. Charles, scandalisé que le
peuple s'en servit comme d'un passage d'une rue à
l'autre, fit houcher, en y plaçant ces autels. Aux deux
côlés de la grille à hauteur d'appui qui ferme celte
chanelle , sont deux figures colossales en stuc atribuées
au sculpteur Giudici. Le bon goût ordonne de faire
transporter daus quelque magazin ces statues qui sont
d'un style assez baroque auquel correspond celui de
leurs piédestaux. Nous disons pour la défense de cet
estimable artiste qui nous a laissé de meilleurs souvenirs,
même dans celte église , que ces figures lurent exé-
cutées pour une cérémonie d'un jour, fanes à la hâte,
comme toutes les décorations en de pareilles occasions,
et l'artiste ne se doutoit pas qu'on les conserverait ,
encore moins qu'on les placerait si fort en évidence
dans le milieu du temple, et surtout auprès de scul-
ptures travaillées avec une délicatesse qui fait ressortir
davantage la lourdeur et le grossier style de ces colos-
ses. Espérons que pour sa gloire, pour celle de l'art
et pour la beauté du temple, l'administration actuelle ,
mieux dirigée par le goût, les enlèvera de cette place,
qu'ils ont trop long-tems occupée.
(i) Ce Prélat, appeKPierre, qui vivait dans le \ IIe siècle, esî
surnommù ( Bono ) le bon. Ce nom lui fut donne piobableniei.t
pour indiquer ses vertus, puisque généralement il a éié ioujouis
césigné ainsi. Quelques uns l'ont voulu originaire d'une famille De
Canulli, mais comme dans ces lems on ne se servait pas île uoms
propres, celle erreur provient du lieu de sa naissance, Camaglia, an-
ciennement Camalliuni) village à la distance de ij milles de Gènes,
<-«( 97 )s-
L'entrée de la chapelle est formée par deux larges
pilastres souteuant l'archivolte ; ils sont ornés de scul-
ptures que nous ne pouvous désigner sous le nom de
has-reliefs, mais plutôt sous celui de tableaux de mar-
bre. Ce genre particulier et admirable cpiand il est
exécuté comme ceux-ci, s'éloigne beaucoup du genre
des anciens maîtres de la Grèce et de nos modernes
qui s'étudient à les imiter. H y a dans ces tableaux
des figures et des groupes absolument isolés du fond ,
et derrière lesquels on apperçoit d'autres figures ou
groupes attachés plus ou moins au fond. Le tout est
ordinairement orné d'architecture, et de perspectives.
Ce serait une question à traiter que celle du mérite
de ce genre, réprouvé aujourd'hui par quelques savans
écrivains sur les arts et par des artistes éclairés. Mais
il resterait à examiner, d'abord si le jugement ne dé-
pend pas de l'admiration que leur cause la vue des
bas-reliefs antiques, et si ce sentiment seul ne les porte
pas à rejetter tout ce qui s'éloigne de ces admirables
modèles. Il semble qu'alors qu'un bas-relief se com-
pose de plus d'une ou deux figures, c'est un tableau
qui représente une scène , or comme il est généra-
lement impossible que tous les personnages agissent
seulement sur le même plan, et sur une ligne horizon-
tale, il doit absolument y avoir une dégradation per-
spective qui domine sur tous les objets dont se com-
pose le sujet. Or comme les anciens sculpteurs pra-
tiquaient fort peu la perspective, il en est résulté que
leurs bas-reliefs n'ont été composés que d'un très-petit
nombre de figures sur le même plan , et ils ont même
adopté un système qui ne peut manquer de nous pa-
raître bizzarre, malgré toutes les beautés de leur tra-
vail , celui de former jusqu'à trois scènes différentes
sur un même bas-relief- Laissons donc la chose à di-
scuter et à décider par d'autres qui écriront encore des
volumes, et lorsque nous aurons, comme ici, sous les
veux de beaux morceaux de sculpture en forme de ta-
bleaux, admirons, et avouons que la supériorité du
talent fait tout le mérite d'un ouvrage, à quelque
genre qu'on l'attribue.
Sur le côté gauche eu entrant sont trois tableaux
qui représentent des sujets de la vie de S. Jean Bono.
Le premier est celui de sa naissance ; c'est un char-
mant morceau de Charles Simonetta, qui le laissa ira-
parfait: il fut terminé par Etienne Sanpietro. On ne
s'apperceverait pas que deux artistes ayent terminé ce
morceau. La composition est riche , on y compte vingt
figures sans qu'il y ait confusion malgré le peu d'e-
space. Toutes les figures du devant sont entièrement
détachées du fond et peuvent passer sous le nom de
ronde bosse, les autres se détachent plus ou moins.
Si l'on ne remarque pas dans celle sculpture la sim-
plicité noble de l'antique , on ne peut pas non plus
lui reprocher cette exagération qui a caractérisé l'art
à une époque plus moderne, et ou devra rendre ju-
stice au bon goût et à l'intelligence des artistes dans
la disposition et dans la perspective. Quant au travail
on doit s'attendre, d'après ce que nous venons de dire,
à le trouver fini et délicat. Au dessus est une sorte de
médaillon d'où sort une demi-figure presqu'en fièrement
détachée du fond ; elle représente la Prudence , ou-
vrage de François Zarahalla.
Dans le second tableau , le S. Evêque fait son entrée
à Mdan. 11 a été sculpté par César bussola d'après un
— =( 99 )»-»
modèle en terre fuit par lui et par Dénis Bussola , son
père. On ne peut qu'être étonné de la délicatesse
d'exécution de ce tableau , et combien l'artiste s'était
rendu le maître de son ciseau, comme de la matière
qu'il travaillait. BtUfs si l'on est satisfait de le voir placé
à une hauteur qui le garantit des accidens auxquels il
serait exposé plus bas, on peut regretter aussi que
cette position empêche de jouir assez bien des jolis dé-
tails qui le composent.
La demi-figure de la Tempérance , qui sépare ce
tableau du troisième et dernier de ce côté, est du ci-
seau de Jean-Baptiste Vismara.
Nous ne pouvons juger facilement le tableau supé-
rieur, exécuté par Jean-Baptiste Dominione , et c'est
à tort que quelques-uns l'ont attribué à Albertim ; il
représente le voyage du Saint à Rome , où il guérit
les malades qui viennent à sa rencontre.
L'arc est décoré par des groupes d'anges et de
saints en bas relief. On nomme pour leurs auteurs Cé-
sar Bussola, Joseph Bosnali, Etienne Sanpielro , Ma-
caire Carcauo, Marc Mauro, Charles François Millone,
Cbarles Brunelti et François Zarabalta. A voir tant de
noms d'artistes qu'on a dit oc upés des travaux d'un
espace si étroit et si peu étendu , on pourrait douter
de l'exactitude des historiens qui nous ont transmis celle
notice , à moins qu'ils n'aient cru devoir nommer les
élèves qu'ils ont vu ébaueber sous les jeux de leurs
maures ces bas- reliefs. Nous verrons en sortant de la
chapelle les sculptures du pilastre opposé à la droite.
L'autel est d'une riche composition. Quatre colonnes
d'ordre corinthien eu granit gris, placées sur deux plans,
soutiennent une corniche interrompue dans le milieu.
i5
«-«( 100 ):=-+
Les deux colonnes en avant sont surmontées par un
fronton circulaire et par deux figures, le tout eu mar-
bre blanc. Les deux entrecolonnes De portent que deux
statues. Sur le centre du fronton est placé un groupe
d'anges. La niche qui forme le milieu de l'autel est cou-
ronnée par un petit fronton triangulaire coupé, et au
centre duquel est une tête de chérubin. Le fronton est
soutenu par deux consoles, et celles-ci sont terminées
par de jolies têtes d'anges. La niche contient la statue
de S. Jean Bono en marbre blanc. Cet Evêque est re-
présenté foulant aux pieds l'hérésie et il a un petit
ange à ses côtés. Le style de ces deux figures est ma-
niéré, les draperies du Saint sont lourdes, le mouve-
ment donné à la chape qui le couvre est loin d'être
noble et naturel. C'éloit le genre adopté par les scul-
pteurs du XIIIe , XIVe et XVe siècle; ils croyaient que
tout le talent daus leur art consistait à se montrer ha-
biles à couper le marbre. On trouve souveut plus de
grâce et de simplicité daus le drapper des figures di-
tes gothiques.
Le Christ eu bronze placé sur le même autel fait
honneur à Jean-Baptiste Busca , surnommé le Ciochino.
La figure du Sauveur est fort belle et des deux an-
o
ges qui l'adorent, celui qui est à genoux a plus de
noblesse que l'autre qui est debout.
Ou voyait autrefois à cet autel un tableau repré-
sentant Jésus mort. Il était composé de plusieurs figu-
res qui ne furent pas entièrement terminées pareeque
Frédéric Baroccio , son auteur, mourut pendant qu'il
y travaillait. Un écrivain milanais nous apprend qu'on
enleva ce tableau pour lui substituer la niche et la
statue de l'Evêque Bono, il fut ensuite placé dans la
<-e( lOI )»-»•
Sacristie méridionale, où on le vit jusqu'en 1766. Il
fut alors vendu par ordre du Chapitre, à vil prix à
D. Joseph Ordogno De Rosalis , moyennant 35 se-
qnins ( 4i5 f. ), il passa ensuite clans les mains de
l'ahhc Magnani à Bologne ; celui-ci l'acheta 200 sc-
quins , ce qui était encore au dessous de sa valeur ;
il est maintenant dans le Musée de Bologne (1).
Aux deux côtés de l'autel sont placées sur de hauts
piédestaux deux groupes de figures , de grandeur na-
turelle en marbre hlanc de Carrara. Celui à la droite
représente S. Michel combattant le démon qui est étendu
à ses pieds. On attrihue ce groupe à Jean- Baptiste Bel-
laudi. Cet ouvrage pourrait être meilleur sous bien des
rapports ; il manque surtout de goût dans la pose de
l'ange et dans la draperie. L' autre groupe représente
un ange gardien conduisant un enfant. Loin d'être par-
fait, il possède cependant quelques détails mieux en-
tendus que le précédent. On lit sur la base de ce groupe
une inscription qui porte le nom de l'artiste.
ELIAS . VINCEN . BVTIVS . INVEN . ET . SCVLP . AN . MDCCX11L
Ces sculpteurs n'avaient aucune idée des sujets qu'ils
(1) Nous avons ici une nouvelle preuve qu'il ne faut pas trop
accorder de confiance à quelques savans voyageurs qui rouirent
en poste. M. Millin dans son voyage en Italie, dont nous avons
déjà signalé l'inexactitude, parle de ce tableau comme l'ayant vu
à l'autel. Peut-on alors douter que ce voyageur académicien n'ait
lait comme tant d'autres, qu'il ail piis ses notes dans des livres.
Nous pouvons ici garantir à nos lecteurs que l'auteur de notre de-
scription de la Cathédrale de Milan a tout examiné et vérifié jusque
dans les moindres détails.
»_«j( 102 )î3~V
devaient représenter, car ou leur imagiuation n'avait
pu concevoir l'essence des êtres célestes qu'on est ob-
Lligé de revêtir des formes humaines pour nous les
rendre sensibles, ou leurs éludes s'étaient bornées à
copier servilement des modèles imparfaits qu'ils imi-
taient trop fidèlement, sans se douter qu'il est un
beau idéal qui convient absolument aux divinilés ,
même du dernier ordre, et dont ils eussent trouvé tant
d'exemples dans les ouvrages des anciens. De pareilles
fautes ne peuvent se pardonuer à des artistes italiens,
nés , élevés auprès de quantité de chef-d'oeuvres an-
tiques.
Tout le reste de cette chapelle est orné de beaux
marbres de différentes couleurs et de panneaux in-
crustés , formant de beaux enlrelas.
Le pilastre à la droite nous offre égalemeut comme
l'autre , trois bas-reliefs en tableaux séparés par deux
demi figures. Le premier représente S. Jean Bono ,
léffat de la cour de Rome , recevant une audience
publique de Teodolinde, reine des Lombards; il a
été sculpté par Joseph Rosnati. Le sujet du second
est le S. Evêque chassant de Bergame les ariens;
ce morceau est de Siro Zanelli.
Le troisième tableau représente la mort du Saint ,
et il a été exécuté par Joseph Bono.
La grosseur et le style un peu lourd des d con-
figures tant de ce côté que de l'autre contrastent, peut
être un peu trop, avec la délicatesse de ces petits su-
jets, et beaucoup de jolies têtes, qu'on a pu remarquer
dans ceux-ci, doivent faire paraître peu nobles celles
des figures de la Justice et de la Force que nous
voyons de ce côté entre ces trois tableaux , dont la
•*-«( i o 3 )s>— ►
première est du Zarabalia susmentionné , la seconde
d'Isidore Vismara.
Deux prélats du même nom et de la même famille
ont eu leur sépulture devant celle chapelle, et on lit
sur le pavé les deux inscriptions suivantes , gravées sur
le marbre.
1.
CARLO • FRANCISCO • A1ROLDO
EDESSAE . AKCHIEPISCOPO
AD . ITALIAE . ET . CATIIOLICOS . GERMANIAE . PRINCIPES
PONTIFICIO . LEGATO . AD . BELGAS . INTEfiNVNCIO
APVD . MAGNVM . ETRVRIAE . DVCEM
HINC . APVD . REMP . VENETAM . KVNCIO
HVMANIS . OMMBVS . IN . PATR1A . PIE . DEFVNCTO
NONIS . APR1LIS . ANN . SAL . MDCLXXX1II
CVM - AETATIS . AGERET . XLVI . MONVMENTVM . HOC
QVOD . IPSE . 1NANI . GLORIAE . STABE . VETVIT
D . CAESAR . AIROEDVS . FRATER . COMES • I.EVCI
ET . DOMINVS . VILLARVM . BELASII
MEDIOI-ANENS . STATVS . ET . EXEP.CITVVM
THESAVRARIVS . GENERALIS . AD . PERPETVAM . A1IORIS
MEMORIAM . PONI . IVSSIT
<— «( io4 )»-*
2.°
CAROLO • FRANCISCO • AIROLDO
VTR1VSQUE . SIGNATVRAE . PRAESVLI
ARCKIEPISCOPO . SIDENSI . IN . ROMANA . DITIONE
PLVRIUM . VRBIVM . REGIMINE
ALUSQVE . APOSTOLICIS . MVNERIBVS . INTECERRIME . FVNCTO
PARIFATORVM . ACERBITATE . GRADIBTS
AD . AMPLISSIMA . INTERCEPT1S
DIEM . SVPREMVM . MEDIOLANI . OBEVNTI
DON . MARCELLINVS . LEVCI . CONES
CESARII . REG . AERARII . PRAEFECTVS . GENERALIS
ET . ALPHONSVS . HVJVS . METROPOLITANAE
CANONICVS . ORDIRARIVS . MOFSTISSIMI . FRATES
AD . COMMVNIS . PATRVI . SEPVLCRV31
TVMVLATO . MONVIWENTVM . P . P
DIE . OBITVS . SEXTO . IDVS . JVLIIS
ÀNN . SAL . MDCCXXVI . AETATIS . L.
Les deux candélabres de brouze que l'on voit or-
dinairement aux jours de fête , méritent l'attention des
curieux par la beauté du travail , et par la quantité
de petites figures mêlées parmi les ornemens décou-
pés, et à jour, un peu confus, mais exécutés avec
légèreté. Le dessin des petites figures est d'un joli ca-
ractère,
Auprès de celte chapelle est une porte ornée de
colonnes d'ordre jonique en marbre , qui conduit à
«ne galerie souteraine servant de passage pour aller
au palais de l'Archevêque. C'est par là que ce Prélat
vient à l'église. Ou a pratiqué celte galerie de manière
qu'elle puisse recevoir la lumière du dehors au moyen
de grilles de fer sur les côtés. Une inscription placée
audessus de la porte extérieure défend sou entrée aux
femmes. Nous ne savons pas si cette prohibition à été
respectée pendant longtemps, mais elle est tombée en
désuétude , car on y voit circuler tous les jours quan-
tité de femmes de même que les hommes, ce passage
donnant lieu d'épargner un détour assez considérable
pour aller de cette église à la place Fontaine et au
marché principal. On pourra voir ici une idée du talent
des peiutres qui ont fait les vitraux. La fenêtre au-
dessus de la porte intérieure à l'église étant bien con-
servée, on y voit une quantité de têtes d'un beau
dessin, des parties d'architecture, et même des pay-
sages d'un très-bon goût. Quant à la beauté des cou-
leurs elle n'a plus rien qui doive nous étonner , ou
sait que les émaux transparens ont cette qualité bril-
lante, surtout lorsque la lumière se diffuse au travers.
Ainsi le mérite de ces vitraux est plus dans le dessin
et l'heureux assemblage des couleurs, que dans leur
vivacité et leur éclat.
La chapelle suivante de cette partie de la croisée
est dédiée à la Vierge, et en même teins aux SS. Mar-
tin , Georges et S.e Catherine. L'ordounance d'archi-
tecture ressemble à celle des premières chapelles déjà
décrites, avec cette différence, qu'à celle-ci il y a
deux très jolis bas-reliefs dans le piédestal des colon-
*-«( 106 )»-*
nés, mais ils ont clé malheureusement fuit mutilés. Ou
voit à la Planclie XXV le bas-relief qui sert de ta-
bleau à l'autel. Il est en marbre blanc et fut sculpté
en i5io par Augustin Busti, appelé par quelques-uns
le Bustino , et par d'autres le Bambaja , il représente
la présentation de la Vierge au temple. Du même au-
teur sont les deux petits bas-reliefs cités , dont l'un
représente la naissance de la Vierge et l'autre son
mariage. Ou admirera sans doute la composition du
grand bas-relief, hors le reproche qu'on pourrait faire
à l'artiste d'avoir donné trop de longueur à ses figu-
res en comparaison des têtes , mais le caractère de
celles-ci est d'un beau goût, plus qu'on ne pourrait
l'attendre de ces tems , de même les draperies ; on y
trouve un style noble et vrai qui semble plutôt appar-
tenir aux siècles ou florissait l'art.
Le grand prêtre surtout réunit ces deux beautés.
11 nous semble presque impossible cependant en exa-
minant cette sculpture , que la même imagination ait
conçu la petite figure de la Vierge placée au bas des
degrés du temple. On ne saurait distinguer par les
formes , par l'habillement, par l'air de tête à quel sexe
appartient celte figure, qui n'a aucune idée de gi a-
ce, et on peut encore moins concevoir pourquoi le
sculpteur lui a tourné le visage dessus l'épaule gauebe
où elle ne regarde personne, lorsque la pose naturel-
le , et qui était dans la vérité, devait lui fixer les re-
gards sur le grand prêtre inspiré , qui va la recevoir.
La décoration d'arebiteelure de ce tableau est parfai-
tement bien entendue , l'effet de perspective plein
d'intelligence et en général l'exécution annonce un ci-
seau délicat et assuré. Le spectateur peut en jouir
avec d'autant plus de plaisir que la lumière tombe
bien sur ce morceau à toutes les heures du jour.
Des deux figures de ronde bosse qui sont entre les
colonnes, on distingue celle de S.e Catherine, ouvrage
de Cristopbe Lombardo.
Cette cbapelle a été construite aux dépens d'un
Clianoiue de cette Cathédrale, Jean-André Viraercali ,
dont on voit le portrait dans le petit monument en
marbre qui est à la gauche de l'autel. Le buste du do-
nateur, tenant un livre à la main sur lequel sont
écrites ces paroles: Fortitudo mea Deus et adjutor ,
est au haut dans une petite niche. Au dessous on
lit cette inscription.
10 • ANDREAS • VICOMERCATVS
PROTONOT . APOSTOL1CVS
AC . HVIVS . SANOTAE . ECCLES1AE . ORDINARIVS
SAEPE . COG1TANS . SE . MORITVRVM
ROC . TERRAE . SYI . CORPORIS . POSVIT
ALTAREQVE . HOC . DOTAVIT . ET . ANCONAM . F . F
PASSVSQVE . VARIOS . LAB0I ES . SVB . ALEX . VI
ET . SEQVENTIDVS . SVMMIS . PONTIFICIBVS
VSQVE . AD . FAVLVM . III
SICVTI . SEMPER . RECTE . VIXIT
ITA . REUGIOSE . OB1IT . ANNO . DOMINI . MDXI.VIII
DIE . XU . MARTII . AETAT1S . SVAE
A» . LXXVX1I
Dans un bas-relief est représenté J. C. souffrant,
soutenu par deux anges. Le travail en est délicai. La
tête du Christ a de l'expression. Enfin le monument
se termine eu bas par deux têtes qui sont les portraits
16
*-c( (oS )a-»
du père et de l'oncle du Chauoiue, avec celte in-
scription.
PHILIPPO . PATRI . ANNOR . LXXVIU
OB11T . ANN . MCCCCLXXXIV
ET . KICOLAE . PATRVO . ANNOR . LXXIV
QVI . OBIIT . ANN . MCCCCLXXXXII
VIRIS . FRVGI . ET . INTEGR1TATE . PARIS
IO . ANDREAS . VICOMERCATVS . POSVlT
On attribue cette sculpture à Busti ou Bambaja (i).
( v. PL XXVI. )
Entre ces deux autels est suspendu un tableau d'Her-
cule Procacciui, peint à la gouache, représentant le
martyre de S.e Apolonie. Cette peinture qui a con-
sidérablement souffert du tems , a été donnée à l'é-
glise par des personnes pieuses en 162 5 , et fut con-
sidérée comme un objet d'une dévotion particulière.
Ou y voit suspendues des petites plaques en argent,
qui en Italie sont fréquemment appliqués à des ta-
bleaux, à des statues de saints, ou à des images sa-
crées, pour lesquelles on a conçu une vénération par-
ticulière. Ou ne saurait approuver cet usage de percer
des tableaux pour y attacher ces plaques, des colliers,
ou des couronnes sur les têtes des figures, ce qui
(1) Cet artiste distingué fut nommé sculpteur attaché aux tra-
vaux de la Cathédrale en 1 55^ , et il l'enrichit de ses ouvrages
jusqu'à l'époque de sa moit en i548.
*-c( iog )»-»
est un préjudice remarquable aux productions de l'art,
quelque fois même à des peintures de grand mérite
qu'on devrait conserver avec le plus grand soin. Cela
surprend d'aulant plus dans un pays qui a toujours
été le berceau des beaux-arts et qui se vante d'en
donner des leçons au monde entier.
Après avoir admiré l'élégance du travail du bas-relief
delà présentation au temple, l'amateur ne pourra voir
avec le même plaisir celui de la chapelle suivante, dé-
diée à S.e Agnèse. Il le trouvera lourd, d'un style
trivial et sûrement il regrettera, de ne pas, voir à sa
place le tableau de Hercule Procaccini réprésentant
également le martyre de la sainte, qui ornait la cha-
pelle avant cette très-médiocre sculpture de Charles
Baretta, qui lui fut cependant payée i2,5oo liv. Ce
tableau s'est perdu. Les deux figures eutre les colon-
nes sont S. Satyre par André Biffi , d'après le modèle
de François Brambilla, la seconde S. Ambroise , par le
célèbre peintre Jules César Procaccini, qui savait aussi
habilement manier le ciseau de statuaire que le pinceau.
Devant celte chapelle est la sépulture de l'Archevêque
Gaspard Viscouti , successeur immédiat de S. Charles:
on lit sur la pierre qui le couvre l'inscription suivante i
*-e( l I O )s— »
GASPARI • VICECOMITT
MEDIOL . ARCHIF.PISCOPO
QVl . ADVLTA . VIX . AETATE
PVBLICIS . PRAECLAIUSQVE . MVNERIBVS . SVMMA
CVM . LAVDE . PEKFVNCTVS . IAM . MATVRA
NOVARIEN . EPISCOPVS . A . GREGORIO . XIII
DESIGNATVS . MOX . IN . CAROLI . CARD . BORROMAEI
DEMORTVI . LOCVM . SVFFECTVS . ECCLESIAM . MEDIOLANENS
ANN . X . PIE . RECTEQVE . ANMINlSTRAVIT
OBIIT . ANNO . AETATIS . SVAE . LVHI
PRID . ID . JANVAR . MDXCV
XENODOCHII . MAJORIS . HVJVS . VRB1S
PRAEFECTI . HAEHEDES . P . P
On passe ensuite dans la nef qui fait le tour der-
rière le choeur et ou y trouve d'abord, en suivant le
mur de la clôture, un marbre noir sur lequel la reco-
naissance de l'administration a fait graver le souvenir ,
qu'elle a voulu conserver, à Jean Pierre Carcano , bour-
geois de Milan, qui légua par son testament une somme
de 2 00,000 écus d'or à cette Cathédrale pour la con-
struction de la façade. Il assigna également uue somme
considérable pour l'édifice du graud hôpital et fil de
plus une donation pour un couvent de religieuses ,
suivant l'usage de ces tems. L'inscription en lettres
dorées est la suivante :
«— œ( III Jm~*
EEIGEKDAE . TEMPL1 . HVJVS . IRONT!
ATQVE . ORNANDAE
IO . PETRVS . CARCANVS . MEDIOLANENSIS
CCXXX . AVREORVM . M1LLIV
LEGAV1T
FABRICAE . CVRATORES
PIO . ET . MVNIFICO . V1RO
EX . TESTAMENTO . P . P
La position des objets que nous allons avoir à
nommer n'est pas favorable, parce qu'ils se trouvent
opposés à une lumière déjà très-faible, étant diffuse
au travers des vitraux peints; il est donc fort difficile
de pouvoir remarquer les beautés de quelques-uns de
ces monumens anciens. C'est ce qui nous a détermi-
nés à faire dessiner ceux qui méritent de fixer les re-
gards des amateurs et des curieux , nous nous conten-
terons d'indiquer les autres en passant devant eux,
et suivant notre méthode , de les juger avec impartia-
lité , quelque soit l'opinion générale à leur égard.
La Planche XXV11 représente la porte de la Sacris-
tie des Chanoines, communément appelée la sacris-
tie méridionale. Le couronnement est bien absolument
dans le style appelé gothique. De nés jolis détails,
soit dans les ornemens, soit daus les petites figures
et dans les bas-reliefs, contrastent cependant avec l'en-
semble, dont le goût, surtout par rapport à ces deux
aiguilles pyramidales, pourrait être meilleur. Ou attri-
bue cet ouvrage à Pierre Grassi en i5g5.
On conservait dans celle sacristie un riche trésor,
mais les matières d'or et d'argent qui le composaient
ont été converties en monnaie à une époque de be-
soins pour l'état. Peut être aurail-on à y regretter des
•«-«( I l 2 ja— »
objets estimables sous !e rapport de l'art. On tient à
présent renfermés dans de grandes armoires quelques
morceaux qui peuvent fixer l'attentiou des curieux:
nous ne parlerons que de ceux-ci ; les uns sont pré-
cieux par leur antiquité , d'autres par la beauté du tra-
vail. Nous commencerons par les deux statues de gran-
deur naturelle en argent, représentans S. Charles Borro-
jnée et S. Ambroise, revêtus d'habits pontificaux, et
ornés de pierres précieuses. La bordure de la chope
de S. Ambroise est décorée par de petits ovales isolés,
dans lesquels sont représentés quelques actions de sa
vie. Son bâton pastoral a au sommet six petites niches
qui contiennent chacune une jolie figure, exécutées par
Charles Grossi, tandis que la figure entière du saint
est un ouvrage fait au marteau par l'orfèvre Policarpe
Sparolctti. Elle est estimée du poids de 2000 onces; on
lit l'inscription suivante sur la base du piédestal :
DOSO • CIVITATIS . MEDIOLANl
ET . PU . EIVSDEM
AC . CIV1VM . LIBERAL1TATE
ANNO . MDLXXXXVIII
ce qui rappelle la donation que la ville de Milan fit
de cette statue à la Cathédrale en 1698.
La statue de S. Charles a été exécutée , comme la
précédente , par François Vertova ; ce fut aussi un
présent fait par les orfèvres de la ville , comme l'in-
dique son inscription gravée sur le piédestai
MVNVS . VNIVERSITAT1S
AVRIFICIVM . MEDIOLANl
DIE . IV . NOVEMB . MDCX (l)
(1) Ou place ces statues sur le inaiue-autel les jours de gra-u-
ile= lèles.
<— s( 1 1 5 )»->
Le tableau qui est dessus cette armoire , peint par
Jean-Baptiste Crespi dit le Cerano, représente S. Char-
les bénissant les croix. Dans l'armoire à gauche est un
livre d'évangiles dont on se sert dans les grandes so-
lennités; son couvercle est formé de lames d'argent
dorées et émaillées, mais les figures ciselées annoncent
le dépérissement de l'art dans le siècle où cet ouvrage
fut fait. On prétend que ce fut un présent de l'Ar-
chevêque Eribert qui date de l'année 1018.
Les autres objets remarquables sont:
Deux grands dittiques qui ont servi de couvercle,
à quelque livre d'évangile. Les figures sont d'un meil-
leur dessin qu'on ne les voit dans la plupart de ces
ouvrages.
Un seau en ivoire , autour duquel sout sculptés les
quatre ÉvaDgélisles , et un bas-relief qui repiésente
la Vierge avec l'enfant, environné de deux anges. La
légende est en caractères appelés gothiques; le man-
che est d'argent doré.
Un livre d'évangile avec un couvercle orné de ci-
selures en or, garni de perles et de pierreries.
Un calice, dont le pied est de cuivre doré: son
vase est d'ivoire taillé en forme de certaines coquilles ,-
on voit autour neuf petits groupes de figures, dont
les têtes sont fort jolies.
Un autre calice en or, orné de petits bas-reliefs de
figures , de petits anges , d'un goût et d'un travail
très-délicat et qui mérite l'attention des curieux.
Un paix en or ciselée, qu'on attribue à Caradosso,
milanais , qui se distingua dans cet art vers le XVI
sièrle. Le fond est formé par une pierre appelée
Phasma sur laquelle est fixée une croix formée par
+—et( 1 1 /j. )»— *
douze diamans. Deux petites colonnes de lapislazuli
soutiennent un fronton triangulaire ; l'artiste a in-
crusté dans les bases des colonnes deux jolis camés. Dans
ce morceau la matière et les pierreries ne sont pas
le principal objet, c'est le talent de l'artiste qui lui
donue du prix. La composition , le travail et l'expres-
sion qu'on remarque dans les plus petites têtes justi-
fient la célébrité, dont on dit que jouit pendant sa vie
l'auteur de cet ouvrage. Le groupe principal repré-
sente la déposition de Jésus de la croix. Le Père éter-
nel est au dessus, soutenu par trois chérubins; d'autres
anges dans des attitudes agréablement variées enrichis-
sent cette composition. Ce bijou a été donné à la
Cbatédrale par le Pape Pie IV; on y voit ses armes.
Une autre paix en cristal de roche, sur lequel on a
gravé en creux la Vierge au pied de la croix. L'artiste
ayant appliqué derrière une feuille d'or, l'effet qu'elle
produit fait croire que le travail soit en relief, ciselé
sur ce métal et que l'on ait recouvert d'uu cristal.
Dans l'armoire suivante sont lenfermés, une grande
croix et des chandeliers d'argent, qu'on place sur le
maître-autel les jours de grandes fêtes; les figures en
relief au bas de la croix sont d'un bon goût. Les chan-
deliers ne sont pas aussi riches en ciselure.
On y montre une broderie sur une étoffe d'or, exé-
cutée par Louise Pellegrini, brodeuse renommée dans
son tems. Le sujet est la nativité de la Vierge; c'est
un don de S. Charles Borromée.
Une tapisserie soie et or , encadrée comme un ta-
bleau , représentant l'adoration des trois mages. On
prétend qu'elle a été exécutée d'après un dessin de
Raphaël d'Urbin , mais il est plus probable que ce fut.
d'après un dessin de quelqu'un de ses élèves.
<— <e( I 1 O Jb->
On voit aussi une statue représentant Jésus attaché à
la colonne, qu'un prétend sculptée par Cristopbe Solari ,
dit il gobbo (le bossu), mais d'après le mérite des au-
tres ouvrages de cet artiste, on serait loin de lui attribuer
ce morceau. Nous préférons de fixer les regards de l'a-
mateur en sortant de la sacristie, sur une niche en mar-
bre , ornée de rinceaux eu style gotbique , à la vérité
d'un goût un peu grotesque et incorrect, comme le sont.
la plupart des ouvrages de ce genre, mais le bas-relief
qui y est enfermé et qui doit avoir été exécuté par une
autre main, annonce pour ce tems , un talent qui mérite
quelques éloges. Le sujet est Jésus avec la Samaritaine.
En sortant de la sacristie, et prenant à la droite
pour achever le tour de l'église, ou trouve une effigie
de la Vierge dite del Parto (des accouchemens ). Ce
tableau est plutôt un sujet de dévotion pour les fem-
mes qui l'invoquent, et dont le nombre y est quelque
fois assez considérable , plutôt qu'un objet qui puisse
arrêter l'amateur des arts.
Nous avons déjà dit que le maître-autel de cette
église avait été consacré par un Pape: un monument
élevé à l'honneur de ce poutife eu perpétue ici la mé-
moire. C'est la statue de Martin V, qui est malheureuse-
ment placée dans un lieu trop obscur pour qu'on puisse
en apprécier la beauté ( v. PI. XXY1II ). Elle fut or-
donnée par le duc Philippe Marie Visconti à Jacques
de Tradate, sculpteur milanais. Le Pontife est repré-
senté en habits sacerdotaux et donnant la bénédiction ;
il est placé sur une base ou console saillante hors du
mur , et enrichie de quantité de petites figures d'une
jolie exécution. Nous rapportons la longue inscription
qui est au bas de la statue, mais dont on se saurait
approuver le style fastueux et trop exagéré. i 7
<-e( I lO )&-+
CERNE . VIATOR • AVE . HIC . STAT . IMAGO . SIMILLIMA . PAPAE
QVI . BOSVS . ECCLESIAM . MARTINVS . IN . ORDINE . QVINTVS
PASTOR . AI.1T TIBI . ROMA . TVA . TIBI . GLORIA . GENTIS
QVAM .PARIT . ALTA.DOMVS. CELEBRAT A . COLVMNA . PEU . ORBFM
MVNDVS . ERAT . LONGO . ECCLESîAE . VEXATVS . IN . AHMOS
SCISMATE . CONCILIVM . CONSTANTiA . FIRviAT . ET . ECCE
ODDO . COLVMNA . POTENS . MAGNO . DE . CARDIN E . SVMMVS
PRAESVL . HIC . EL1GITVR . MERITO . VELVT . ANTE . CREA I OR
SVRGENTEM . ECCLESlAM . SVPER . ALTA . CACVMINA . PFTRE
MOX . VOLVIT . FVNDARE . SVAM . SIC . PESTE . CADENTEM
SCISMATIS . AC . F1RMA . STATVIT . STABILIRE .COLVMNA
HIC . REPETENS . PRIME . SVA . SANCTA . PALATIA . ROMAE
HANC . PR1VS . AMPLIFICAM . QVAE . ROMA . SECVNDA . VOCATVR
VRBEM . ADIT . HOD . ALTARE . SACRAT . CELEBRAT . QVOQ MISSAM
PRIMVS . ET . HIC . VENIAS . GRANDES . MIRASQVE . S ALVTIS
PRO . FABRICA . ECCLESIAE . BONA . DAKT1BVS . ADDIT . HABENDAS
PRAESERT1M . ALMIF1CI . CVM . FESTA . DICATIO . TEMPLI
VENERIT . ATQVE . DIE . PRAESTANTE . SEQVENTEQ . FESTVM
ISTA . DVCE . ANGVIGERO • LIGVRVM . REGNANTE . PHILIPPO
IMPERIOSO . ITALIS . PER . JVSTAQVE . EELLA . TREMENDO
MILLE . QVATERCEKTVM . OCTAVO . DECIMOQVE . SVB . ANNIS
ET . SEXTO . DECIMOQVE . DIE . TVM . OCTOBRIS . EVNTIS
FACTA . COLENDA . MANENT . AD . HONOREM . VIRGINIS . ALMAE
CARMINIS . EST . BRIPIVS . JOSEPH . ORDINARIVS . AVCTOR
DOCTOR . CANOMCI . JVRIS . SACRAEQVE . MAGISTER
THEOLOGIAE . AST . HIC . PRAESTANTIS . IMAGINIS . AVCTOR
DE . TRADATE . FVIT . JACOBINVS . IN . AHTE . PROFVNDVS
NEC . PRAXITELE . MINOR . SED . MAJOR (l) . FARIER . AVXtM
T h oma s de Ca p o na g o scvipsit.
(i) Pcul-on paidonner cela à l'auteur?
*-«( l I 7 )»-»
On lit dans une autre inscription , placée au des-
sous de celle-ci, l'éloge de Nicolas et François Picci-
nino, père et fils, capitaines distingués dans le X\e siè-
cle, et qui furent réunis dans le même tombeau. Cette
inscription est gravée en caraclèies appelés gothiques.
QVT AD HANC DEI GEN1TCIS ARA PRO EFFVNDENDA PCE ACCESS1STÎ
N1COLAVS - OB CORPGR1S BREV1TATE COGMCTO P1Z1N1N TE ORAT,
PHIUPP MARIA L1GVR 1PATO — Q ME TOT] EXC1T PFECTV COST1TVERAT
VT VNS1S LABOR1B AC F1DEI 1LLIBAT.E S1B1 PER ME - PREST1TAE
GRATIAM REDDERET HOC IN LOCO DONEC SOLEMNI PYRAMIDE
CONSTRVCTA — IN ALTVM PROFERRET CORP VS MEV HYMAR1 MANDAV1T .
PYRAMIDAE APVD AREORIS — ARA 1BCHOATA 1MPATORE AD SVPOS
ELATO DEMV DESTRVCTA VNA CVM FRACJSCO — F1L10 EXERC1T
MEOIOLAN VN1CO DVCE 1VXTA ME POSITO OBL1V10NI TRADITI SVMVS
- MISERERE NOSTRI . MCC.CCXLIUI . DIE XVI OCT . PATER . MCCCCSLV11IÎ
DIE XVI . OCT FIL1 OBI
Le tombeau en marbre noir qu'on voit ensuite est
celui du Cardinal Marino Caracciolo napoliiain , qui
fut nommé gouverneur de Milan en i555, et qui y
mourut en 1 538. Le monument est de bon goût. Le
Cardinal est représenté en habits pontificaux , couché
sur la chasse du tombeau ; celte figure ainsi que les
petites statues qui l'entourent , sont en marbre blanc»
Celles du Sauveur, de S. Pierre et de S. Paul placées
dans des petites niches au milieu , celles de S. Jé-
rôme et de S, Ambroise aux deux côtés, ont été seul-
«— &r 1 1 8 js— »
ptées par Augustin Busti. Elles sont d'un bon style ,
les draperies sont d'un goût qui s'approche de l'anti-
que pour la simplicité et la vérité des mouvemens.
Au haut est représentée la Vierge tenant l'enfant Jésus.
On lit sur la base de l'urne sépulcrale l'inscription
suivante.
MAR1NO • CARACCIOLO
NEAPOL . ILLVSTRI . GENERE . ORTO
QVI • PLVRIMIS . PRO . PONTIF . CAES
Q . FVNCTVS . EST . LEGATIONIBVS . PRIMAM . CAROLO . V
IMP . AD . AQVASGRANI . CORONAM . IMPOSVIT
ANGLOS . El . CON1VNX1T . ET . VENETOS . AC
DEMVM . A . PAVLO . III . PONT . MAX . IN
CARDINALIVM • COOPTATV5 . ORDINEM . DVM
PROVINCIAM . MEDIOL . AB . EODEM . CAROLO
SIEI . CREDITAM . REGERET . IMPORTVNA . MORTE
CVM . MAXIM A . REIP . CHRISTIANAE . JACTVRA . SVBLATVS
EST . V . CAL . FEBR . MDXXXVM . ANNOS
NATVS . LXIX
Io Baptjsta Fratrî OPT.
( v. PL XXIX )
On Voit au dessous de la première fenêtre un marbre
blanc qui annonce une production très-ancienne. 11 of-
fre un cercle, dans lequel sont huit rayous qu'on ap-
pelé Chrisma Sancti Ambrosii. C'est une abréviation
ou mono^rame du nom de J. C. formes des deux let-
tres de l'alphabet grec , la première et la dernière
alpha ed oméga, placées en croix. Elles siguifient en
latin principiwn et finis. Cet emblème se trouvait
souvent placé dans l'intérieur ou au dessus des portes
des plus anciennes églises catholiques, et les huit rayons
étaient regardés comme un symbole des huit béatitu-
des. Au dessous on lit l'inscription suivaute:
CIRCVLVS . HIC . SVMM1 . CONTINET . N0M1NA . REGIS
QVEM . SINE . PRINCIPIO . SINE . FINE . VIDES
PRINCIPIVM . CVM . FINE . T1BI . DENOTAT . A . ET . &
On ne manque pas à Milan d'inviter les étrangers,
qui vont admirer le Dôme, de voir derrière le choeur
la statue représentant S. Barthélémy écorché, et dont
la peau posée sur son corps, forme une espèce de dra-
perie (v. PI. XXX). Elle se trouve près de l'endroit
que nous venons d'indiquer , mais elle est désagréa-
blement éclairée, se trouvant au bas d'une grande
fenêtre. L'inscription qui est gravée sur le piédestal
semble vouloir fixer l'opinion sur le mérite de la sta-
tue , on y lit.
NON ME PRAX1TELES
SED M ARC V S FINXIT AGRATES.
Cependant elle est bien éloignée de mériter une
comparaison semblable. Si une pareille inscription a
pu en imposer au vulgaire et à plusieurs écrivaius
•hb( I 20 )s>-» .
même de nos tems , le vrai connaisseur s'appercevra
aisément de son exagération et du ridicule d'une pa-
reille apothéose. Il conviendra simplement avec nous ,
que cette statue à du mérite dans son exécution.
Elle était autrefois placée sur l'un des côtés du tem-
ple , on la transporta ensuite eu 1664 derrière le
choeur avec trois autres statues de Solari , de Bei-
landi, et de Siciliano , pour qu'on les vit plus com-
modément; de ces quatre statues il n'est resté que
celle-ci.
L'ancien has-relief en rnarhre hlanc qui se pré-
sente en poursuivant le tour, contient l'effigie de J. C.
à demi-corps avec deux anges qui soutiennent une
draperie. Cette sculpture , qui est un ohjet de vénéra-
tion pour les dévots , n'offre aucun mérite pour son
exécution.
On a placé sous la fenêtre du milieu une grands
inscription accompagnée latéralment de deux cariati-
des, l'une représente le Tems, l'autre l'Eternité (1)
et dans le haut est le huste de S. Charles Borro-
rnée dans une niche. Cette inscription rapppelle la
consécration du temple par S. Charles coninue il suit :
(1) Ou avait dessein d'élever dans celle église un monument à la
mémoire de l'arlhitecte Pellegrini, qui pendant dixneuf ans avait
emploie ses taïens et ses soins à la construction dé ce temple Le
sculpteur César Bosso fut chargé de cet ouvrage en 159-, el l'an-
née suivante André Bilfi et Antoine Daverio avaient sculptés cha-
cun un des termes. Cette entreprise, contrariée par les rivalités
et la jalousie fut abbandonnée, et les deux cariatides servueut a
cetts iascriplioat
<-e( I 3 I )»— ►
SANCTO • CAROLO • BORROMAEO
CAfiDlNALl . ARCHIEP1SCOPO . MEDIOLANI
QVI . TOST . DEDICATVM . A . MARTINO . V
ALTARE . MAXIMVM . TOTVM . TEMI>LVM
SX . OCTOBRIS . MDLXXVII . SOLEMNI . RITV • CONSECRAVIT
AC . TERTIO . QVOQVE . MENSIS . E1VSDEM . DOMINICO
DIE . HVIVS . CONSECRATIONS . MEMORIAM . FIERl
MANDAVIT . AMPLISSIMAEQVE . MVNVS . INDVLGENTIAE
TEMPLVM - HOC . EO . DIE . RITE . V1SENTIBVS
IMPETRAVIT . FABRICAE . PRAEFECTI
ANNO . MDCXI . P
Une liste considérable de reliques et de corps saints,
que renferme ce temple, est gravée sur deux tables
aux côtés de l'inscription précédente ( v. PI. XXXII ).
Mais ici les amateurs des monumens gothiques doi-
vent s'arrêter pour admirer d'abord la grandeur ( cha-
cuneé tant de 29 mètres 760e- de haut, et i5 mètres
470e- de large) ensuite les ornemens et entrelas, d'une
heureuse et riche composition , qui forment les trois
grandes fenêtres du chevet de l'église. Le dessin de
ces fenêtres est attribué à INicolas Bonaventure , archi-
tecte parisien, mais cet artiste étant retourné en France
vers l'an i3gi on chargea de leur exécution Marc de
Campione (1). Les vitraux, quoique restaurés de piè-
(1) Ce dernier nom est, suivant l'usage de ces tems , celui de
l'endroit de la naissance de l'artiste, qui est un village au bord du
lac de Lugano. Nous ne saurions nous refuser de remarquer , que
les villages et les hameaux e'pars sur les montagnes ou prés du
lac de Lugano, dans la Suisse italienne, ont produit depuis bien
des siècles une quantité d'architectes, de sculpteurs et d'habiles mar-
<-<k( 122 )&-»
ces et de morceaux qui correspondent peu aux ta-
bleaux, présentent cependant des fragmens admira-
Lies d'un bon dessin. Les sujets sont tirés de l'ancien
et du nouveau testament (i) ( v. PI. XXXI ). Pour
jouir de l'effet des roses qui terminent ces feuèires
à la partie supérieure , il faut les voir de loin , éclai-
rées par le soleil -y ce sont autant de feux de cou-
leurs vives dont on a peine à supporter l'éclat. De
près on ne se doute pas d'une pareille Leauté, parce
que l'on n'apperçoit que les pierres découpées.
Six tableaux de marbre noir sont incrustés dans le
mur au dessous des fenêtres ; ils contiennent les noms
de personnages distingués par leur naissance , et de
quelques membres des anciennes familles des Ducs de
Milan. Leurs corps étaient enfermés dans des cercueils
de bois recouverts de diverses étoffes ricbes, et on les
tenait suspendus entre les colonnes par des chaînes
de fer. S. Charles , ayant d'après les décisions du
concile de Trente, fait enlever tous les ossemens qui
n'étaient pas reconnus appartenir à des êtres qui étaient
inscrits dans les légendes de l'église , débarassa ainsi
la Cathédrale de cet amas de boites , offrant un triste
et sale spectale par la vétusté des étoffes qui devaient
tomber en lambeaux. Nous nous bornerons à rapportes;
les noms de ceux qui sont inscrits sur ces marbre.
briers , qui se sont répandus non seulement en Italie, mais qu'on
rencontre encore dans toutes les parties de l'Europe. Il y eut en
tous les tems parmi eux des talens distingués et plusieurs d'un génie
extraordinaire, et nous citerons au nombre des vivans les Alber-
tuli , les Rusca , les Blanchi , les Marchesi etc. qui honorent l'art
le siècle présent.
(1) Ces ieucires avec les vitraux ont coûié 7170 ecus
»-e( 12 3 )»-*
Polydore Sforza , fils de François Sforce , vécut 23
ans, mort le 10 mars 1 47 5.
Elise Sforza, fille de François, veuve de Jean-
Baptiste Visfonti, vécut 16 ans, morte le 3o juin 1 4-7 i5
lors qu'elle allait passer à de secondes noces.
Conrad , homme d'état distingué , intrépide militaire,
vécut 60 ans, mort le 23 décembre i47°-
Bosio de la famille des Sforce, illustre guerrier, vé-
cut G5 ans, mort le 14 mars 1 4t^-
Léonard, crée Protonotaire par François Sforce,
mort le 18 sept. 1484.
Lucie, femme de François Sforce, morte le 21
janvier i45o (1).
Sur le mur est un grand tableau couvert de petits
canaux de verre pour le conserver ou le défendre
de la poussière. Ce tableau provient d'une ancienne
église dédiée a S. Ibècle qui fut démolie pendant la
construction de la Cathédrale; on n'y voit qu'une
tête de J. C. , très-médiocre et autour des têtes de
chérubins non meilleurs.
Nous arrivons maintenant à un tombeau en marbre
rouge soutenu par deux colonnes à une certaine hau-
teur, ce qui est assez commun pour de pareils mo-
(1) En outre des personnes indiques sur ces maibres , les cer-
cueils dont nous avons parle' qui étaient suspendus renfermaient
les corps de Jean Marie et de Philippe Marie Visconti , fils du
premier Duc Jean Galéas. François Sfurce I et son épouse Rl.in-
che Mme; Jean Galéas II, leur fils tué dans l'église de S. Enenne
en 1477 pat des conspirateurs pendant l'office divin; Maximilien
et François II dernier Duc de celte famille 7 ainsi que plusieurs
gouverneurs de Milan.
18
<-e) t 2 f\. )»-».
mimens élevés dans les tems ou le gothique était eu
laveur. Là reposeut les cendres de Othon et de Jean
Visconti , oucle et neveu , tous deux Archevêques et
seigneurs de Milan , morts dans cette ville , le pre-
mier en i ag5 et le second en 1 354- Ce mausolée qui
existait dans l'ancienne église Métropolitaine d'où il fut
transporté ici en i4-Oi, n'offre rien de pompeux ni
de remarquable sous le rapport de l'art , il est cepen-
dant d'un meilleur goût que ceux de ce genre en
pareille époque. Ce qui le recomande ce sont les noms
de ces deux prélats illustres et puissans dont le pre-
mier eut le surnom de Grand. La figure de cet Othon
est sculptée eu habits pontificaux sur le couvercle du
tombeau, ce qui ne peut se remarquer à la vue a cause
de la hauteur où elle est placée (1). Aux deux extré-
mités sont deux petites têtes qu'on croit représenter
Mathieu et Hubert Visconti ses antres neveux, et qu'on
voit assez bizareraent posées. Aux quatre augles sont
les symboles des quatre Evangelistes ( v. PI. XXX11I ).
On dit que ce monument est un acte de reconais-
sance de l'ordre de Malthe qu'Othon institua sou hé-
ritier. Ou lit sur le tombeau deux inscriptions: celle
du côté célèbre les vertus de l'Archevêque Othon , et
sur celle en face on parle des faits de Jean , qui vo-
lut être réuni à son oncle dans le même tombeau,
L'inscription de face est la suivante:
(i) Le dessinateur l'a relevée pour en donner la représentation,
car elle est posée horizontalement.
QVAM . FASTVS . QVAM . POMPA . LEVIS . QVAM . GLORIA . MVKDI
S1T . BRK.VIS . ET . FRAGILIS . HVMANA . POTENTIA . QVAM . SlT
COLIGE . AB . EXEMPLO . QVI . TRANSIS . PERLEGE . D1FER
IN . SPECVLO . SPECVLARE . MEO . LACR;MAEILE . CARMEN
QVI • SIM . QVI . KVERIM . DICET . QVI . MARMORE . CLAVDOR
SANGV1NE . CLARVS . ERAM . VIC1COMES • STIRrE . ÎOANNFS
NUMINF. . NVLI-VS . OPES . POSSEDIT . LATIVS . ORBE
PRAESVL . ERAM . PASTORQVE . FVI . BACVLVMQ . TFNEBAT
DEXTERA . PASTOKIS . GLADIVMQ . SINISTRA . GFREBAT
FELICIS . DOMINI . MAGNVSQ . POTENSQ . TYRAMPN
IPSE . FVI . V1VENS . METVERVNT . NOM1NA . NOSTRA
AETHERA . TERRA . MARE . SVBERANT . VRBESQ POTENTES
lMP:RIO . TITVLOQ . MEO . MICHI . MIDIOLANI
VRBS . SVBERAT . L .VDENSE . SOLYM . PLACENTIA . GRATA
AV REA . PARMA . EONA . BOKONIA . PVLCRA . CREMuNA
BERGAMA . MAGNA . SATIS . LAPIDOSIS . MONTIBVS . J- VCTA
BRIXiA . MAGNIPOTENS . BOB1ENSIS . TFRRA . TR1BVSQ
EXI IIS ■ DOT ATA . BONIS . TERDoNA . VOCATA
CVMARVM . T LLVS . NOVAQ . ALEXANDRIA . PIKGVIS
ET . VERCELLARUM . TERRA . ATQ . NOVARIA . EA . ALBA
AST . QVOQVE . CVM . CASTRIS . PEDEMONTIS . JVSSA . SVEIBAT
JANVA . QVAE . A TIQVO . QVONDAM . IAM . CONDITA . TANO
DICITVR . ET . VASTI . NARRATVR ■ 1ANVA . MVNDI
ET . SAVONENSIS . VRBS . ET . LOCA . PI.YRIMA . QVAE . NVNC
DIFFICILE . EST . NARRARE . MICHI . MEA . IVSSA . SVBlBANT
TVSCIA . TOTA . MEVM . METVEBAT . LANGVIDA . NOMEN
PER . ME . OBSESSA . FV1T . TOPVLO . FLORENTIA . PLFNA
BELLAQVE . SVSTINV1T . TELLVS . PERVSINA . SVPFRBA
ET . PISE . ET . SENE . TIM1DVM . REVER NTER . HONOREM
PRAESTABANT . ME . ME . METVEBAT . MARCHIA . TOI A
ITALIAE . TARTES . OMNES . T1MVERE . ÎOANNEM
NVNC . ME . PETRA . TENET . SAXOQVE . INCLVDOR . IN . 1STO
ET . LACERVM . VERMES . LANIANT . NVNC . VNDIQVE . CORPVS
QVID . MICHI . DIVITlAE . QV1D . LATA . PALATIA . PROSVNT
CVM . MICHI . SVFFICIAT . P RVO . QVOD . MARMORE . CLAVDAR
jjt ET . CLAVSI . DIEM . MEVM . MCCCLIV . DIE . V . OCT BRIS
DOM1NVS . GABRIVS . DE . ZAMOREIS . DE . PARMA . LEGVM
DOCTOR . COMPOSV1T . HAEC . CARMINA
<— e( 126 )»— >
celle du flanc
1NCLYTVS . ILLE . PATER . PATRIAE . LVX . GLORIA . PATRVM
FVLGOR . IVSTITIAE . FIDEI . RASIS . ARCHA . SOPHIAE
LARGITOR . VENIAE . PORTVS . PIETATIS . EGEN1S
1NTREP1DVS . PASTOR . QVEM . MOLFS . NVLLA . LABORVM
ARDVA . DEVICIT . POPVLO . LATVKA . QVIETEM
ILLE . P1VS . PRINCEPS . ET . PRAESVL . AMABILIS . IN . QVFM
ALTVS . VIRTVTVM . SPLENDOR . CONVENERAT . OMMS
QVO . MEDIOLANVM . RADIABAT . LAMPADE . TANTA
TOTAQVE . FVLGEBAT . REGIO . NVNC . PALLET . ADEMPTO
CLARA . VICECOM1TVM . PROLES . VENERAB1LIS . OTTO
OU . DOLOR . OH . VVLNVS . C1NIS . EST . HOC . MARMORE . FACTVS
CHRISTE . PATER . VITA . REQVIESCAT . SPIRITVS . IN . TE
ANNIS . VNDENIS . TER . SENIS . TERQVE . DIEBVS
PRAEFVIT . ECCLESIAE . PASTOR . BONVS . AMBROSIANAE
MILLE . DVCENTENO . QVINTO - NOVIESQVE . DECENO
QVARTO . HIC . AVGVSTI . BIS . LIQVIT . GAVDIA . MVNDI
La statue du Pape Pie IV, oncle maternel de S.
Charles Borromée est placée au dessus du monument
dont nons venons de parler. Celte figure eu habits
pontificaux, assise, est un excellent ouvrage en mar-
bre d'Ange Siciliano, artiste renommé dans son lemsj
elle repose sur une console qui lui sert de base , fort
riche de sculpture d'uu travail plein de goût et fini
précieusement: elle est de François Brambilla. Vasan
et d'autres écrivains ont vanté les deux anges et les
trois figures de fantaisie qui forment cette console ( v,
PI. XXXIV). Près du monument surmeutiouné on trouve
un petit autel en bois doré avec un tableau sur lequel
est représenté l'immage de la Vierge. Cette peinture
n'a rien de remarquable et prouve que souvent on a pro-
féré au bon goût dans les décorations des églises, des
objets désignés des dévots par une adoration particu-
lière. De pareils tableaux ou statues sont ordinairement
cbargés, comme nous avons déjà remarqué, de médailles
et de couronnes en argent, ornés de vases de fleurs,
et entourés de nombre de cbaudelles allumées , offran-
des des fidèles.
On arrive aussitôt à la porte de la sacristie septen-
trionale, aussi d'un style gothique assez riche d'orne-
mens en marbre, beaucoup moins cependant que celle
de la sacristie méridionale ( v. PI. XXXV ).
L'intérieur de cette sacristie n'offre rien de curieux,
sa boiserie est médiocrement ornée. On voit une sta-
tue de maibre représentant J. C. à la colonne, scul-
ptée par Antoine de Viggiù. On peut regretter le de-
terieurement des peintures de la voûte faites par Ca-
mille Procaccini en 1611. Parmi quelques tableaux
attachés aux murailles on distingue celui qui repré-
sente S.e Thècle au milieu des lions et aux serpeus ,
peint par Aurèle Luini. Il décorait autrefois un autel
dédié a cette sainte, duquel nous aurons bientôt oc-
casion de parler. Un escalier est placée dans un coin
de celte sacristie j elle conduit a des chambres supé-
rieures à l'usage des gardiens de l'église, et continue
ensuite jusqu'au sommet de l'édifice.
En sortant on trouve à la droite de la porte un
tombeau assez grand mais d'une construction simple.
C'est la sépulture de trois Archevêque de la famille
Arcimboldi, Jean Gui, Antoine et Jean-Ange. Cette
famille s'est éteinte en 1727. Les bustes de ces pré-
lats sout rangés sur la partie supérieure qui soutient
*-&
s( 128 )»->
le sarcophage; ces têtes sont bien modelées ( v. PI.
XXXVI ). Ou lit l'inscription suivante gravée dans la
base.
IOANNI . ARCIMBOLDO . PRESBYTERO . CARDINALI
AVO . PATERNO . LEGITIMO . ET
GVIDO . ANTONIO . ARCIMBOLDO . PATRVO MAGNO
ARCHIEPISCOPIS . MEDIOLANI . ET . SIBI
IOAN . ANGELVS . ARCIMBOLDVS . AB . EPISCOPATV . NOVARIENS!
CVI . XXIV . ANNOS . PRAEFVERAT .
AD . ARCHIEPISCOPATVM . MEDIOLANENSEM
V . F . IDEM . ANNOS . MXX . NATVS MORTEM
OBIIT . VIII . 1D . APRIL . MDLV
La première chapelle en tournant daus le bras de
la croix est dédiée à S.e Thècle. Un fronton brisé est
porté par deux anges qui paraissent le soutenir avec
effort. Ce n'est pas ainsi qu'on devait représenter des
esprits célestes , dont la puissance n'est pas compa-
rable aux forces humaines. A la place d'un tableau
d'Aurèle Luini, que nous avous remarqué daus la sa-
cristie précédente , on a placé un mauvais bas-relief
en marbre blanc de Charles Beretta , fait en 1764. Il
représente S.e Thècle au milieu de lions. Les statues,
qui décorent cette chapelle sont d'un meilleur ciseau
entre autres S.e Palagie par Pierre-Antoine Daverio.
Lorsqu'on eut démoli l'ancienne église de S.e Thècle on
transporta à la Cathédrale les prébendes qui y étaient
attachées , et on lui consacra alors cette chapelle.
Au pilastre voisin est suspendu un grand tableau re-
présentant l'annoncialion, présent de François de Mé-
dicis , grand Duc de Toscane à S. Charles Borromée.
Nous ne pouvons rien ajouter à la louange de l'auteur.
-*— «!
b
( i 29 )*"*
La chapflle suivante est dédiée a Se Praxède, dont
l'ordonnance d'architecture est d'un meilleur goût que
la chapelle précédente. L'autel était autrefois orné d'un
tableau d'Amhroise Figini, on l'a remplacé par un bas-
relief d'une heureuse et riche composition , ouvrage
de Marc-Antoine Prestinari. On y voit J. C. en croix,
a côté est une belle figure de la Vierge drapée avec
goût. L'attitude de S. Jean pourrait être mieux choi-
sie. La Madeleine au pied de la croix manque de grâce ,
les muscles de ses bras sont trop fortement pronon-
cées. Deux grandes figures a genoux sur le devaut ,
S.e Praxède et S. Charles en chappe sout d'un excel-
lent style et parfaitement drapés. On voit avec plaisir
le groupe d'anges eu adoration dans le haut. Les pe-
tites figures au sommet de cette chapelle sont agréa-
bles. La figure placée entre les colonnes est le père
de S.e Praxède, vêtu de la toge consulaire ; elle est
d'André Biffi ( v. PI. XXXVII).
Dans l'angle est pratiquée une petite porte qui con-
duit à l'escalier lequel sert à monter sur le dessus
de l'église. A côté de cette porte est placé un tom-
beau en marbre d'un dessin fort gracieux dans le style
gotique avec de jolies petites figures de ronde bosse
dans des niches. Ce monument fut exécuté dans le
XV siècle d'après le dessin de Philippe de Modène }
mais on ignore le nom du sculpteur. Les administra-
teurs de la Cathédrale ont voulu ainsi conserver à la
postérité la mémoire du bienfaiteur Marc Carelli, mort
en i5g4 laissant un don de 55,ooo ducats pour la
construction de cet édifice. Le sarcophage qui fut
placé eu cet endroit en i6o5 contieut les cendres
de ce géuérenx philautrope , dont la statue est repré-
semée étendue sur la chasse ( v. PI. XXXVIII ). On
regrette de voir un monument si remarquable rapport
à l'art et au souvenir d'un grand homme , à moitié
caché par un armoire. Il est probable que l'admini-
stration actuelle s'avvisera bientôt de soigner ce joli
monument d'une manière plus couvenable. Au dessus
on lit l'inscription suivante en lettres gothiques.
HAC . ADM'RANDA . MARCVS . REQVIESCIT . IN . ARCHA
QVI . DE . CARRELLIS . COGNOMINE . DICTVS . ERAT
HIC . TIBI . DEVOTVS . SANCTISSIMA . VIRGO . MARIA
PRO . FABR1CA . ECCLESIAE . MAXIMA . DONA . DEDIT
MILIA . NAM . PLVSQVAM . TRIGINTA . QVINQVE . DVCATVM
CONTVLIT . ERGO . ANIMAE . TV . MISERERE . SVAE
QVI . DOM1NVS . MARCVS . OBIIT . DIE .XVIII . SEPTEMBRIS . MCCCXCIV
Un autre marbre incrusté dans le mur, tout au-
piès, à été consacré à la mémoire du sculpteur Fran-
çois Brambilla, qui travailla pour cette église pendant
quarante ans; on y lit cette inscription.
D O • M
FRANCISCO . ERAMBILLAE . CELEBERRIMO
PROTOPLASTAE . QVI . IINGEND1S . HVIVS . TEMPLI
ARCHETYPIS . PER . ANNOS . XL . OPERAM . DEDIT
PRAEFECTI . FABRICAE . OFFIC1I . MEMORES .P.P. MDXCIX
Le fond de la croix, ou s'ouvrait anciennement une
porte, comme nous l'avons remarqué en parlant du
côté opposé , est orné maintenant d'une grande cha-
pelle dédiée à la Vierge. On lui a donné fort impro-
^-e( I 5 l )a~»
prement la dénomination de la Madonna delï albero
(la Madone de l'aibre) à cause d'un superbe candé-
labre en bronze qui esl posé devant la cbapelle. C'est
ud cbandelier a sept brandies qui à environs 20 pieds
de bauteur, et fut donné par Jean-Baptisie Trivulzi ,
archiprêtre de la Cathédrale. Ou y allume des lampes
les jours de grandes fêles. C'est un très beau morceau
qu'on ne peut se lasser d'admirer par la singulière
richesse de ses ornemens découpés avec délicatesse,
entrelacés avec goût , et enrichis des charmantes pe-
tites figures , d'animaux, de caprices mêlés avec art
dans ses ornemens , et enfin enrichi de pierres pré-
cieuses. C'est à regret que nous ne pouvons joindre
au nom du donateur celui de l'artiste qui l'a modèle
et même celui de fondeur qui l'a exécuté , qui mé-
riteraient d'être connus de la postérité.
On lit sur la base le deux inscriptions suivantes.
ÎO . BABT
TRIYVLTIVS
IIV . ECCL
ARCHIPRR.
D • D
PRAEFECTI
FAER1CAE
PERFECER
ET . HIC . PO .
VIII . C . APR .
M D LXII
La chapelle elpvée de terre par des dégrés en mar-
bre esl formée par une balustrade de différens mar-
bres à hauteur d'appui. Le dessin de la chapelle fut
donné par Piolomée Rinaldi et ressemble beaucoup a
celle de .S. Jean Bono qui est en face. Aux deux cô-
tés nous voyons encore deux figures colossales en plâ-
19
<-«( i32 y&-*
tre qui par leur lourdeur font paraître plus délicates
les statues qui se voyent à l'autel.
Sur les pilastres de l'arc d'ouverture se voyent six
bas-relief du même genre que ceux de la chapelle de
S. Jean Bono que nous avons déjà décrite, c'est-à dire
de petits tableaux composés de quantité de figures , et
où la perspective liueaire est plus ou moins bien ob-
servée ; ce sont tous des sujets de la vie de Marie:
ceux à la gauche représentent:
I. La nativité de la Vierge.
II. La présentation au temple.
III. Son mariage,
à la droite
I. L'enfant Jésus de la crèche.
II. Jésus disputant avec les docteurs.
III. Les noces de Cana.
Les auteurs de ce bas-reliefs, furent les plus habi-
les sculpteurs du tems déjà désignés dans cet ouvrage,
Augustin Busti, Ange Siciliano, André Farina, Cn-
stoph Solari, Silvio Cusini et Marc de Gra , qu'on
croit le même que l'Agrate qui a sculpté la statue de
S. Barthélémy.
Les figures sont si petites dans ces tableaux-reliefs
qu'on en perd tout le mérite , excepté aux deux pre-
mières à droite et à gauche qui sont à la hauteur de
l'oeil. Ils ne diffèrent guères de ceux de la chapelle
de S. Jean Bono; on y trouve la même délicatesse
d'exécution mais de la manière dans le dessin , ce qm
tient au goût qui régnait alors, les artistes n'ayant
pas encore eu sous les yeux les riches collections de
statues antiques qu'on admire à Rome, à Naples et à
Floreuce.
■<— «/ i 5 5 )ss — »
Ces bas-reliefs sont séparés aussi par quatre bustes
en relief, demi-ronde bosse, qui représentent des pro-
phètes. Ces têtes sont de César Btissola. La -voûte de
la chapelle est ornée d'une gloire d'anges et de saints
en relief, auxquels ont travaillé Dénis Bussola, Jean-
Pierre Lasagna, Gaspard Vismara, Charles Albertini ,
Charles-Antoine Bono et Jérôme Prevosto. Au centre
de la base en ogive est le Père étemel sculpté par
André Biffi, mais ayant été surpris par la mort avant
de l'avoir terminé, Charles son fils l'acheva.
L'autel est décoré de plusieurs statues, de têtes
d'anges , d'autres à mi corps , et enfin surmonté à la
cime par des figures d'une moindre proportion , les
uns rampantes sur le fronton, d'autres placées sur des
dés. La figure de la Vierge n'a rien d'admirable , la
tête est trop petite, elle est surchargée de draperie
d'un goût lourd et même bizarre. Ou lit sur le pié-
destal le nom du sculpteur.
ELIAS VINCEN . EVZZI . FECIT 1^68.
Les deux statues qui sont placées au sommet des
pilastres sur le devant représentant la Vierge et l'Ange
Gabriel sont de Dénis Bussola. Devant cette chapelle
sont placées sur le pavé six pierres tumulaires sous
lesquelles reposent les cendres de six cardinanx ar-
chevêques de Milan. On voit aussi suspendu à la voûte
des chapeaux avec leurs houppes. Au milieu de ces
pierres se trouve la tombe de Frédéric Borromée, nom
cher à la religion , aux sciences et aux beaux arts»
La simplicité qui règne dans l'inscription corre?pond
a la modestie qui distingua ce vertueux prélat.
<— c( 1 5 4 )»— ►
FEDERTCVS BORROMAEVS
CARD ET ARCHIEP • MEDIOLANI
SVB ■ PRAESIDIO BEAT1SSIV1AE ■ ViRGINIS
HIC QV1ESC1T
DECESSIT • ANNO • MDCXXXl • XI • CAL OCTOBR1S
HUMLLITAS
Les autres inscriptions placées à côté et au dessous
sont :
CAROLVS • GAIETANVS
CARDIN ALIS • STAMPA,
ARCHIEP . MEDIOL
LVCEM . MISERICORDIAE
QV1ESCIT
YIX1T . ANN . LXV . MENS . I . DIES . XIII
OBIIT . XIII . DECEMB
MDCCLII
FEDERICVS • CARD1NALIS • VICECOMES
ARCHIEP1SCOPVS • MEDIOLANI
OBIIT
SEPT1MO • 1DVS • IAiN • ANNO • MDCXCHI
FEDERICVS • CARD1NALIS • CACCIA
ARCHIEP • MEDIOL
PAVPER1BVS ■ EX • ASSE HAEREDIBVS • 1NSTITVTIS
AiNINVM ■ AGENS • LXIV
OBIIT
XIX KALEN • FEBRVARH • AINNO • MDCIC
OSSA
CAESAR1S • MONTII
CARD1NALIS ■ ARCHIEP • MEDIOL
VIXIT • ANNIS • LV1 REXIT ECCLES1AM • ANNIS • XV
OBIIT • ANNO • MDCL • VXI1 • KAL ■ SEPTEMB
A • P • O
PHILIPPVS • VICECOMES
ECCLESIAE • MEDIOLANENS1S • ARCHIEP1SCOPVS
RELIG10MS CAVSSA • LVGDVNVM • PROFECTVS
OBDORMIV1T • IN DOMINO 111 • KAL • IAN • ANNO • MDCCCII (i)
AET • LXXX1 PONTIF • XVIII
EIVS • EXVVIAF. MEDIOLANVM ■ TRANSL^AE
HÈ1C • RECOIND1TAE • XV • KAL • ARTII • MDCCCII
La chapelle qui est après, environnée d*un grille
en fer esl dédiée a S.e Chatérine de Sieune; son au-
tel eu marbre blanc, d'un style gothique élégaût, est
décoré de quantité de petites figures presque toutes
remarquables par un bon dessiu , de jolies têtes, de
draperies d'un bon goût et sculptées avec une ex-
trême délicatesse, de même que les ornemeos qui
semblent être découpés et appliqués après coup. C'est
un petit bijou qu'il faut aller découvrir , car on ne
le deviueroit pas dans cet angle. Des deux côtés de
la niche dans laquelle est l'effigie de la sainte , sont
deux statues qui représentent S. Jérôme et un Ar-
chevêque. On à transporté dans la Cathédrale cet autel
qui avant existait dans l'ancienne église de S.e Thècle
( v. PI. XXXIX ).
Sur le mur à gauche dans cette chapelle est placé
un tombeau en marbre blanc; il est consacré à la
mémoire de l'archevêque de Milan Philippe Archinti,
prédécesseur de S. Charles Borromée. Le buste est
élevé sur un piédestal au milieu , ayaut à ses côtés
(0 lit Rai. Jan. Anno MDCCCII correspond au 5o Décem-
bre 1802, jour que mouiùt à Lyon l'Archevêque Visconti.
«-»( 1 56 )»-»
deux chérubins. L'ordonnance de ce monument se
compose de deux colonnes de marbre veiné dout les
bases et les cbapitaux sont de bronze , le tout cou-
ronné d'un fronton triangulaire ( v. PI. XL ); il fut
exécuté en i56o par Balthazar Lazate. On lit l'inscri-
ption suivante sur le piédestal:
HIC • EST • TITVLVS • MONVMENTI
PHILIPPI • ARCHINTI
ARCHIEPIS • MEDIOLANEN
VIX • an • LX1I
M • XI • D XM
OB XI • CAL IVL • MDLV11I
Une autre inscription est gravée sur un marbre
entre les deux piédestaux des colonnes.
CORDE • GRAVIS • LINGVAQVE • POTENS • JVRISQ • PERITVS
TRAX1T • AB • ANTIQVA • NOBIL1TATE • GENVS
PONTIFICISQVE • VICES • ROMANA • GESSIT • 1!N • AVLA
LEGAT1 ■ HLNC ■ VENETA • MVNVS ■ IN • VRBE • OB1IT
ALEX • ARCHINTVS ■ 1 ■ C
FRATRI • B • M P
On lit dans la même chapelle une autre inscriptiou
d'une belle simplicité , sur une pierre posée a terre ,
où reposent les cendres d'un autre Archevêque de la
même noble famille.
JOSEPH
T1T • S • PRISCAE • PRESB • CARD
LEGATVS • DE • LATERE
EX • ARCH1NTA • FAM1LIA
SECVND'vS • MEDIOL • ARCH1EPISCOPVS
Y1TA • FVNCTVS • V ■ ID • APRIL ■ MDCCXI1
AETATIS • SVAE • AN • LXI
CORPVS PROPE • AVOS
SPEM ■ IN • PRKCE • YESTRA
DEPOSY1T
«— «f '37 )s»— »
Jean Mauro dit le Fiamenghiuo peignit en i633
sur la voûte de cette chapelle des rosaces gothiques
dont on voit encore quelques restes. Dans l'angle est
une petite porte qui ferme une escalier conduisant à
la partie supérieure de l'église.
En continuant le tour dans la nef gauche latérale
on rencontre d'autres chapelles plus petites appliquées
sur le mur, dont les autels en marbre blanc sout de
style moderne. La première est dédiée à S. Ambroi-
se. Le tableau peint par le célèbre Fcderic Baroccio
en 1O00 représente ce saint prélat de Milan en don-
nant l'absolution à Téodose , repenti du massacre de
Thessalonique : ce précieux tableau mériterait d'être
mieux soigné.
Dans la chapelle suivante qui est dédiée à S. Jo-
seph , existe un tableau de Frédéric Zuccaro qui re-
présente le mariage de la Vierge. Son mérite n'est pas
inférieur au tableau précédent. Parmi les statues de
cet autel celle d'Isaac le patriarche , et du roi Eze-
chias sont du ciseau de Pierre-Antoine Daverio , les
deux autres Abraham et David ont été sculptées par
André Biffi.
Le Cardinal Archevêque Joseph Pozzobonclli, mort
en 1785 fut enterré davant cette chapelle et on y
avait placée une inscription ; mais ayant été enlevée
en 1796 à cause des événemens de cette époque,
ou ne l'a pas replacée depuis. Dans la troisième cha-
pelle est conservé dans une niche couverte de glaces
un crucifix en bois qui rappelle aux milanais une épo-
que désastreuse de leur histoire , et le souvenir plus
consolant des vertus de S. Charles Borromée qui bra-
vant les dangers d'une peste violente qui moissonnait
«— «( 1 58 )as— >
les habitans de cetle graude ville en 1576, portait
dans les rues, dans les maisous des secours aux mal-
heureux et implora la clémence céleste eu portant
processiooellement nu pieds cette croix. Ce fait est
rappelé par l'inscription placée au dessus de la niche.
CRVCEM HANC S. CAROLVS GRASSANTE LVE
PER VRBEM C1RCV.MTVLIT . MDLX.X.VI
Deux autres Cardinaux et Archevêques de Milan ,
Alphonse Litta mort en 1679, et Benoit Erba-Ode-
scalchi (1) mort en 17/fO, fuient enterrés devant cette
chapelle: on y lit les inscriptions suivantes:
BENEDICTI AD NIHILVM
CARD HERBAE HIC • REDACTVM EST
ODESCALCHI CORPVS ALPHONSl
TIT • SS • XII • APOST CARDINALIS • LITTAE
OLIM MEDIOL ■ ARCH1EP TITSCRVCISIN HIERVSALEM
IN • HOC • TVMVLO CINERES OLIM ARCHIEP • MEDIOL
IN • PRECE • PAVPERVM ORATE PRO ■ EO
SPES OB1IT
OBIIT IDIB • DECEMB V ■ CALEN SEPTEMBRE
ANNO • SAL • MDCCXL MDCLXX1X
VIX1T • ANN LX1 AETAT1S • SVAE • LXXI
MENS ■ IV
Le dernier autel qui se présente dans cette nef
n'est qu'un châssis en bois doré avec une effigie de
(1) Cet Archevêque était enterré dans l'Église de S. Jean in
Conca , maintenant supprimée; ses ossemens turent transportés
dans ta Cathédrale et déposés devant cette chapelle eu 1808.
<-»/ i 5q )*->
la Vierge grossièrement ciselée en bois. Ce travail en
général ne mérite aucune attention a l'exception d'une
antiquité fort reculée.
Nous allons reprendre le milieu pour monter au
choeur par la grande nef en passant sous la coupole
qui forme le centre de la croix, et dans laquelle on a
substitué aux vitrages blancs des verres jaunes qui
produisent une teinte douce quoique brillante lorsque
les rayons du soleil les pénètrent, et cette teinte se
trouve en harmonie avec le ton de couleur qu'on a
donné aux voûtes. Cette belle coupole, soutcûue par
huit piliers ou colonnes, fut édifiée en 1490 par les ar-
chitectes Jean-Anloine Omodeo, George de Sienne et
Jacques Dolzebono. Elle est de figure octogone, l'in-
térieur est orné de 60 statues. Les bustes en médailles
placés aux angles représentent les quatre docteurs de
l'Eglise chrétienne. Le maître-autel était autrefois placé
sous cette coupole, il fut disposé autrement, par les
ordres de S. Charles. Au dessous de la coupole est
une grande ouverture dans le pavé, entourée d'une
balustrade à hauteur d'appui en bois sculpté et garnie
de quatre trépieds en cuivre doré. Elle correspond à
la chapelle souterraine où est déposé le corps de S.
Charles Borromée , et on y voit sans cesse autour des
fidèles eu prière. Cette ouverture a été pratiquée pour
donner un passage à la lumière et principalement à
l'air nécessaire dans ce caveau.
Avant d'entrer dans le choeur il faut nous arrêter
devant les deux tribunes ou chaires à prêcher , qui
sont adossées aux piliers de la couple. Elles sont en-
tièrement couvertes de lames de cuivre argenté et
doré , riches de bas-reliefs d'un très bon travail outre
20
*-k( i 4° )s>~*
des ornemeus à caprice, des prophètes, et des faits
de l'histoire sacrée , exécutés par André Pelizzone.
Elles furent commencées par ordre de S. Charles et
terminées par les soins du Cardinal Frédéric Borromée.
Les quatre grandes cariatides qui les soutiennent ont
été modelés par François Brambilla et jettes en bronze
par Jean Busca en i5gg. Les quatre demi-figures de
la chaire à la droite sont S. Grégoire , S. Jérôme ,
S. Ambroise et S. Augustin ( v. PI. XLIV ). Celles à
la gauche sont les symboles des quatre Evaugehsles.
Les noms des artistes sont conservés de la manière sui-
vante; on lit sur la tribune à droite.
FRANCISCVS . EEAMBILLA
FORMAVIT
IO . BABTISTA . BVSCA . FVNDIT
M . D . L . C3
et sur celle à la gauche :
IO . BAP .' BVSCA . F.
Deux dais du même genre et également fournis
d'un travail très-compliqué, sont placés au dessus,
et l'espace intermédiaire qui couvre les colonnes au-
quels ces tribunes sont adossées, est également recou-
verte de ces lames de métal d'un travail fort riche.
Ces deux chaires ont coûté livr. 67,541- i3 s.
^-a( 1 4 1 )s*~-
L E CHOEUR.
La construction de cette partie de l'église fut en-
core ordonnée par le vénérable prélat S. Charles Bor-
romée. 11 en confia l'exécution à l'architecte Pellegriui
qui eu avait conçu le plan. 11 imagina de l'élever au-
dessus du sol des nefs afin que le peuple put facile-
meut voir les cérémonies qui s'y célèbrent (i). En don-
nant ainsi plus d'élévation Pellegrini trouva le moyen
de construire sous le choeur une chapelle, ou ora-
toire qui est vulgairement appelé Scurolo , dont nous
parlerons ensuite. L'invention cependant fut vivement
combattue et l'antagoniste du Pellegrini , duquel nous
avons remarqué la critique précédeute a l'occasion
du Baptisière à la page 84 de cette description , se
présenta de nouveau pour disputer le plan que l'archi-
tecte avait proposé. 11 s'éleva doue entre l'architecte
Martin Bassi milanais, et Pellegrini un débat assez vif
dont nous avons puisé les détails aux archives de la
Bibliothèque Ambroisienne (2). Nous n'eutreprenderons
(1) D'après des calculs iails par feu M. le Marquis Joacliim
D'iVdda, qui à donné une intéressante description des monumens
de Milan, il parait que sa Clialhédrale peut contenir près de 9,5oo
personnes.
(2) Nous ne pouvons nous refuser d'annoncer aux amateurs des
arts que cette B.bliothèque, déjà fournie de nombreux productions
piecieuses et de plusieurs d'une valeur incalculable , vient d'être
augmentée tout récemment d'une collection de peintures de grand
prix et de plusieurs objets rares, par la donation q'un habitant dis-
tingué de Milaa D. Jean Pecis , lui fit de son vivant. Ces objets
furent placés dans une salle séparée, dont l'entrée est permise,
*-*( I 4 2 )s->
pas de les renouvellcr devaut nos lecteurs , mais nous
étant proposes dans celte description de leur indiquer
les beautés et les défauts, nous leur ferous connaître
le jugement des deux principales lumières de ces lems,
l'architecte Palladio et Barozzi Viguola en réponse à
un mémoire qui leur fut adressé rapport à ces diffé-
rons accompagné des dessins du même Bassi. = Oltre
a cib mi piace che il tutto sia a livello e <vi con-
siglio di non partirai da taie opinione ; percib che
allrimenti facendosi, ne nascerebbe grandissima in-
comodità nel sedere e bruttissima vista: non laudo
che il Coro si alhtnghi sino aile colonne délie Tri-
bune ec. Di Venezia il m Luglio del MULXX ,
Andréa Palladio ==.
Vignola approuva entièrement les dessins de Bassi,
tout opposés a ceux de Pellegrini , Vasari est de la
même opinion. ÎNous voyons cependant que le projet
comme a tout le reste, aux nombreux amateurs et curieux qui se
présentent. On ne saurait trop apprécier la généreuse resolution du
donotaire qui n'attendit pas sa mort pour céder à un établisse-
ment si util aux sciences et aux arts, les acquisitions qu'il fit pen-
dant une suite d'années avec un géueieuse et sage distinction.
Il s'occupait en outre d'eiiricliir sans interruption la précieuse
collection qu'il avait déjà fait transporter à la Bibliothèque Ara-
broisienne, et principalement par des ouvrages des artistes di-
stingués et vivans Milanais, ce qui présente une pensée des plus
nobles, lorsque la mort malheureusement l'enleva eu Avril de cette
année i83o à ces soins généreux. La vue de ces objets d'art, of-
ferts a l'instruction du public forme un epitaphe bien plus glo-
rieux à ce bienfaiteur de ce que produirait un monument des plus
fastueux. Mons. le Baron Custodi , auteur de plusieurs ouvrages
très-distingués , à également leguè de son vivant sa riche Bi-
bliothèque à ce même établissement.
de Pellegriui prévalut contre celui de sou adversaire
qui voulait placer le maitre-aulel sous la coupole, et
ce fut une commission des nobles et d'administrateurs
qui décida la question entre les deux architectes.
En conséquence le choeur fut divisé en deux plans
élevés au dessus l'un de l'autre. On arrive au pre-
mier entre les deux derniers piliers de la coupole par
cinq dégrés, terminés par une balustrade en marbre
à hauteur d'appui , au milieu de laquelle sont deux
petites grilles en fer servant d'entrée. C'est dans ce pre-
mier espace du choeur appelle le Coro senatorio que
se placent sur des bauquettes et quelques stalles, que
l'on recouvre de tapis, les premiers dignitaires du
royaume et de la ville dans les grandes cérémonies.
Au dessus de celte entrée , en élevant les regards
le curieux voit un architrave en bois sculpté et doré
qui traversant toute la largeur de la nef s'appuie sur
deux consoles attachées aux chapiteaux des piliers de
la coupole. Deux grandes statues de prophètes eu bois
soutiennent en forme de cariatides les mêmes conso-
les. Cinq statues de même matière sont posées sur cet
architrave , elles ont été peintes et dorées ; au centre
est placé un grand crucifix, des deux côtés la Vierge
et S. Jean , et deux anges a genoux. Ces figures fu-
rent exécutées en i5gi par Santo Corbetta , par les
ordres de l'archevêque Gaspard Viscouti: on lit ces pa-
roles au milieu de l'architrave.
Attendite ad petram unde
excisi estis.
La seconde partie du choeur qu'on s'appelle le san-
ctuaire on Presbythère et à laquelle on monte par
«— «( 1 44 J38- *
trois degrés , est aussi formé par une balustrade en
marbre j on n'y admet que l'archevêque, le prince et
le clergé. Près du mur à gauche est dans cette enceinte
la chaise épiscopale , accompagnée de banquettes des
deux côtés, où s'assaient les chanoines qui assistent le
prélat dans les cérémonies ou il pontifie solennement.
Le choeur en entier a de longueur 38, 140 mètres
et de largeur 16,800 ; il est environné par dix gros
piliers qui soutiennent des arcs en ogive. Leurs cha-
piteaux, semblable a ceux de la nef, avec des niches,
contiennent des figures d'anges, sculptées en grande
partie par Dénis Bussola, César son fils, Charles Pa-
gano et Antoine Albertino.
Au milieu de la première enceinte est suspendu du
haut de la voûte un candélabre d'une construction sin-
gulière et d'un goût antique , il est tout eu bois re-
couvert de lames de métal travaillés en relief, divisé
en quatre rangs, dans chacun desquels sont six pe-
tites statues en bois doré représentans des Apôtres et
des Saiuts dans des niches, les baldaquins qui les
couvrent sont de métal et fort bien travaillés. Ce can-
délabre sert à mettre le cierge que l'on bénit et al-
lume pendant la pâque.
Le magnifique autel placé dans le Sanctuaire est
élevé sur cinq gradins. 11 fut construit vers la fin du
XVI siècle et est formé par une table de marbre carré
long, surmonté par un espèce de petit temple de forme
circulaire , d'une élégance et d'une richesse conve-
nable, en bronze doré et de la hauteur de 10,200
mètres. Huit colonnes cauelées à bases et chapiteaux
coriuthiens soutiennent nu petit dôme , enrichi d'ara-
besques et de figures d'auges en bas-relief posées dans
*-«( l45 )s»->
de gracieuses attitudes sur huit colonnes s'élevant au
o
dessus de la corniche ; autant de petites statues d'anges
portant des symboles de la passion et au haut du dôme
on voit J. C. ressuscitant. Ces objets dessinés par Pel-
legriui et modèles par le sculpteur François Brambilla,
furent fondus par André Pellizono, excepté la corni-
che sur laquelle pose le dôme qui fut coulée par Jean-
Baptiste Busca , autre habile fondeur, et ces travaux
furent commandés par le Cardinal Frédéric Borromée
(v. PI. XL1).
Au milieu sont quatre chérubins exécutés par le
même Pellizono de grandeur naturelle eu bronze , à
genoux sur un nuage dans lequel on voit épars de tê-
tes d'anges ; les quatres figures dans un altitude fort
gracieuse soutiennent le tabernacle également en bronze
doré, de forme ronde comme une petite tour. Il est
environné par douze petites colonnes cauelées au haut
desquels s'élèvent autant de petites statues des Apô-
tres , et sur le sommet eu forme de dôme est la fi-
gure du Sauveur débout. Les intervalles des colonnes
sont remplies par une jolie grille de cuivre , et autour
de la base sont représentés en relief des passages de
la vie de J. C. savoir la naissance , la dispute avec
les docteurs, la cène, la prière au jardin des oliviers
et le crucifiement. Il y a un défaut qui quoique de
peu d'importance pourtant ne laisse pas de blesser le
conaisseur, c'est qu'aucun espace ne sépare ces bas-
reliefs ce qui forme une confusiou historique. Fa base
est recouverte par une branche de vigne garnie de
ses feuilles et de grappes d'un travail fort délicat.
Ce tabernacle à été donné a l'église par le Pape
Pie IV, et il fut exécuté à Pvome par les frères Solari,
<-«( 1 4.D )a— >
nés à Casale dans le Milanais. Le nom du donateur et
celui des artistes sont indiqués en lettres en relief
autour du tabernacle.
PIVS 1111 PONTIFEX OPTIMVS MAXIMVS.
et au dessous
AVREL1VS HIERONIMVS ET I.VD. FRES. LOMBARDI SOLARI F.
( v. PI. XLII ).
A la partie postérieure de l'autel il y a trois dégrés
ornés de bas-reliefs compliqués, représentais des évé-
nemens de l'ancien Testament ; ces degrés servent aux
officians pour monter , au besoin , au niveau du Ta-
bernacle.
Des deux côtés sont sur l'autel deux grands anges
aussi en bronze , dont les modèles furent commencés
par François Brambilla qui étant mort en i5gg les
laissa imparfaits. André Biffi les termina et il furent
coulés par Jean- Baptiste Busca, auquel il furent payés
liv. io,532. 10 s.
Autour de l'enceinte intérieure sont placés les stalles
de ce eboeur , en bois de noyer , d'un travail fort
riche et taillés avec goût. Soixante treize tableaux en
relief, qui ornent autant de hautes stalles, repré-
sentent des époques de l'histoire de S. Augustin et
de S. Anibroise , et au dessous daus un pareil nombre
de bas-reliefs, entourés d'orneniens très-compliqués,
sont représentés les martyrs de Saints et de Saintes
milanais , dont les corps furent déposés dans diverses
églises de la ville , ce qui est indiqué par des in-
« ( .47)—
scripiions en lettres de métal , incrustés dans les bases.
Les sièges d'appui à l'usage du clergé mineur, au
nombre de trentesix , sout également ornés des figures
en relief, on y a représenté des SS. Evêques de Milan
en habits pontificaux. Ces figures sont entourées de
bordures d'un travail fort riche et accompagnées aux
côtés de trophées religieux très-variés. Ces ouvrages
d'un mérite distingué furent exécutés par les artistes lom-
bards suivans Virgile del Conte, Paul de Gazi , et
Jean-Jacques et Richard frères Taurini , auquels on les
paia 8000 écus. Pellegrini donna les dessins pour la
partie qui se rapporte a l'architecture de ces reliefs,
et les ornemens fuient inventés par François Brara-
billa , Joseph Meda , Ambroise Figini , Camille Proc-
cacini et Pascal Gamba. C'est l'usage dans les égli-
ses d'Italie d'étaler derrière le maître-autel un grand
Toile qui s'attache au baldaquin qui est toujours sus-
pendu à la voûte au dessus de l'autel. L'effet que celte
étoffe déployée en forme d'eveulail produit est quelque
fois agréable suivant la qualité et la couleur de la
draperie, et le genre de l'autel qu'elle doit oruer.
Souvent il arrive le contraire , comme on a occasion
d'observer dans ce choeur, car la couleur étant d'un
bleu foncé et l'étoffe étendue de manière a empê-
cher la lumière , déjà assez faible à cause des vi-
tres à couleurs par lesquels elle doit percer, cela
produit dans cette partie du choeur une obscurité
qu'a peine peut on appercevoir les prêtres , même
quand une certaine quantité de cierges brille sur l'au-
tel. On prétend que ce draps est nécessaire dans cet
endroit pour défendre les officians de l'air trop vive-
ment chassée dans le fond de l'église. Aux deux côtés
21
<-e( I 48 )a-»
«lu choeur on remarque les deux beaux orgues au
milieu du premier entrecolonueinent. Ils sont a deux
faces, l'une regarde l'intérieur du choeur, l'autre vers
la nef qui l'entoure. Ce riche instrument dont on ne
connaît pas l'inventeur primitif, mais qui fut apporté
de l'orient en ^Sn lorsque Constantin Copronyme en
fit présent a Pépin, roi de Fiance, et dont il y en
eut un dans l'église de Vérone sous le régne de
Charlemagne, que l'on prétend fut le premier emploie
pour le service divin , cet instrument dirons nous est
ici placé en double, savoir un grand orgue de chaque
côté du choeur, mais qui par leur construction , par
leur grandeur et par les ornémens sont parfaitement
égaux. 11 sont enfermés chacun dans une belle déco-
ration de deux grandes colonnes cannelées d'ordre co-
rinthien en bois doré , surmontés d'une corniche fort
riche que supportent aussi deux grands thermes a tête
de lion. Le devant est formé par une tribune pour
les chanteurs de musique , couverte de sculptures ara-
besques, et le tout est enrichi de figures, de conso-
les, de frises dorées d'un travail admirable ( 1). On en
attribue les dessins a l'architecte Vincent Seregni. L'or-
gue à la droite fut construit en i552 par Jean-Jacques
Antignati et Santo Corbetla y ajouta eu 1 58 1 les or-
némens de sculpture en bois. Celui de la gauche à
(1) La musique avec l'orgue fût introduite dans celte Cathédrale
en i5g5 et en 1^01 on y ajouta des musiciens pour le chaut.
I^a chapelle est maintenant composée d'un maitre, d'un sous maî-
tres , de deux organistes, de huit soprano et contralto, de qua-
tre ténors , quattre basses et de quatre garçons de choeur , qui
tous ont des gages fixes. L'archive est fourni d'une riche collection
de musique variée des principaux compositeurs anciens et modernes.
été fait par Cristoph Valvasori et Paul del Curno eu
exécuta les sculptures en i558. Ou attribue les sta-
tues à Jean et Jacques , frères Tauriui et à Pierre
Uberti. On à calculé que ces orgues ont coulé dans
le teras 5j,ooo écus , en y comprenant liv. 29,981
pour les ouvrages de menuiserie et liv. 25,941 pour
les dorures.
Ses tuyaux sont, lorsqu'on ne les fait pas jouer,
enfermés sous des volets en bois sur lesquels d'habiles
peintres ont fait des tableaux qui méritent l'attention.
Les deux faces de chaque volet offrent un tableau ;
ceux de l'orgue à droite représentent dans la partie
intérieure la Nativité de J. C. et son ascension 5 sur
la face extérieure le passage de la mer rouge. Ils ont
été points en 1 5g5 par Jeau-Ambroise Figini. Joseph
Meda peignit eu 1709 les volets de l'orgue à gauche ,
dans l'intérieur la Nativité de la Vierge et son as-
somption , sur la face extérieure David devant l'arche.
Les volets qui enferment les deux orgues des cotés de
la nef, derrière le choeur, furent tous peints par Ca-
mille Prucaccini de l'année 1 59 c au 1602.
Ces tableaux représentent , à la partie méridionale ,
dans l'intérieur la Resurection et la Trasfiguralion de
J. C. , au dehors le triomphe de David. Sur la partie
septentrionale en dedans l'Annonciation et la Visitation
à S. Elisabeth , au dehors des autres événemens de
l'histoire de David. Ces tableaux en général furent
payés liv. 3i,525.
Audessous des deux tribunes des orgues on eu a
pratiqué deux autres plus petites qui servent en cer-
tains jours de l'année aux musiciens attachés à la cha-
pelle lorsqu'ils doivent chanter sans l'accompagnement
<— b( l5o )s-»
de l'orgue (1). Ces tribunes servent aussi à placer des
étrangers ou des personnes notables de la ville, à
l'occasion de quelques solemnilés extraordinaires. Un
observera sur la face de l'appuis de ces tribunes trois
bas-reliefs représentans des anges sculptés en bois par
Jean Taurini. Aux côtés sont deux riches consoles
ayant au dessous un Chérubin accompagné d'orne-
mens de bon goût , et plus bas cinq dosiers de sièges
ornés d'arabesques, placés eutre deux petites portes
qui ont un bas-relief bizarre audessus.
Le pavé du choeur est en marbre incrusté de diver-
ses couleurs comme celui de la nef, mais plus i appro-
ché du genre dit mosaïque
En sortant du choeur et avaut de descendre aux
chapelles souterraines , nous invitons l'amateur à faire
une seconde fois le tour de la nef qui l'entoure , pour
examiner une suite de très-beaux bas-réhefs qui sont
placés à la clôture extérieure qui environne le choeur.
Nous commencerons à le guider du côté méridional,
sur la droite, jusqu'à l'extrémité opposée. 11 faut re-
marquer d'abord la tribune en marbre blanc de l'or-
gue, fort bien sculptée, celle du côlé opposé lui cor-
respond. Audessous est une fenêtre qui ouvre sur les
tribunes intérieurs appellées Corretti. Des deux côtés
(i) Le vit Ambi'oisien ne permet pas de faire entendre dans les
églises aucune espèce d'instrument excepté l'orgue auquel on ajoute
tout au plus quelquefois un violoncelle, ce qui diffère infiniment
du romain qui fête les solemnités avec une musique d' orchestre
complette , ce qui produisit en tous les tems des compositions di-
stingués dans le genre sacré, et sortout en Italie ou leur éxecu-
tion est très fréquente. Aussi le chant dit Ambroisie» n'a rien de
séduisant pour l'oreille.
B
«-«( l5 I )*)-»
sont des cariatides en gaine gigantesques. An niveau
du pave est une grande ouverture cariée fermée par
des -rilles de fer , qui conduit a des souterrains ser-
vant de ruagazin , et deux portes aux côtés donnent
l'entrée aux chaires et aux orgues, et conduisent au
choeur au cas de hesoiu ( v. PI. XLV et XLVI ).
Au dessus de ces portes commencent les has-rehefs
en nombre de 17 entre les colonnes. Ils sont en
marbre de Carrare et représentent les principaux faits
de la Vierge et de J. C. Tous ces morceaux par-
leur composition et l'élégance du dessin ont mérité
d'avoir une place dans les gravures de notre ouvra-
ge, autant pour satisfaire le lecteur curieux des objets
qui font honueur à l'art, que pour la réputation des
artistes qui les ont exécutés.
Voici quels sont les sujets.
i.° La nativité de la Vierge par André Bifii.
2.0 La présentation au temple, par le même.
5.° Le mariage de la Vierge , par Marc-Antoine
Prestinari.
4.° L'Annonciation par Biffi.
5.° La Visitation par le même.
6.° Le songe de S. Joseph, par Prestinari.
n' La Nativité de J. C. , par Jean Bellandi.
8." La Circoncision, par Biffi.
9.° La fuite en Egypte , par le même.
io.° Jésus parmi les docteurs, par le même.
ii.° Les noces de Caua , par Bellandi.
12.0 Le Crucifiement, commencé par Gaspard Vis-
mara et terminé par Jean-Pierre Lasagna.
i3.° La descente de croix, par Bellandi.
14.0 L'apparition de J. C. à la Vierge, par Lasagna.
*S ( I 5 3 )»— >
j5.° La mort de la Vierge, par Bifii.
16." L'assomption de la Vierge, par le même.
17.° L'iucoronation , par Vismara ( v. PI. LV1I ,
LV1II et LIX ).
A quelques uns de ces Las-reliefs qui appartien-
nent aux entrecolonnemens les plus ctoits derrière le
choeur, on voit des symboles agréablement sculptés
par Martin Solari , par François Caloui et par André
Prevosto. On admirera aussi avec quelle variété et grâce
ont été, modelées et exécutées les 52 figures d'anges qui
séparent les 17 tableaux et qui tous avec de jolies
attitudes semblent supporter la corniche qui règne tout
autour au dessus. Ces charmantes figures ont été mo-
delées par François Brambilla et sculptées par différeras
artistes. Ces ouvrages furent payés liv. 99,128.
Ou regrette que ces beaux morceaux ne soyent pla-
cés de manière que la lumière bien réfléchie puisse
faire ressortir les jolies contours et l'ombre des masses.
Dans la base de cette enceinte du choeur, sont
pratiquées i5 fenêtres au niveau du pavé qui aboutis-
sent à la chapelle souterraine appellée délia Confes-
sione ou Sciuolo.
«-«( I 5 3 );*->
CHAPELLES SOUS TERRE.
On entre dans les chapelles sous terre par deux por-
tes à grilles de fer sur les côtés extérieurs du choeur ,
presque en face de celles des deux sacristies ; et eu
descendant sur deux escaliers comodes , on arrive à la
première des chapelles qu'on appelle la Confessione
et vulgairement Scurolo.
Elle est de forme ronde , construite d'après les des-
sins de Pellegrini et sous sa direction. La chapelle est
éclairée au moyen de i5 fenêtres grillées et ouver-
tes par la uef de rondpoint que nous avons déjà
indiquées. La voûte est ornée des figures en relief
et d'ornemens entrelacés en stuc ; huit colonnes de
marbre la soutiennent et au milieu est placé un au-
tel fort simple environné d'une balustrade d'un des-
sin bizarre avec des grilles en fer. Il serait à dési-
rer qu'on fit disparaître ces capricieux accessoires, ce
qui donnerait a i'autel un aspect bien plus majestueux.
A l'entour sont placées les stalles en bois pour les
chanoines qui vont à diverses époques célébrer l'of-
fice dans ce souterrain (v. PI. XLVI1 ). Au bas des
deux escaliers est une porte en marbre blanc sur la-
quelle est placé dans uue niche le buste en marbre
de S. Charles Borromée. On passe à une autre porte
ou on lit sur la frise les paroles Pietatis restitutore.
En descendant neuf dégrés avec une balustrade de
marbre blanc d'un style moderne , ou entre dans
la galerie qui conduit à la chapelle sépulchrale de
S. Charles, rebâtie presque entièrement en 1817
sur les dessins de l'architecte actuel de la Cathé-
«— s ( i5/j. )»-*
dralc l'ingénieur Pierre Pestagalli (i). Elle esl dé-
corée de marbres d'uue belle qualité grisâtre avec des
portes réelles et des autres feintes. La voûte est peinte
en clair obscur et ornée de rosaces en stuc. Ou voit
des deux côtés de l'escalier daus le mur deux mé-
daillons de marbre blanc ; ce sont les poitrails de
deux Cardinaux Arcbevêques de Milan. Au dessous
sont deux tables de marbre noir portant des inscrip-
tions en lettres dorées , qui rappellent leur munificence
en l'honneur de leur illustre prédécesseur S. Charles.
La première inscription au côté droit se rapporte
au Cardinal Alphonse Lilta dont le buste à été scul-
pté par Vismara.
CARD. ALPHONSO LITTAE.
T1T . S . CRVCIS . IN . HIERVSALEM
ARCHIEP . MEDIOL.
QVI . ARAE . SVBTERRANAE . D . CAROLI
LEGAVIT . QUATVOR . MILLIA . AVREORVM . NVMMVM
OMNEMQVE . SVPELLECTILEM . ARGENTEAM
ATQVE . ATTALICAM
SACELLI . DOMEST1CI
PEP.ENNEM . IN . SEPVLCRO . S . CAROLI
MVNIF1CENTISSIMAE . LARGITAT1S . MEMORIAM
FAMA . POLLICETVR
QVINTO . CAL . SEPTEMBRIS
ANNO . SAL. MDCLXX1X
(1) k Milan là plupart des archilectes ont le titre d'ingénieurs ,
qui ne s'accorde qu'après des études et des exaQiens particuliers
à rUuiveraiie de Pavie.
<_£( i 55 )»->
La seconde, sous le buste du Cardiual Frédéric
Visconti, sculpté par Etienne Sanpietro.
FEDERICO VICECOMITI. TIT. S. ALEX1I
CARDINALI . ARCHIEPISCOPO . MEDIOLANI
QVOD . SACELLO . SVBTERRANEO . S . CAROU
QVEM . CONSANGVINITATE . ATTINGEBAT
CVM . VESTIBVS . ET . CALICE
QV1BVS . AD . SACRVM . PRIVATVM . VTEBATVR
TESTAMENTO . RELIQVERIT.
AVREOS . BIS . MILLE
TOTIDEM . LEGATIS . ARONENSI . COLOSSO
PROPE . NATALE . CVBICVLVM . EXCITANI10
ER1GITVR . IN . TVMVLO . MONVMENTVM
SEPTUVJ.O . IDVS . IANVARU
ANNO . MDCXCIII.
A la suite de cette galerie est un élégant vestibule,
d'ordre corintbicD. Les murs sont doublés en beaux
marbres et de la même matière sont les colonnes ayant
des chapiteaux et des frises en stuc doré. Dans le
côté est la porte d'une petite sacristie où sont con-
servés les oruemeus sacrés appartenans à celte cba-
pelle (v. PI. XLVIII).
Dans les deux petits corridors qui conduisent à la
chapelle à droite et à gauche on remarque deux
grandes tables de marbre blanc incrustées dans le mur.
L'une d'elles avait couvert le tombeau du saint Ar-
chevêque avant que le Pape Pie V eut prononcé sa
22
*-s( i56 )s->
canonisation en 1610 (1). On y lit cette incription
en caractères rapportés de métal.
CAROLVS CARDOxiLIS
T1TVLI . S . PRAXEDIS
ARCHIEP . MEDIOLANI
FREQVENTIORIBVS
CLERI . POPVUQ . AC
DEVOTI . FEMI1NEI . SEXVS
PRECIBVS . SE . COMMENDATVM
CVP1EKS . HOC . LOCO ' SIBI
MONVMENTVM . V1VENS
ELEGIT
HUMILITES
VIXIT . ANNOS . XLVr
IWEN . I . DILM . I
PRAEFVIT . ECCLESIAE . MED.
ANN • XXIV
MEN . IIX . DIES . XXIV
OBIIT • III . NON . NOV.
ANN " MDLXXXIV.
Sur l'autre pierre appliquée dans le corridor du
côté opposé, on rappelle la restauration et l'embellis-
(1) Depuis la mort du Saint j'osqu'à l'époque indiquée, sou
corps fut placé dans ce vestibule comme il l'avait demandé dans
son testament. Cet endroit servait alors et j'usqu'à l'année 1817 de
sacristie à l'usage de la première chapelle, mais depuis la nouvelle
construction on a destiné à cet usage un aucien sépulcre de com-
mun aux chanoines de cette Cathédrale.
«-«( l5-y )»-*
sèment de cette chapelle, de son vestibule et de
l'époque où on exécuta ces ouvrages.
KAROLI BORROMAEI
PATRONI . CAELEST1S . SOSPITATORIS
SACELLVM
EX . ANGVSTIORE . VETERI
IN . NOVAM . SPLENDIBIOREM . FORMAM
PRODVCTA . ARCA
MARMORATO . PERISTYLIO . ET . PRONAO
AVCTVM
PERISTROMATE . AVRO . 1NTEXTO
PAEMENTO . DE . TESSERVLlS . STRATO
SIGMS . ANAGLYPHIS . ZOOPHORIS
VETVSTATIS . SQVALORE . DETERSIS ' REFECTIS
LYCHNVCHIS . OMNIEVS . QVE . PARERG1S
EXORNATVM
PVLVINARI . TENITIVS IN . SVBI.IMIOR . SEDEM
TRANSLATO
IKGENTI . CIVIVM . ED . ADVENAR . FREQVENTIA
DEDICATVM . FVIT
POSTR. . NONAS . NOVEMBR. A. MDCCCXVII
FESTO
SAKCT1SS1MI . ET . 1NVICTI . PONTIFICIS
FAVST1S . OMNIBVS . REDEVJNTE.
Mais ce qui fixe principalement l'attention des per-
sonnes qui visitent ces lieux c'est la chapelle sépul-
crale. Elle est de forme octogone un peu allongée et
ne recevoit la lumière que par cette ouverture de la
voûte qu'on appercevoit dans l'église supérieure , com-
me nous l'avons remarqué précédemment. Le reste de
la voûte est décorée par huit médailles d'argent, par
des ornemens , des trophées et les armes de la fa-
mille du Saint, le tout du même métal. Les huit mé-
daillons représentent :
i." La naissance du Saiut.
i.° Le Concile provincial qu'il présida à Milan.
5." La distribution qu'il fit aux pauvres de l'argent
que produisit la vente qu'il fit de la princi-
pauté d'Oria.
4-° Les sacrémens de baptême et de l'extrême onction
qu'il administra aux pestiférés.
5.° L'assassinat tenté contre lui.
6.° La translocation des corps des saints par ses
ordres.
r* Sa mort.
8.° Son entrée à la cour céleste (i).
Ces ouvrages exécutés dans le XVII siècle furent
donnés eu grande partie par le Cardinal Alphonse
Litta, et le reste par la famille Borromée. Dans les
angles sont placées huit figures en cariatides , aussi en
argent ; elles sont toutes allusives aux vertus du saint.
Les espaces intermédiaires et les murs sont couverts
par une tapisserie en soie , brochée richement en
(i) Lorsque chaque anne'e on célèbre la fêle de S. Charles, qui ar-
rive le 4 de novembre, on expose pendant plusieurs jours entre les
colonnes de la grande nef de l'église 28 tableaux qui représentent les
laits principaux de la vie du Saint, outre 28 tableaux plus petits
qui sont suspendus au dessous des premiers et représentent des
miracles qu'où lui attribue. Ces tableaux ont e'te' peints en grande
partie par des artistes milanais, savoir Morazzone, Duchino, Lan-
7.ani , Jules César Procaccini , Jean-Baptiste Crespi dit le Cerano etc.
<-«( i59 )*=-»
or (i). L'autel est également décoré de bas-reliefs et
d'oruemens en argent. La dépouille de S. Charles
Borromée, revêtue de ses habits pontificaux et portant
des bijoux précieux, est enfermée dans uue très-belle
chasse d'argent, renfermant des glaces de cristal de
roche qui laissent appercevoir le corps du saint Ar-
chevêque. Elle est placée sur cet autel qui lui est
consacré. Cette chasse fut donnée par Philippe IV roi
d'Espagne , dont on voit les armes en or sur la base ;
de fort jolies petites figures et des anges distribués
autour , et groupés sur le dessus , le tout en argent ,
forment un très-bel effet ( v. PI. XL1X et L ).
Si des monumens érigés au mérite , à la vertu ,
inspirent une vénération profonde à tout homme sen-
sible, quelle tendre émotion n'éprouveral-il pas à la
vue des dépouilles mortelles de S. Charles Borromée,
de ce prélat incomparable, desquels la ville de Milan
se glorifie à si juste titre.
De vastes édifices, destinés à l'utilité publique,
construits par ses ordres et par sa munificence , le
zèle infatigable pour la construction et l'embelisse-
ment de la Cathédrale, et enfin nombre d'institutions
de piété et de bienfaisance, qui sont conservés encore
de nos jours, attestent sa grandeur d'âme, son amour
pour les sciences et les arts , et l'étendue de ses lu-
mières , surtout dans un tems où elles n'étaient en
partage qu'à quelques hommes rares.
Chaque événement de sa vie prouve que le but
(1) Cette belle tapisserie à été tissue à la fabrique de M. Reina à
Milan, d'après les dessins de l'habile peintre d'ornemens M. Vaccani.
-<—«=:( lÔO )»-»
de ses pensées et de ses soins fut uniquement dirigé
à l'instruction et au soulagement du peuple coufié a
sa direction ; les empressemens paternels se montrèrent
au plus haut degré parmi les horreurs d'une peste
qui ravagea la ville de Milan et les pays à l'entour
en 1576. Infatigable, bravant les dangers de la con-
tagion, il parcourait les rues, pénétrait daus la de-
meure de l'indigence et des agonisans en y prodiguant
les secours de la religion, et ceux que la fortune lui
permettait de partager. La chaumière du laboureur par-
tagea ses bienfaits , dirigés avec le même empresse-
ment. Le coeur navré des malheurs de son peuple ,
il implorait du ciel par des larmes et par ses prières
le terme d'un fléau si terrible. La vente de sa prin-
cipauté d'Oria, dout ii fit distribuer le produit aux
pauvres ne suffit pas à sa bienfaisance , mais il se
dépouilla des objets de quelque valeur, ne se reser-
vant que le pur nécessaire à son existence. Tant de
travaux et de veilles abrégèrent ses jours et la mort
le ravit à son peuple recouaissant en i584, n'ayant
atteint que sa quarantesixième aunée (1).
Le pavé de la chapelle est eu marbre avec des
ornemens en mosaique de diverses couleurs.
(1) Les liabitans de le petite ville d'Arona sur le lac majeur se
réunirent à la famille Boironiée pour ériger à la mémoire de S.
Charles une statue eu cui\ re , que l'on voit en naviguant sur ce
lac. Le Saint naquit en cet endioit en i558, et il est représenté
dans l'attitude de bénir ces lieux. Cest un objet de curiosité pour
les voyageurs qui s'arrêtent pour admirer non s-ulemeut sa forme
colossale mais en même lems ses belles proport.ons.
*-«( i6i )«— »
PARTIE SUPÉRIEURE DE L'ÉGLISE.
Rien ne ressemble à la Cathédrale de Milan ; beau-
coups d'édifices eu Europe offrent par la hardiesse et
la beauté de leur construction un sujet d'admiration ^
quelques uns étonnent par la hauteur de leurs cou-
poles. Partout c'est un toit qui recouvre une voûte.
Ici c'est le cuivre , là c'est le plomb , ailleurs les pier-
res cuites, il n'a rien de riche dans tout cela, pas
même les formes , et c'est si peu de chose en
architecture que l'on fait tout ce que l'on peut pour
le cacher aux yeux dans la construction des palais.
On ne trouve dune aux édifices religieux en Italie que
d'assez volumineuses tours carrées fort élevées , sou-
vent isolées de l'église , où sont placées les cloches.
Ouest-ce autre chose qu'un chef-d'oeuvre de maçon-
nerie, ou une singularité effrayante , souvent sans
aucune beauté comme les tours inclinées , hors d'a-
plomb de Pise et de Bologne; on peut les regarder
avec curiosité, mais on finit par s'avouer que l'ou n'a
vu qu'un défaut, une manque de solidité, et s'il est vrai,
comme l'assurent quelques écrivaius , que l'architecte
qui construisit une de ces tours l'ait fait ainsi à des-
sein , nous en conclurons que cet artiste s'entendait
mieux à faire une folie qu'une chose de goût. Eu
France et en Allemagne on admire de hauts clochers
en pyramides, découpés à jour par uue composition
d'arabesques , de petites colonnes et de niches ornées
de figures.
A Milan on trouve celte richesse de goût , cette
construction hardie et légère en même-tems sur toute
,-œ( 162 )»-»
la surface extérieure de la Cathédrale , et de plus la
richesse de la matière , car tout est corume le reste
de l'église de marhre blanc. Comme ou a pu parcou-
rir tout l'intérieur sans peine sous la voûte et entre
ses immenses colonnes, on peut en dehors se prome-
ner sur toute la surface sans danger. Aussi n est-il
aucun étranger qui puisse quitter Milau s'il n'a pas
été sur ces plateformes, et il n'est pas un voyageur,
ayant parcouru les parties connues de notre globe qui
ne dise , qu'il n'a rien vu de semblable ni d'aussi
beau (v. Pli LI. ).
On trouve dans un angle de la croisée transversale,
à droite , près du Mausolée des Médici une petite
porte qui conduit à un escalier de i58 degrés. On
arrive par là au second rang des galeries, pavées comme
les autres de marbre blanc. Après est un autre esca-
lier qui conduit au troisième rang, successivement on
monte un troisième escalier , et on se voit au bas de
la grande aiguille. Là est un autre escalier en vis dans
une aiguille particulière et irès-praticahie qui vous
conduit à la dernière galerie située à la plus grande
élévation abordahle de la plus grande aiguille (1).
(1) On compte dans l'intérieur quatre escaliers pratiques dans
les gros piliers des angles aux bras transversaux de l'édifice , et
qui conduisent sur le toit. Un de ces escaliers est hors de service
Il y en a cinq autres plus petites, savoir deux dans les doubles
piliers des angles de la façade, un dans celui à la gauche de la
grande porte qui conduit au balcon de la fenêtre du milieu , et
les deux derniers se trouvent dans les piliers extérieurs des sacris-
ties. Ces deux escaliers servent ordinairement de communication
entre les sacristies et d'entrée aux salles bâties audessus. Ils con-
duisent aussi aux galeries du piccmer oidre.
Lorsqu'on est parvenu à ces hauteurs on voit se
déployer sous ses yeux le vaste et magnifique paysage
de la Lombardie , si riche de plantations , de prairies,
de champs cultivés , spectacle imposant de la na-
ture qu'iuterrompent des niasses non moins belles de
bourgs, de villages bien bâties. Ce tableau, ce pa-
norama si varié par des sites agréables que forment
ici des plaines, là des coteaux, ailleurs des collines
et que bordent à peu de distance les montagnes boi-
sées , et d'un autre côté à l'borizon la cbaine des
Appeuins. Tous ces lieux sont remplis de cbaleaux
élégans, modernes, contrastant avec ceux du moyeu
âge que le lems et les soins des familles ont conser-
vés, et qu'annoncent l'opulence des babitans qui vont
y jouir de la belle saison. C'est à juste litre que ce
pays, arrosé par de belles rivières et des lacs aboudans
en poissons , est appelé le Jardin de V Italie , car sa
surface observée pour ainsi dire à vol d'oiseau du
haut de notre église représente un magnifique jardin
anglais.
Eu rapprochant son point de vue du centre où il
pose, le spectateur voit se dessiner le plan de la
ville de Milan, environnée de beaux canaux auxquels
fournissent abbondamment , toute l'aunée , leur eaux
l'Adda et le Tesiu ; on les voit couverts de bateaux
cbargés des objets nécessaires à cette grande cité, les
marbres, les grains, les bois qui se déchargent dans
des magazinsj tout autour de la ville est un canal inté-
rieur qui lui sert de ceinture et la séparent de ses faux-
bourgs dont la comunication est entretenue par grand
nombre de ponts. Ou jouit encore du coup d'oeil de
voir les rues peuplées d'une quantité d'habitans , les
25
*-e( l6 '( )»-*
uns en carosse ou à cheval , volant où les appelle le
plaisir, les autres plcius d'activité courant à leurs affaires.
11 faut enfin s'arracher à ce spéciale animé pour
porter ses regards sur une des plus hardies productions
de l'art, où tout concourt à étonner les ingénieuses,
nous dirons même les audacieuses conceptions du gé-
nie des architectes qui se sont totalement éloignés
de la route commune en terminant cette église , à
laquelle ils ont voulu donner la forme d'une grande
terasse de marbre , praticable dans tous les sens.
Ce n'était pas assez encore , ils ont voulu conserver
l'immense richesse de l'intérieur en multipliant sous
le ciseau des statuaires, des sculpteurs d'ornemens ,
tout ce que l'art du dessin peut employer pour em-
bellir un édifice somptueux , et ce qui est admirable
c'est que ces objets, quoique placés à une si grande
hauteur n'ont poiut été négligés, ou abandonnés a de
médiocres artistes, on y revoit au contraire avec
plaisir le ciseau de nos habiles statuaires dans cette
quantité immense de figures de diverses proportions.
Ce serait une tâche trop difficile que de décrire toutes
ces beautés, il faut nous borner à parler des plus
remarquables , en laissant le plaisir de les vanter à ceux
qui ont occasion de les admirer.
La couverture de ce temple est formée de 94 di-
visions de pavé en marbre , à plaus iuclinés et distri-
bués en trois ordres ; savoir: 18 au premier plan,
5i au second , et 39 au troisième. Les uns sout sé-
parés des autres au premier et au second plan par
5a petits pans de murs, soutenans des doubles grands
arcs boutans, qui soutiennent la poussée des arcs et
des voûtes à l'intérieur ; ces arcs rampans sont très-
élégamment décorés , de même que les acqueducs ou
«outtières par des ornemens gothiques en forme de
créneaux légers ( v. PI. LU ).
Où monte d'un plan à un autre par le moyeu de
20 escaliers fort commodes, très-doux , placés dans
différentes espaces. La plupart sont garnis de parapets
à jour ornés comme les arcs boutans. Ces terasses sont
environnés par des galeries également à rinceaux go-
thiques découpés et on peut s'y promener avec la plus
grande sécurité ; les arcs et les pans de mur laissent
des passages disposés avec symétrie. Ces petites por-
tes sont décorées de médaillous sculptés, de petites
figures posées sur des consoles ornées et couvertes de
petits baldaquins en pyramide , goût général qui règne
dans tout l'édifice. Il nous semble que les artistes mo-
dernes qui ont terminé cette partie où tout est neuf
eussent du prendre une licence bien plus pardonnable
que celle que l'on a pris à la façade , en suivant de
loin la forme des anciens baldaquins, en donnant aux
leurs un peu plus de légèrté, plus élancés. La vue
de ces galeries à jour fait plaisir, même en supposant
que l'en trouve plus singulier que magnifique cette
grande quantité d'aiguilles de diverses proportions qui
s'élèvent audessus des gros pilastres intérieurs , aux-
quels s'appuient les arcs boutans , et qui vus de loin
semblent hérisser celte espèce de toiture. On s'en
appercevera d'autant plus lorsque tout sera terminé.
Ces aiguilles qui se verront aux trois plans des teras-
ses, seront au nombre de 1 06, savoir: 22 au premier
plan , 40 au second et 44 au troisième. On ne com-
prend pas dans ce nombre les quatre grandes aiguil-
les avec un escalier a vis ; il n'y en a encore qu'une
~-( 1G6 )*->
seule, et les huit petites de construction ancienne sur
le plan inférieur des chapelles de la Vierge à l'arbre
et de S. Jean Bono. Ces aiguilles , toutes composées
d'arabesque entrelacées à jour, sout la plupart ornées de
i6 petites statues de trois différentes dimensions dont
la dernière est à peu-près au naturel. L'amateur ,
l'homme curieux admirera ces figures qui font honneur
aux sculpteurs , dont ils désireront savoir les noms :
nous leurs citerons avec plaisir les Muuii, les Mar-
ches! parmi eux, qui forment aujourd'hui notre école
brillante (i).
La plus belle de ces aiguilles tant par sa construc-
tion que par ses ornemens , est celle octogone ren-
fermant un escalier tournant à vis, iequel conduit à
la grande aiguille qui surmoute toutes les autres. Ou
en doit l'invention à Jean-Antoine Omodeo : elle est
(i) Pour donner une ide'e de la promptitude avec laquelle fu-
rent exécutés les travaux modernes dans cette église , il sulfit de
remarquer qu'en l'an 1806 il n'y avait sur le comble que neuf
aiguilles en outre de celle qui conduit à la plu» grande par l'es-
calier à vis et celles qui sont derrière le choeur et sans y com-
pter les 8 petites que nous n'avons pas notées dans le nombre
total ci dessus de 106.
Depuis l'anne'e 1806 au i83o on a e'ieve' 85 aiguilles de diver-
ses dimensions , de sorte qu'il ne manque du nombie total à l'a-
chèvement de l'e'difice que 10 aiguilles et les trois plus grandes
contenans un escalier à vis autour de la grande aiguille et deux
autres à placer aux angles des bras.
Il reste à citer un nombre infini de travaux d'un autre genre,
savoir une grande quantité d'arcs boutans , de galeries , d'esca-
liers, d'acqueducs, de terrasses, de bas-reliefs, de statues et
d'ornemens qui furent exécutés en si peu de tems sur cette partie
supérieure du temple, et on peut à coup sut calculer que tout
cela réuni forme les quatre cinquièmes de cette partie de l'édifice.
«-*■■( 167 )-«-•>
ceinte d'un charmant parapet par sou dessin, et décorée
d'élégantes figures. Ou regrettera cependant d'en voir
quelques-unes mutilées et gâtées soit parle tems , suit
par des imprudences; de même qu'on désirerait voir
remplacées celles qui manquent totalement sur leurs
consoles ou dans les uiches ( v. PI. LUI. ).
Selon le premier dessin de cette église on devrait
construire encore trois autres aiguilles semblables à
celle que nous venous de décrire et qui seraient
posées sur les trois autres gros pilastres des angles de
la croix à l'extrémité des uefs, et qui soutiennent la
coupole: mais en considérant les ouvrages qui manquent
encore pour l'achèvement du reste de l'édifice et
à l'énorme dépense que nécessiterait la construction
de ces aiguilles , il est présumable qu'elles ne pour-
ront encore de long-tems être exécutées, car celle
dont nous avons parlé, coûta y compris l'achat des
marbres 600 mille livres milanaises, et cette som-
me , vu la différence des tems avec le prix des tra-
vaux aujourd'hui, ne serait pas suffisante.
Lorsqu'on est monté dans l'escalier à vis, on entre
dans une petite tribune couverte , environnée de pa-
rapets en ornemens à jour. Sur un de ce parapets est
scellé un médaillon eu bas-relief où se voit le portrait
d'Omodeo aussi en marbre ayant autour cette inscription
rapportée à pag. 8.
10 . ANTON1VS . OMODEO
VEN . FABRICAE . MLI . ARCHITECTVS (i)
(1) Omodeo ou Amadeo , excellent sulpleur et architecte du
XIV. e siècle, fat charge' de la directiou des travaux de la Cathe-
«— «i( 168 )s— ♦
Les lettres PB sculptés sur le bonnet du person-
nage , indiquent que ce fut Paul Biffi , sculpteur mi-
Jauais du XV siècle qui exécuta ce portrait ; on croit
qu'il y fut placé eu 1600.
Celte tribune exrêmement riche , et belle est sou-
tenue par quantité de petits pilastres enrichis de
sculptures , liés par des oruemens arabesques à jour
et où sont disposés avec goût des médailles et des
charmantes petites figures dans des attitudes variées.
On voit avec regret que de si jolis ouvrages aient été
ainsi exposées et qu'une grande partie de ces figures
soient gâtées, n'ayant leurs formes gracieuses et déli-
cates pu résister aux intempéries de l'air auxquelles
la matière n'a pu rien opposer.
En sortant de celte tribune et passant provisoire-
ment par le sommet d'une des grandes fenêtres pla-
cées dans le tambour de la coupole , et au moyen d'un
court escaliers en bois on arrive à la graude aiguille.
On apprend des registres de la fabrique que la
coupole fut élevée dans le XV siècle. Elle avait formé
drale le i5 avril i49°- H présenta à l'Administration le dessin de
celte aiguille et de la gallerie qui y eu allachée le 1 5 mai i49> .
pt on les vit achevés en i494- Ce lut encore lui qui modella les
jolies figures et les médailles dont elles sont décorées , et en scul-
pta plusieurs. Les oruemens à jour, sont de Tommas Ànuci de
Crémone , très-habile artiste de ces tems.
L'Omodeo , duquel on voit aussi des ouvrages précieux dans la
célèbre Chartreuse près de Pavie, ainsi qu'à Bergame et à Cré-
mone, mourut à Pavie le 5o août i522 après avoir employé ses
talens pendant 52 ans et 4 niois à la construction de la Cathédrale
de MilaD, et il légua à celte église par son testament une possession
dans le territoire de Giovetuaao près de Pavie.
l'objet des soins les plus imporians de l'administration ,
et les difficultés qui s'etaieut présentées en avait fait
différer la construction entière. Lorsque les nefs furent
achevées on couvrit le tambour de la coupole avec un
toit ordinaire. Ce fut Jean Galeas Sforza qui parvenu
à gouverner le Duché de Milan voulut que l'on en-
treprit la construction de cette coupole , et nous avons
Vu en consultant ces livres qu'il y mit la plus grande
ardeur. En effet non content d'avoir pris l'avis de
plusieurs artistes italiens, il voulut aussi consulter des
architectes étrangers qui par de grandes ouvrages avaient
acquis une juste réputation de mérite. 11 s'était d'abord
adressé à la ville de Strasbourg, où l'on venait d'élever
le fameux clocher de sa Cathédrale, et il demanda
qu'on lui envoyât de cette ville des architectes capa-
bles de construire la coupole de celle de Milan. La
première lettre du Duc aux Strasbourgeois porte la
date du 27 juin 1481 j la seconde, adressée à Pierre
Scotti gouverneur de la ville, est du 19 avril 1482.
D'après ces demandes on envoya à Milan l'architecte
Jean de Gralz qui arriva eu i483 avec un de ses fils
et amena plusieurs ouvriers. Il parait que cet artiste
ne répondit pas à l'attente du Duc , car quelques dou-
tes s'étant élevés sur la solidité de la construction , on
eut de nouveau recours à l'architecte Hammercr aussi
de Strasbourg, comme nous avons déjà iudiqué à
pag. 12 de cet ouvrage, auquel on adressa une lettre
datée du 17 Juin i486. Enfin dans un telle incertitude
De Gratz fu renvoyé dans sa patrie , indemnisé par
une honnête gratification , mais on démolit tout ce
qu'il avait fait.
Eu l'an 1490 on s'adressa encore aux architectes
*— «( I lO )a— >
italiens, et enfin Louis Sforza , successeur du Duc
Jean Galéas, confia la construction à Jean Antoine
Omodeo , dont nous venons de parler, et celui-ci se
fit aider par François di Giorgio de Sienne , et par
Jean-Jacques Dolzebono , milanais (i) ; ces artistes
achevèrent cet ouvrage en i4q5- Pour faire exécuter
les autres parties imparfaites de l'église on adjoignit
Pierre délia Porta.
Quoique la coupole fut terminée il se passa pres-
que deux siècles avant qu'on s'occupât d'élever l'ai-
guille principale qui devait oruer si magnifiquement la
partie supérieure ; ce fut seulement en 1762 que l'ad-
ministration invita l'architecte François Croce à en
proposer le dessin. 11 préseuta uu projet qui fut vi-
vement combattu et donna lieu à des discussions aux-
quelles Croce répondit très en détail par un mémoire
où il défendit son ouvrage. Néanmoins l'administration
voulut agir avec prudence sur un objet aussi impor-
tant ; elle décida que le projet présenté serait soumis
à l'examen de plusieurs célèbres mathématiciens et ar-
chitectes avant qu'elle se détermina à l'approuver et
en ordonner l'exécution.
Les opinions qu'on recueillit , plus ou moins favo-
rable au projet de Croce , conclurent cependant à
l'approuver, ayant reconnue la certitude de la solidité
dans la construction de cette aiguille.
(1) Ce fut dans cette ciicostance qu'on consulta le Bramante,
qui dans le même temps dirigeait la construtiou de la magnifique
Chartereuse près de Pavie. Le ce'lèbre architecte approuva le projet
de l'Oraodeo , et lui accorda des éloges pour l'ingénieuse légèrté,
réunie à la solidité qu'il proposa dans son dessin, rapport à U
coupole.
Alors Croce s'étant aussitôt mis à l'oeuvre , il eut la
satisfaction de la voir achevée en 1772 telle qu'on la
voit , non seulement admirable par sa masse hardie et
imposante , mais en mêmé-tems par la richesse du
travail
Le tambour de la coupole , de forme octogone est
soutenu dans les angles par huit gros pilastres, entre
lescpjels sont placées autant de fenêtres de style gothi-
que, ornées de rosaces sculptées, ayant autour des sta-
tues de diverses proportions. Le plan supérieur sur
lequel on peut aborder, aussi de forme octogone , est
entouré d'une gallerie gothique à jour. Aux quatre
côtés l'architecte a laissé des ouvertures pour donner
accès aux quatre escaliers à vis qui restent à faire ,
et qui devraient être plus hautes que celui qui existe
à présent, et lorsque cela arrivera, on supprimera
l'iguoble entrée qui existe maintenant pour arriver à
ce point. Au centre s'élève la lanterne éclairée par
quatre longues fenêtres et environnée par huit pila-
stres soutenus par huit arcs gothiques à jour, qui
buttent entre les petites aiguilles naissantes de la
base, et tout cela servant à consolider l'élévation de
la grande aiguille. On arrive à la première partie ,
environnée aussi d'une galerie ornée et surmontée par
huit petites aiguilles, eu montant par un petit esca-
lier en vis, placé sur un des côtés de la lanterne
de l'édifice.
C'est ici que commence la partie supérieure de la
grande aiguille , formée par un fust massif au centre ,
autour durpiel on a pratiqué un escalier tournant, et
en dehors elle est soutenue par huit groupes de co-
lonnes , formant des piliers qui s'élèvent jusqu'au der-
2.4
nier balcon ou tribune qu'on appelle Belvédère, orné
comme le reste d'une galerie fort élégante.
Sur ce plan , qui est le dernier facilement prati-
cable, s'élèvent encore huit piliers isolés surmoutés par
autant des statues d'anges dans l'attitude de sonner
de la trompette. C'est la base de la pyramide ornée
de sculptures, d'oruemens, et au sommet de laquelle
est placée la statue colossale en cuivre doré de la
Vierge , ouvrage de Joseph Bini , orfèvre milanais,
(v. PI. LXIV) (1).
Nous avons donné à la page 57 de cette descrip-
tion , le détail des projets et des contestations de nos
principaux artistes devant l'accadémie en 1812, rela-
tivement à la construction d'un clocher correspondant
à la richesse de l'édifice principal , mais comme de-
puis cette époque jusqu'à ce jour il ne fut plus ques-
tion de cet objet, nous nous bornerons à observer à
nos lecteurs que les cloches restent , en attendant une
plus heureuse détermination, dans une tour assez basse,
Mtié en briques , qui est élevée sur la voûte de la
nef principale.
Elles sont au nombre de trois et quoique fort gros-
ses elles n'égalent pas certainement quelques-unes qui
se voyent en France et dans quelques églises en Al-
(1) Le 18 Juillet 1817 la foudre qui toruba sur la grande ai-
guille y occasionna des accidens assez graves, qui furent prompte-
nient reparcs, mais deu* mois après le même événement s'elant
renouvelle, l'administration pour prévenir le retour de ces accidens
et pieserver efficacement cet édifice si exposé eu effet, a fait éta-
blir sur le haut du comble des paratonnèies artistement construits
el savamment disposés, de manière à prévenir tout accident futur.
e( i 7 5 )»-*
lemagne. Ces trois cloches ont été fondues par des
ouvriers de Milan de la même famille , à des épo-
ques différentes. La première, du poids de 25,ooo
livres de Milan a élé fondue en i582 par J. B.
Busca , la seconde, qui pèse i4oo le fut eu 1577
par Denis Busca et la troisième, de 8000 livres fut
coulée en i5i5 par Jeiôme Busca. Autrefois les cor-
des descendaient au milieu de la uef , mais Sangiu-
sto , horloger et mécanicien , trouva le moyen ingé-
nieux de les transpoiter entre deux piliers à la droite
de la nef.
CÔTÉS ET PARTIE POSTERIEURE EN DEHORS.
On retrouve dans l'extérieur de cette église la même
grandeur dans l'exécution, la même richesse dans le
marbre et dans les ornemens que dans la façade et
son intérieur j rien n'y a été subordonné à quelques
parties , rien n'y à été négligé pour qu'on put l'ad-
mirer sous quelque point de vue que l'on choisisse
pour l'examiner. Aussi de toutes parts cette église
offie aux artistes des sujets de tableaux que nous
voyons se multiplier chaque année aux expositions ac-
cadémiques (1). Il est agréable pour l'amateur des
arts d'y voir conservé le premier caractère original
du dessin depuis son commencement ; et qu'on y ait
respecté celte unité qui fait le mérite de pareilles
(1) Les vues intérieurs et extérieurs du célèbre Migliara , ornant
à présent divers cabinets et galeries de l'Europe.
constructions , abstraction faite pourtant de ses por-
tails, que nous avons laissé déjà fort loiu de notre
pensée. ( v. PI. V ).
Il régne dans cet ensemble uue sagesse de concep-
tion , une pureté dans les formes qui s'éloigue entière-
ment du genre trop singulier qui offrent les mo-
numens gothiques, dont les restes en Angleterre sur-
tout attestent cependant du génie dans leurs inven-
teurs ; ici on apperçoit que le goût de la belle archi-
tecture n'était pas trop éloigné.
Tout autour ou voit de forts pilastres saillans , qui
correspondent à ceux de l'iutérieur et qui servent de
contreforts aux voûtes des nefs latérales. Un soubas-
sement grandiose qui règne autour de tout l'édifice
leur sert de base , et ces pilastres sont ornés de belles
corniches sculptées. Sur leurs trois côtés sont placées
des statues posées sur des suports formés par des fi-
gures singulières et toujours variées. Les fenêtres der-
rière le choeur ont de plus une quantité de bustes
différens qui sont placés entre les statues de sorte que
ces côtés sont chargés d'ouvrages de sculpture. Autant
de fenêtres plus petites sont distribuées dans les ordres
supérieurs aux deux flancs de l'édifice , celles des deux
premiers servent à éclairer les nefs daus l'intérieur ,
mais celles du dernier rang ne sont que figurées et
placées au dessus de la voûte ne portent point la
lumière.
Les deux bras de la croix interrompent cette suite
de pilastres et de feuêtres en se projectant plus au
dehors. Nous avons dit qu'autrefois il y avait des
portes qui ont été remplacées par les chapelles de
la Vierge et de S. Jean Bono. Ces deux massifs .
+-«( I 7 5 )a->
ayant été ci-devant des entrées latérales, ont du être
décorés en sculpture plus richement que les pilastres
saillans, tout en y conservant les mêmes mouvemens
d'architecture ; on y a sculpté de fort jolis ornemens
en forme de frise.
Dans le derrière du rond-point on remarque le
même style des côtés, ruais les fenêtres sont infini-
ment plus grandes , plus larges et en tout plus riches
d'ornemens. Les parapets de ce côté et les escaliers
qui conduisent aux plans supérieurs du comhle sont
ornés de riches dentelures, comme le seront par la
suite les parapets ou galeries des ordres pour termi-
ner la décoration générale selon le dessin primitif. On
peut dire avec raison que le chevet de celte église,
tel qu'on le voit, surpasse par son goût , sou élégance
et sa richesse gothique la façade avec son alliance
forcée du style d'architecture romaine , quoi qu'on y
trouve des beautés, sortout dans l'exécution (v. PI. IV
et LXIII) (i).
On sera étonné du nombre de figures de ronde
bosse qui ornent les côtés et les parties supérieurs
de l'édifice. Elles doivent être au complet environs
(i) C'est dommage qu'il faille aller découvrir cette partie inté-
ressante de l'édifice, dans une petite place, appelée Campo Sanlo ,
entourée de maisons d'un aspect mesquin et irrégulier , et obstruée
par nombre de blocs des marbres, car cesl là où se déposent les
matériaux qu'on employé pour l'église , et que la plupart des tail-
leurs de marbres et sculpteurs d'ornement ont leurs ateliers. Il
serait à désirer qu'on abbattit toutes ces baraques , pour former
une place régulière, symétrique, et qui permit de développer l'en-
semble de cette belle partie de l'église.
5ooo, et il n'en manque à présent que les deux cin-
quièmes. A l'exception de beaucoup d'anciennes qui
sont d'un médiocre dessin , la plus graude partie peut
honorer l'école Lombarde, et l'on y dislingue facile-
ment les progrés que la sculpture y a fait depuis le
XV siècle jusqu'à nos jours. Nous avons pensé qu'en
faveur de ceux qui n'ont pu les admirer sur les lieux,
nous devions ajouter aux planches LV et LVI qui
représentent les belles figures de la façade, deux au-
tres pour les statues des autres parties qui correspon-
dent à ces premières par leur mérite.
Pl.LX , n.° 1 et 2. David et Abigail fille de Laban , sa
seconde femme, ouvrage de Biagio de Vairone , bon
sculpteur lombard. Ces statues sont placées sur le
pilastre saillant derrière l'église entre la place de Campo
Santo et l'archevêché. Le David est de bon goût ,
mais on trouvera plus le style grec dans l'Abigail.
N.° 3. S.e Hélène , mère de Constantin embrassant
la croix. Vasari attribue celle statue à Cristoph Solari ,
dit le bossu , le même qui fut choisi pour être l'archi-
tecte de la Cathédrale en i5o6, avec la condiliou
précise de ne pas abandonner la sculpture. Cetle statue
est placée près de la grande fenêtre en face de l'ar-
chevêché.
N.c 4- S.e Lucie , autre très-belle figure du même
Solari, placée sur le pilastre en face de l'aile gauche
du Palais de la Cour.
N.° 5. On attribue aussi au Solari cette statue re-
présentant Judith tenant d'une main un sabre et de
l'autre la tête d'Holopherne , d'un beau dessin, excel-
lement drapée. Elle orne la grande fenêtre vis-à-vis à
la porte de l'archevêché.
<— «( i >y 7 )■*-*
N.° 6. Celte belle statue représente l'empereur Cons-
tantin ; ou l'attribue à André Fusina , lombard. Elle
est sur le pilastre extérieur de la chapelle dite des
Médici.
PI. LXÏ, u.° 7. C'est S. Albanase martyr, statue
placée sur le pilastre en face de la porte de l'arche-
vêché. Cet ouvrage de Solari réunit la beauté des
formes délicates d'un jeune homme , avec une grande
intelligence de la miologie heureusement développée
dans une altitude violente et douloureuse, propre au
supplice d'un martyr: l'expression de la tête est sublime.
N.° 8. Offre une figure Herculéenne qui soutient
en forme de Cariatide uue goutière ; elle est placée au
premier pilastre vers le cours dit de'Servi, après les
doubles pilastres de la façade. On l'attribue au célèbre
peintre et sculpteur Jules-César Procaccini.
N.° 10. Représente une Madeleine enlevée par qua-
tre petites anges ; Vasari en parle avec éloge. Elle
est du ciseau d'Ange Siciliano, et on la voit au cin-
quième pilastre vers le cours de Servi-
rons donnons sous les n." 9 et 11 un idée des
statues qui ornent la grande aiguille octogone renfer-
mant l'escalier à vis. Ces figures et autres qui ne lui
cèdent pas eu beauté , placées autour de cette même
aiguille sont attribuées à Omodeo.
Le n.° 12 est une autre belle statue de S. Pierre,
ouvrage de Jean Nava. Avant de finir la description
de notre temple magnifique , nous croyons faire plai-
sir à nos lecteurs en leur donnant un apperçu des
nouveaux ouvrages qui à l'aide de la munificence du
Souverain, du zèle de l'admiuistration qui préside à
ces travaux, et par les soins et les lalens de L'ardu-
«— e( 1 "j8 )a— >
tecte actuel , l'ingénieur Pierre Pestagalli , ont clé exé-
cutés en peu de tems, et ceux qui se continuent avec
telle rapidité que l'on peut espérer de voir ce temple,
commencé depuis plusieurs siècles, se terminer en peu
d'années et paraître en toutes ses parties dans son état
parfait et qui fera la gloire des artistes italiens.
Plusieurs embelissemens ont été exécutés dans l'in-
térieur en peu de tems et depuis que les premières
feuilles de cet ouvrage ont parus; nous avons vu
réaliser depuis quelques changemens parmi ceux que
nous avions indiqués étant réclamés du bon goût. En
effet les mauvaises figures eu stuc audessus du Baptistère
ont disparus, les niches vuides des chapitaux des pi-
liers ont été remplies par des statues qui ne sont pas
sans mérite.
Les deux grandes fenêtres et les deux plus petites
latérales de la façade intérieure qui n'étaient pas ache-
vées , sont actuellement revêtus de marbres et des
ornemens analogues, et des sculpteurs sout occupés
de deux statues des patrons de Milan , S. Ambroise
et S. Charles ; elles seront placées sur les angles du
balcon de la tribune audessus de la grande porte au
milieu.
A la grande fenêtre gothique de la façade on a
substitué aux verres blaucs d'autres à différentes cou-
leurs , et comme on a très récemment reproduit à
Milan l'art des peintures sur verre à l'usage antique ,
c'est de cette manière que sera décorée la grande fe-
fenètre de style romain audessus du balcon, ainsi que
les deux fenêtres latérales gothiques. Toutes les fenê-
tres des nefs qui éclairent la voûte repeinte, ont été
également garnis de verres de couleur qui répandent
une teinte douce et cependant brillante. On continue
de peindre ces voûtes et on est maintenant occupé à
celle du choeur. Ou y observera le même goût que
celui des nefs, mais plus riche encore, pour distinguer
le lieu des mystères du reste de l'église. On travaille
sans cesse au pavé en mosaïque; toute la nef du mi-
lieu et le travers en bas vers la façade sont achevées
et la méridienne à été réformée plus simplement.
Des travaux non moins importans ont été exécutés
depuis peu au dehors. Il y avait originairement des dé-
grés à la façade qui se portaient fort en avant , et
qui eu retour à ses angles rétrécissaient le chemin,
particulièrement du côté des arcades dites Coperto de
Figini, ce qui exposait souvent les passans à des dan-
gers par le concours des voilures à ce tournant. Du
côté de la rue qui conduit au Cours de Servi régnait
le long de la Cathédrale une élévaliou de trois dégrés
qui aboutissaient en mourant près du chevet; elle
formait à la vérité un espèce de trotoir pour les gens
de pied , mais elle rétrécissait considérablement la rue.
On à enlevé tout cela et formé à la façade de beaux
dégrés eu granit rouge qui ne se portent pas au de-
là des angles de l'édifice ; ses pilastres de ce côté ont
gagné de l'élégance par l'agrandissement que cela à
dunué à leur hase en ahaissant le terrein.
Nous terminerons notre description par ce passage
du savant accadémicien , le comte Simon Stratico ,
lorsqu'il parle , daus un des ouvrages , de cette Ca-
thédrale.
Le style dit gothique moderne peut fournir matière
à beaucoup d'observations , car si on se demandait
lequel produirait un plus bel effet et un ornement
25
<— s( 1S0 )s-*
p/ws agréable , ou une statue isolée de tous côtés ,
posée sur une console bien ornée, et couverte d'un
baldaquin pyramidal , placé à une hauteur convena-
ble, ou bien cette statue enfoncée dans une niche,
ou dans un tabernacle ? Egalement quel est le plus
bel ornement d'un frontispice qui porte trois figures
sur un acroitère ou de celui qui est terminé par trois
belles aiguilles bien proport ionées ? La question, dit
il, ne serait pas décidée sur le champ.
Fin de la Description.
<-«/ I 8 1 )s9— »
TABLEAU
des dimensions de la Cathédrale de Milan.
M êtres.
Longueur intérieure de la façade à l'ex-
trémilé du chevet , derrière le choeur » 148,1592
Largeur des cinq nefs réunies. ...» 57,4 f x 4
Largeur des deux bras latéraux de la croix,
moins l'enfoncement des chappelles de
S. Jean Bono et de la Vierge dite de
XAlbero » 76,6476
Largeur de la croix , y compris l'enfonce-
ment des chapelles susdites. ...» 87,7531
Largeur des trois nefs , contenant le choeur » 38,4726
Largeur des petites nefs, prise du centre
des colonnes » 9,5686
Largeur de la grande nef » 19,1571
Hauteur des nefs principales, du pavé à
la surface de la voûte . , . . . » 46,8017
Hauteur des nefs moyennes, à la mesure
susdite » 30,6392
Diamètre des colonnes » 2,5282
Grosseur des murailles qui renferment
l'édifice » 2,5285
Hauteur des 52 colonnes , compris la base
et le chapiteau » 24,5924
Hauteur du pavé à la faite de la coupole
jusqu'à la lanterne » 64,4^1 4
Hauteur de la lanterne » 8,9240
Hauteur extérieure de la grande aiguille
audessus de la lanterne * 29,1519
<— s( I 8 2 )»-»•
Métrés.
Hauteur de la statue en cuivre doré de la
Vierge, posée sur la dite aiguille . » 4,1646
Hauteur intérieure, comprise la lanterne » 7 3, 5^55
Hauteur totale, du pavé à la sommité de
la statue de la Vierge » 106,6719
On verra par cette exposition des mesures, que
peu d'édifices en Europe , présentent une hauteur aussi
prodigieuse et une si vaste circouféreuce , que la
Cathédrale de Milan.
Nous croyons de faire chose agréahle à nos lecteurs
en rapportant deux notes très-intéressantes , dans les-
quels on fait la comparaison de la dimensiou de nôtre
temple avec les Cathédrales les plus renommées eu
Europe. La première est tirée de la Guide de Milan
par M. Pirovano, la seconde dans l'ouvrage de feu
M. le Marquis Joachin D'Adda, sur les fabriques et
les mouumens de Milan.
«a Cal6e'3talc 3e TRutau n'est iiife'tieuïc en Simeusious
a ta seufe '^oasinoue 3u "Vatican ; et'fe e'aafe en l'ouaueut
et surpasse en largeur la (?at&e'3rafe des Jforeuce et
loglise de J . 'xau.i à douSres ; et't'e est inoins Saute 3e
celtes-ci Sans f uite'rieur , niais et't'e a p>fus 3e fiauteur en,
Se&ors. (S- f'e'gar3 3es ouvrages 3e scut'pture et 3u uonitîre
3e statues eite est supe'rieure à toutes fes e'gfises 3u iuon3e,
sans meute eu excepter «3. ^Pierre 3e cvXome. £Oes ooiia-
geurs instruits ont oGserve' que t'a me'sure 3e fa fouqueut
3e fa Cat&e'3rate T)e IILufau , iu3ique'e Sans une. pierre ,
qui se trouve Dans fa 'Joasitique 3e S. Miette à colonie,
u est pas conforme à fa uc'tite' ; ou peut assurer nue notre
leiupfe a au moins < 2 mètres 3e pfus 3e fa me'sure qui
est marquc'c 3aus cette pierre;
«-*( i83 )»->
^om/iaraùwn ae> ta /Uvrface> totale* aeà
Armciïiaieé ég/id&i coiwiued,
Cadtc 5e J.e Softe à <£oviMcuittMopt'e , réduite postetieure-
meut ew TRjo»C|ue'e , Miêtïe» 9591. t ; S. ^aut' de fou-
dre» », 7 8 0 9 ; e'gtoe De J*. TTbatia def iFiote à jto-
leuce , ut. 7881. 2 . ; S. Miette à <j\ome , ut. 2 i , i 0 3 . i ;
C?at£e'âwife 3c Iftttau , m. i i. 696. 4 ; e'nfi»e de J". Jo-
»ep& à ^at'enue , m. * i * 0 . 6; {Paul&eou à cftouie, Mi. 3 4 S 0;
e'afise 3e c/. £Pauf fioi» de» ni ut» à cR-oiue tu, 98995
eafise 3c J". J"a6iu6 à oR-otue , m. 1/107; fy&be Se
J" ^êifijjpe T&eti à T&apfe» , iu. 2421. 4 ; e^t'tie De
nôtre (Dame à £Pcui» , m. 6288. 6
•*-«( 184 )»-*
NOMS DES PRINCIPAUX ARTISTES
qui furent employés à la construction ou à t embel-
lissement de la Cathédrale de Milan, et dont il
est fait mention dans cet ouvrage.
» ■ ■ —
Arquisti Louis , sculpteur.
Agraii Marc , idem.
Alberti Félix, peintre d'ornemens.
Albeitiui Charles , sculpteur.
Amati Charles , architecte.
Aunex de Fernach , de Fribourg , idem.
Antolini Jean , architecte.
Arezzo Nicolas , idem.
Aller Henry dit Gamodia, architecte allemand.
Baretla Charles , sculpteur.
Baroccio Frédéric , peintre.
Bassi Martin , architecte.
Bellandi Jeau-Baptiste , sculpteur.
Benincuore Amedée, idem.
Besnaii Alexandre , architecte.
Biffi André , architecte et sculpteur.
Bifh Charles , sculpteur.
Biftî Paul , idem.
Bunaveniure Nicolas, de Paris, architecte.
Bono Jean-Jacques , sculpteur.
Bono Joseph , idem.
Bramhilla François, idem.
Buonaroti Michel-Ange, sculpteur et architecte,
Busca Jean Baptiste , dit le Ciochino , sculpteur.
Bussola César, sculpteur.
Bussola Dénis, idem.
Bussola Louis , idem.
Busti Augustin , dit le Bambaja , idem.
Buzzi Charles , architecte.
Buzzi Elie-Vineent , sculpteur.
Buzzi Jean-Baptiste , idem.
Buzzi Joseph , idem.
Buzzi Donelli , idem.
Caloni François, idem.
Campamios (Jean de), architecte normand.
Campione ( Barthélémy de ) , sculpteur-
Campione (Marc de), architecte.
Carabelli Donat , sculpteur.
Carabelli François, idem.
Caradosso , ciseleur.
Casareggio André , sculpteur.
Castelli André , idem.
Castelli François, architecte.
Cosini Sylve , sculpteur.
Cova Jacob , architecte et peintre flamand.
Crespi Jean-Baptiste , dit le Cerano , peintre.
Croce François , architecte.
Daverio Pierre-Antoine , sculpteur.
Délia Porta Jérôme , architecte.
De Maria Jacques , sculpteur.
Dolzebono Jean-Jacques , architecte.
Domiuione Jean-Baptiste, sculpteur-
Ferrandino Joseph, idem.
Figiui Jean-Ambroise , peintre.
Fontana Pierre , sculpteur.
Friesingen ( Ulric de ) architecte allemand.
«-«( 1 86 )i
Fumagalli Ignace, sculpteur.
Fusina André , idem.
Galliuii Jules , architecte.
Gherardinl Mclchiore , sculpteur.
Giorgi ( François di ) architecte.
Giudici Caries Marie , sculpteur et peintre.
Grassi Pierre , sculpteur.
Gratz (Jeaa de) architecte allemand.
Guerra Jean, sculpteur.
Lasagni Pierre , idem.
Lazati Balihasar, idem.
Léon Leoni , dit le Chevalier Aretino , sculpteur,
peintre et architecte.
Lombarde» Cristoph, sculpteur.
Magati Jean , architecte.
Mangoni Fabie 3 idem.
Marchesi Charles-Jérôme, seulpteur.
Marchesi Pompée , idem.
Meda Joseph, peintre.
Merlo Charles-Joseph, architecte.
Mignot Jean , de Paris , idem.
Minicati Charles , sculpteur.
Modena (Philippe de), architecte.
Mouti Caétan de Milan , sculpteur.
Monti Caétan, de Raveune , idem.
Kava Antoine , idem.
Nava Jean , idem.
Omodeo Jean-Antoine , architecte et sculpteur.
Orsenigo (Simon de ), architecte.
Pacetti Camille , sculpteur.
Pasquali Antoine, idem.
Pellegriuo Pellegrini , architecte.
Pellizono André , fondeur en bronze-
Pesiagalli Pierre , ingénieur- architecte
Pizzi ADge , sculpteur.
Pollak Joseph architecte.
Pollak Leopold , idem.
Possenti Pierre , sculpteur.
Preslinari Marc-Antoine , idem.
Presiinaro Cristoph, idem.
Preslinaro Jean-Dominique , idem
Prevosto Aûdré, idem.
Prevosto Jérôme , idem.
Procaceini Camille , peintre.
Procaccini Hercule, idem.
Procaceini Jules-César, peintre et sculpteur.
Quadrio Jérôme , architecte.
Raggi Pierre , sculpteur.
Ribossi Bardiélemy , idem.
Riccardi Joseph- Antoine , idem.
Riehioo François-Marie , ingénieur-architecte.
Rinaldi Ptolomée, architecte.
Rosnaii Joseph, sculpteur.
Rovere Jean-Maur , dit le Fiamenghiuo , peintre.
Rusca Antoine , sculpteur.
Rusca Gracieux, idem-
Rusca Jean-Baptiste, idem.
Sampieri Etienne , idem.
Seregni Vincent , architecte-
Siciliaoo Auge, sculpteur.
Simoncuta Charles , sculpteur.
Soave Félix , architecte-
Solari Bonifort , idem.
Solari Cristoph, dit le bossu, sculpteur.
26
«-«( i88 )*->
Solari Jean , architecte.
Solari Martin , sculpteur.
Solari Pierre-Auioiue , architecte.
Sthorer Jean-Cristoph , peintre et architecte.
TYadaie ( Jacques de ) , sculpteur.
Vairon e Biaise , idem.
Vanvilelli Louis , architecte.
Vismara Gaspard , sculpteur.
Vismara Joseph , idem.
Vismara Isidore , idem.
Vismara Jean-Bapiisie , idem.
Zanelli Sire , idem
Zanoja Joseph , architecte.
Zarabalta François , sculpteur.
Zuccaro Frédéric , peintre.
*-œ( iSg ).»— »
INDEX ALPHABÉTIQUE
des planches et de leurs descriptions.
Quittait en tëas-tefiej7 ûe JeaN GaLEAS VlSCONTI, pte-
«met l/Juc 3e Nloilatt , au rioiilispiccj
Aiguille contenant un escalier tournant, près de la
coupole , Planche LUI , pag. 166.
» de la façade, PI. VI, p. 54-
» principale, PI. L1V, p. 170.
Arcs boutans et gouttières. PI. LU, p. i64-
Autel de S. Agathe, PI. XXIII, p. 87.
» de S.e Catherine de Sienne , PI. XXXIX , p. i55,
» (le Maître-autel), PI. XLI, p 144.
» de S.ePraxède, PI. XXXV11 , p. 129.
Bas-reliefs autour du choeur, PI. LVII, LVIIÏ, LIX ,
p. i5i.
» de la présentation de la Vierge au temple ,
PI. XXV, p. to6.
Chaires, PI. XL1V , p. 1 3g.
Chapelle de S. Charles Borromée, PI. XL VIII, p. 157,
dite Scurolo, PI. XLVH, p. i53.
Chapiteaux, PI. XVII, XVIII, XIX, XX, p. 79.
Chasse de S. Charles Borromée, PI. XL1X, p. j 5g.
Coupe sur la largeur, vers la porte principale, PI. Xill ,
P- 79-
» vers le maître-autel , PI. XV , p. 79.
» sur la longueur, PI. XIV, p 79.
Echaffaudages pour la construction de la façade ,
PI. LX1V, p. 56.
» pour les parties supérieures des flancs,
PI. LXV, p. 36.
Elévation géomelrale de la façade, PL III, LXII,
p. 2 , 41.
» des flancs extérieurs , PI. V, p. 2 , 174.
» du chevet extérieur, PI. VI, LXlil, p. 2, 175.
_«( igo )»-♦
Fenêtre (grande) de la façade, PI. IX, p. 67.
» au chevet intérieur de l'église, PI. XXXI.
p. 121.
Fonds baptismaux , PI. XXII , p 83.
Monument Arçhinti, PI. XL, p 1 35.
» Arcimboldi, PI XXX VI , p. 12 y.
» Caraeciolo , PI. XXIX, p. 117.
» Carelli, PI. XXXV11I , p. 129.
» Médici, PL XXIV , p. 91.
» Vimercali , PI. XXVI, p. 107.
» Visconli , PI. XX.X11I, p. 127.
« denière le choeur, PL XXXII, p. 120.
Pavé en mosaïque , PL XXI , p. 82.
Pilastre simple de la façade, PL VII , p- 60.
» double, PL XI, p. 70.
Plan de l'Église, PL II, p. 1 , 78.
» de la Chapelle de S. Charles Borromée , PL L,
p. 157.
» du Maître-autel, PL XLIII , p. 1 44-
» de la partie supérieure de l'église, PL LI , p. i64-
Porte principale de la façade, PI. VUI, p. 64.
» petite, de la même, PI. X, p. 70.
» principale dans l'intérieur, PL XVI, p. 8t.
» de la Sacristie méridionale , PL XXVH , p. 1 1 1 .
» de la Sacristie septentrionale, PL X\.XV, p. 127.
Soubassement extérieur des Orgues , PL XL1V . p. i5i.
Statues des Apôtres sur la façade , PL LV et LVI ,
p. 58 à 74-
Statues principales sur les côtés et sur le comble de
l'église, PL LX et LXÏ , p. 176, 177.
>. de S. Barthélémy, PL XXX, p 1 19.
» de Martin V, PL XXVI11 , p. 1 1 5.
de Pie IV, PL XXXIV, p. 122.
Tabernacle (le), PL XLII, p. 14$.
Vue de l'église en dehors, PL 1 , p. 1, 173.
■0 de l'intérieur de l'église, PL Xll, p. 77-
F 1 H.
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A Premier p/an
B Second p/an
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F Jiaittïïe avec rm escalier en
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G Aipteducs soutenus d'arcs rampons
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